Une circulaire du ministère de la Justice demande désormais aux tribunaux de ne plus refuser la délivrance de certificats de nationalité française aux enfants de Français nés de mères porteuses à l'étranger. Le gouvernement nie catégoriquement qu'il s'agisse d'un premier pas vers l'autorisation des mères porteuses en France. "Il n'y a pas la moindre modification de la position, ni du président de la République, ni du gouvernement. La GPA dans notre droit est interdite, ça ne fait pas débat", a déclaré Christiane Taubira après le Conseil des ministres. Richesse légendaire de la langue française…
Dans une circulaire d’ores et déjà applicable, le ministère de la Justice a demandé en effet aux tribunaux de ne plus refuser la délivrance de certificats de nationalité française aux enfants de Français nés à l'étranger de mères porteuses, et, ce matin même, le président de l’Assemblée nationale, Claude Bartolone, expliquait chez nos confrères de RTL : "Nous avons un problème d'un certain nombre d'enfants nés (NDLR : de gestation pour autrui) qui, quand ils grandissent deviennent des fantômes de la République". Cette circulaire "n'est pas une légalisation de la GPA à venir", a juré, quant à elle, la ministre de la Culture sur Radio Classique, ajoutant : "C'est simplement une régularisation pour 40 cas d'enfants qui aujourd'hui se trouvent dans une situation administrative absolument kafkaïenne".
Nos cousins fantômes
Kafka ou Goldoni, droit du sol ou droit du sang, cette circulaire ministérielle tombe en tout cas à point nommé : manière déguisée, pour la majorité socialiste, de procéder par étape et en catimini à la légalisation de la procréation médicalement assistée (PMA) dans un premier temps, puis de la gestation pour autrui (GPA), dans un second temps. En effet, il sera alors très simple, dès que le projet de loi sur l’adoption viendra en discussion au Parlement, d’aller au bout de la démarche qui vient d’être initiée pour les enfants de Français nés de mères porteuses à l’étranger et de l’étendre aux enfants, nés sur notre sol, également de mères porteuses. On ne voit pas au nom de quel principe opposable et selon quelle logique, en effet, "les fantômes de la République" nés à Calais ne pourraient prétendre aux mêmes droits que leur cousins fantômes nés à Douvres… Nous atteignons là les limites du double-langage et voyons bien l’extrême faiblesse de la démontration socialiste.
Plusieurs milliers d’enfants concernés
Loin de ne concerner que "40 enfants", les associations impliquées dans la gestation pour autrui – ADFH, C.L.A.R.A.- évoquent plutôt les cas de "plusieurs milliers d’enfants", ce qui, en effet, semble plus conforme à la réalité, ainsi que nous l’écrivions dès le mois d’octobre 2012 ; mais il est difficile, sans doute, de compter les fantômes (lire ici l’intégralité de l’article) : "Autoriser dans un premier temps la PMA, puis, très rapidement, la GPA (gestation pour autrui) pose la double question – et celle-ci est vraiment inéluctable – de la merchandisation du corps humain et de l’eugénisme. Car, si l’on accepte de “briser ces tabous”, comment fixer ensuite la moindre limite ? Est-il possible ou même concevable de n’ouvrir les vannes que jusqu’à un certain point ? Que faire du lien entre la “gestatrice” (quel vilain mot !) et l’enfant durant la grossesse ?
Acceptera-t-on l’accident de parcours, l’imprévu du vivant, accueillera-t-on l’enfant handicapé ne correspondant pas au “cahier des charges initial” ? Y aura-t-il un nuancier pour la couleur de la peau et des yeux du futur enfant, y aura-t-il, après les OGM, des EGSM – enfants garantis sans maladie ?".
L’obscur au-delà de l’obscur
Il y a quelques jours, Christiane Taubira avait indiqué réfléchir à la question de la transcription à l'état civil français des actes de naissance d'enfants nés à l'étranger de mères porteuses. Sa circulaire, si elle vient effectivement clarifier les choses de ce point de vue, ouvre également la voie à une généralisation plus ou moins rapide de ces pratiques, selon un scénario bien rôdé : le fait précède le droit, le droit finit par légaliser le fait et crée "inéluctablement" de nouveaux droits. En l’espèce, "les fantômes de la République" existent, Claude Bartolone les a même rencontrés, il est prêt à leur donner une identité, à la seule condition que lesdits fantômes soient nés hors de chez nous (en Écosse par exemple, ça fonctionne). Mais, comme chez nous il y a forcément aussi des fantômes… qu’à cela ne tienne, la légalisation de la GPA viendra régler le problème une fois pour toutes. Ah ! si seulement toutes les femmes pouvaient louer leur ventre pour pas trop cher, ça ferait vraiment plaisir à monsieur Bergé, qui verrait s’accomplir sous ses yeux le rêve de toute une vie. Comme il l’a dit, avec l’élégance et l’altruisme qui le caractérisent, on ne ferait plus « de distinction dans les droits, que ce soit la PMA, la GPA ou l’adoption ». Avec La Route (lire ici), le terrifiant bouquin de Cormac McCarthy, je n’imagine pas, en ce qui me concerne, pire cauchemar. "Les nuits obscures au-delà de l'obscur et les jours chaque jour plus gris que celui d'avant."
ça pue l'acharnement