Les policiers municipaux pourront désormais filmer leurs interventions. Un décret paru ce mardi 27 décembre les y autorise officiellement. En réalité, ce dispositif existait déjà depuis plusieurs années : Rillieux-la-Pape avait été la première municipalité à équiper ses agents. Avec des résultats apparemment probants.
"Bonjour, je vous informe que cette intervention est filmée." Cette simple phrase semble avoir la vertu d’apaiser les relations avec la police municipale. Le décret, paru ce mardi 27 décembre au Journal officiel, permet ainsi l’usage de "caméras-piéton" par les agents. En la matière, la ville de Rillieux-la-Pape avait été pionnière, puisqu’elle les utilisait déjà depuis l’été 2014.
Au poste de police municipale, ce sont des "retours très positifs" qui sont évoqués : "c’est efficace sur les interventions. Dans 90 % des cas, le simple fait de dire qu’il y a une caméra qui filme permet de calmer la situation. Le bénéfice est même double, puisque cette preuve évite toute mise en cause du policier", indique un agent de Rillieux-la-Pape.
Cette impression sur le terrain semble également confirmée par les chiffres : depuis la mise en place de cette mesure, "une baisse de 70 % des outrages" serait enregistrée selon Arnaud Lacheret, chef de cabinet du Maire. "Rillieux-la-Pape était le cadre idéal pour cette expérimentation, puisque nous sommes souvent soumis à de la petite délinquance. Sachant qu’une caméra tourne, les personnes interpellées évitent d’avoir recours aux injures", argumente-t-il.
De la même manière, les images peuvent servir à éclaircir une situation qui tourne mal. Arnaud Lacheret estime à ce titre que "ce dispositif aurait été bien utile pour savoir ce qu’il s’est passé près du barrage de Sivens" en octobre 2014 : le militant écologiste Rémi Fraisse avait trouvé la mort dans des circonstances non encore élucidées lors d'affrontements avec les forces de l'ordre.
Un flou juridique dissipé
Si la police municipale de Rillieux-la-Pape a pu être équipé avant la parution du décret officiel, c'est notamment grâce à l'utilisation d'une "loi relative aux Tasers qui impose de filmer les interventions", explique Arnaud Lacheret. Une fois les images d'interventions filmées, elles étaient supprimées au bout de 10 jours, comme c'est le cas pour la vidéosurveillance classique.
Désormais, la publication au Journal officiel prévoit un "engagement de conformité destiné à la CNIL". Les données seront conservées pendant six mois puis supprimées automatiquement, excepté en cas de "procédure judiciaire, administrative ou disciplinaire" en cours. À Rillieux-la-Pape, et même si les policiers municipaux utilisent ce dispositif depuis plus de deux ans, des rapports destinés au ministère de l'Intérieur devront être rendus pour évaluer l'impact de cette expérimentation qui va durer un an et demi grâce à ce décret.
Un dispositif "en réflexion" pour Lyon
Du côté de Jean-Marc Joffre, président du Syndicat national des policiers municipaux (SNPM), on se félicite d’une mesure qui n’en est pas une car "déjà existante dans nombre de conventions de coordination". Son collègue Alain Dal, du Syndicat de défense des policiers municipaux (SDPM), estime qu’"il s’agit là d’un plus, mais pas d’une finalité ". Pour lui, le plus urgent consiste à accorder des moyens afin de généraliser l'armement des policiers municipaux en France. À Lyon, Gérard Collomb avait autorisé la police municipale à porter une arme aux lendemains des attentats du 13 novembre.
En ce qui concerne les caméras, le directeur adjoint de la police municipale lyonnaise, Jérôme Hutet, qualifie la disposition d’"intéressante" : "il y a de fortes chances qu’à terme on en achète, mais pour l’instant, nous sommes en réflexion. Il faut étudier la mise en place technique en terme d’équipement et d’investissement." Une mesure qui ne devrait donc pas voir le jour immédiatement dans la capitale des Gaules.