La cour d’assises du Rhône à Lyon. © Tim Douet

Procès de Rose Filippazzo : "c'était l'enfer à la maison" témoignent ses filles

Le deuxième jour du procès de Rose Filippazzo, jeudi 3 novembre à la cour d'assises du Rhône à Lyon, jugée pour avoir tué d'une balle dans son mari en 2018, a vu la famille de l'accusée décrire l'enfer conjugal vécu par cette mère de famille.

Rose Filippazzo et ses deux filles, Sandrine et Lisa, vivaient "reclus" dans les différents domiciles occupés par les trois filles et leur défunt père Michel Zirafa dans le Rhône. C'est ce qui est ressorti jeudi 3 novembre de la deuxième journée du procès de Rose, jugée pour le meurtre de son mari à qui elle avait tiré une balle en septembre 2018 à Thurins (Rhône).

Selon Sandrine, 29 ans, et Lisa, 20 ans, qui ont témoigné devant la barre pour ce deuxième journée d'audience, leur mère était avant tout une victime sous l'emprise de leur père, qui entre accès de colère, jalousie toxique et mensonges, faisait vivre un enfer à la famille et surtout à Rose.


"Quand les clients étaient là, je devais rester en silence dans l'arrière-cuisine"

Rose Filippazzo


Lisa, qui était âgée de 16 ans à l'époque du meurtre, a par exemple raconté aux jurés comment elle avait dormi avec sa mère dans une voiture devant leur maison un soir, car Michel Zirafa, alors dans une colère noire, était "trop dangereux".

Devant les enquêteurs en amont du procès, Rose avait aussi expliqué comment son mari l'humiliait lorsqu'elle travaillait dans la pizzeria, dont le couple avait été un moment propriétaire à Charlieu dans la Loire. "Quand les clients étaient là, je devais rester en silence dans l'arrière-cuisine. J'ai passé de nombreuses soirées dans cette arrière-cuisine. C'était Sandrine qui faisait tout". Sandrine a approuvé ces faits devant la cour.

Des disputes violentes dans le garage d'où Rose sortait avec des bleus

La fille aînée de Rose a aussi affirmé que sa mère était parfois couverte de bleus après des disputes conjugales dans le garage de la maison, où les deux parents s'enfermaient souvent pour se disputer. "Quand ils étaient tous les deux dans le garage, on voyait les séquelles de ce qui s'était passé avec des objets cassés etc. Ma mère avait mal au cou, aux cotes après ces engueulades. Il lui mettait des grosses gifles", a témoigné Sandrine, d'un débit rapide. Comme si elle voulait enfin mettre loin de sa vie le dénouement tragique de cette vie de famille qui a tourné à l'enfer.

Des violences conjugales que l'avocate de l'accusée, maître Janine Bonaggiunta qui s'était fait connaître en défendant Jacqueline Sauvage, a mis en avant face à la cour.

Selon les deux filles, qui défendent l'amour que leur portait leur mère en opposition à la froideur de leur père pour elles, les disputes violentes ont toujours émaillé la vie de la famille. Pour Joséphine, la grande soeur de Rose, qui a aussi témoigné à la barre jeudi, il y a pourtant eu de l'amour au début de la vie de ce couple qui s'est marié très tôt. Michel Zifara avait 15 ans et Rose Filippazzo 18 ans au moment de leur union. Elle date le début des ennuis à l'année 2013.


"Elle m'a alors appelé à deux heures du matin pour me dire : "je crois qu'il me trompe""

Joséphine, la soeur de Rose


"Elle a eu des soupçons qu'il la trompait avec la femme de l'un de ses clients (Michel Zifara a longtemps été maçon). Elle a réussi à débloquer son téléphone portable un jour qu'il l'avait oublié à la maison. Elle m'a alors appelé à deux heures du matin pour me dire : "je crois qu'il me trompe". Leur relation a vraiment empiré à partir de cette année là", raconte Joséphine.

Maître Marie-Harmony Belloni, l’avocate du père de la victime, a cependant mis Lisa devant ses contradictions. La plus jeune des deux filles a en effet fait évoluer son témoignage au fil des auditions devant les enquêteurs, puis face à la cour ce jeudi. Alors qu'elle avait dit aux enquêteurs "mon papa est un homme bien", elle le présente dorénavant comme un monstre avec qui elle n'a jamais vécu un moment de bonheur. "Mon père venait de mourir et je ne pensais pas que c'était ma mère la meurtrière. Je ne voulais donc pas porter les soupçons sur elle et j'ai dit ça aux enquêteurs alors que c'était l'enfer à la maison", s'est défendue Lisa.

"Il aurait fallu qu'on divorce"

Quand le président du jury a demandé à Rose ce qu'elle aurait aimé changer dans sa vie, la quinquagénaire, prostrée et abattue tout le long de l'audience, a déclaré : "j'aurais voulu épargner mes enfants. Il aurait fallu qu'on divorce". À partir de 2017, le couple vivait séparé. Rose qui avait un amant, Philippe, habitait à Charlieu, alors que Michel Zifara avait déménagé à Thurins dans le Rhône. Selon leurs filles, Michel s'inventait des conquêtes amoureuses lors de cette période pour tenter de regagner le coeur de celle qui était toujours sa femme.

Pendant l'enquête, le juge d’instruction s'était demandé si l’argent ne serait pas le mobile du crime plutôt que les violences conjugales. Michel avait en effet souscrit à plusieurs contrats d’assurance dont la principale bénéficiaire, en cas de décès, était son épouse. Après avoir découvert les infidélités de Rose, il avait préféré désigner son père comme bénéficiaire. Ce qu’elle n’a appris qu’après sa mort. Sandrine, l'aînée de Rose et Michel, a affirmé jeudi que sa mère n'était pas intéressée par l'argent. "Il lui offrait parfois des sacs de cadeaux pour une valeur de 500 ou 600 euros. Elle aurait pu les revendre, mais elle ne le faisait jamais".

Rose Filippazzo risque la réclusion criminelle à perpétuité pour le meurtre de son conjoint. Le verdict est attendu vendredi.

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