L'agence de l'eau a rendu publiques, jeudi 8 décembre, ses données 2010 sur la pollution de l'eau dans le bassin du Rhône. Le constat est sans appel. Les pesticides sont devenus l'ennemi public numéro 1 de nos rivières, devant les eaux usées et les phosphates. Compte-rendu.
L'agence de l'eau Rhône Méditerranée et Corse a publié, jeudi 8 décembre, son rapport 2010 sur l'état des eaux de nos rivières. Il en ressort que 51% d'entre-elles affichent un bon état écologique, encore loin des 66% fixés par le Grenelle de l'environnement à l'horizon 2015. Leur pollution est surtout liée à la présence de micro-polluants, en particulier de pesticides. Le plus répandu d'entre eux, le glyphosate (susbstance active du Round-up®, herbicide utilisé en zones agricoles sur toutes les cultures et aussi par les collectivités et les particuliers) se retrouve dans les trois quarts des cours d'eau de la région. "On en retrouve en quantité assez importante, jusqu'à 20 mg/litre soit 200 fois la norme de l'eau potable" affirme Martin Guespereau, directeur général de l'Agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse. "Ce pesticide est un perturbateur endocrinien, il a pour conséquence de détruire la microflore des rivières très affectée" affirme le spécialiste.
Très inquiétant également, la présence dans 60% des cours d'eau et 45% des nappes phréatiques de 6 pesticides interdits à la vente depuis 2003 en France, depuis 2008 en Suisse, dont l'atrazine. La présence de ces substances serait due, selon les spécialistes, à un usage actuel, résultant de l'utilisation de stocks encore non-écoulés par les agriculteurs. "On les retrouve dans les eaux libres des cours d'eau, il y a donc encore manifestement des usages", explique Martin Guespereau.
Les autres micro-polluants présents dans les rivières, les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) issus de la combustion des matières fossiles (bois, charbon, pétrole...), molécules cancérogènes, sont présentes dans 97% des cours d'eau du bassin du Rhône et en Corse également. Une pollution qui intervient surtout à proximité des zones urbaines et industrialisées.
Enfin, les PCB toxiques pour l'environnement et cancérogènes, bien connus des riverains du fleuve Rhône, sont présents dans les sédiments du Tillet, affluent du lac du Bourget en Savoie où une usine de fabrication de transformateurs a longtemps fonctionné, et en amont de Lyon, près de l'ancienne usine de retraitement de ces mêmes transformateurs, Trédi.
En revanche, "la bataille contre le phosphate et les eaux usées est en voie d'être gagnée", affirme Martin Guespereau. La présence d'ammonium ayant été divisée par dix ces 20 dernières années.
En tout, 800 paramètres ont été analysés dans les eaux et les sédiments des rivières du bassin Rhône-Alpes-Méditerranée et Corse en 2010 pour répondre à cette enquête. Et si celle-ci donne un bon aperçu de l'état écologique de nos cours d'eau, d'autres substances comme les résidus médicamenteux ne sont pas pris en compte. Ils pourraient l'être à l'avenir. C'est tout le travail que mènent actuellement les chercheurs, relayés au niveau européen par Michel Dantin notamment, député européen et président du comité de bassin Rhône-Méditerranée.
A suivre : le 23 janvier, le colloque "Eau et santé" organisé au Grand-Lyon et le 2 février, la journée de partage des connaissances acquises sur le fonctionnement du fleuve Rhône à Lyon.
C'est inacceptable que les rivières soient encore polluées, de surcroit par des pesticides interdits. Il faut une prise de conscience collective (industriels, agriculteurs, particuliers..).