Interrogée sur la prostitution le 24 juin dans le Journal du Dimanche, la nouvelle ministre aux Droits des femmes a déclaré vouloir l'abolir. Elle compte s'appuyer sur "une conférence d'experts" français et européens pour y parvenir. Réactions.
Najat Vallaud-Belkacem veut faire disparaître la prostitution du paysage français et partant des rues de Lyon. La nouvelle ministre aux Droits des femmes l'a affirmé ce dimanche dans les colonnes du Journal du Dimanche. "Mon objectif, c'est celui du PS, c'est de voir la prostitution disparaître" a-t-elle dit à un journaliste qui l'interrogeait sur le sujet. NVB a précisé que la "position abolitionniste" [de la France, ndlr] était "le fruit d'une réflexion tirant les leçons des insuffisances des dispositifs actuels".
Quelques jours plus tôt, la Lyonnaise avait répondu la même chose à une journaliste de The Guardian, quotidien anglais (lire ici ). Elle affirmait vouloir réunir une "conférence d'experts sur le sujet en France et en Europe". Pascale Crozon, député socialiste de Villeurbanne, spécialiste du droit des femmes à l'Assemblée, s'est félicitée de cette proposition, tout comme à Lyon, Michèle Vianès, présidente de l'association Regards de femme.
"Les politiques abolitionnistes ont montré leurs limites"
En revanche, l'association de santé communautaire pour les personnes prostituées lyonnaise, Cabiria, s'est inquiétée que cette proposition ne se traduise en une pénalisation du client. Précisant que " les politiques abolitionnistes ont montré leurs limites. Même si elles permettent une lutte efficace contre le proxénétisme, elles ne garantissent pas les droits des personnes prostituées et les ravalent au rang "d’inadaptées sociales" (ordonnances de 60) ". Au contraire, les sociologues, médecins et travailleuses du sexe fondateurs de Cabiria défendent l'idée de "liberté" et d "’autonomie" des prostituées dont il convient avant tout "de garantir les droits fondamentaux".
Lutter "plus durement " contre les réseaux mafieux et les clients
Denis Broliquier, maire divers-droite du 2e arrondissement de Lyon, concerné par le problème de la prostitution dans la mesure où de très jeunes africaines se prostituent près de Perrache, a réagi lui aussi mais de manière différente. "La ministre annonce vouloir faire disparaître la prostitution. Alors que la même Najat Vallaud-Belkacem, élue à la ville de Lyon, vote depuis des années des subventions à des associations (Cabiria, ndlr) qui réclament un statut des travailleurs du sexe" a-t-il déclaré. Il a dénoncé "la schizophrénie" des pouvoirs publics partagés entre l'action des collectivités et celle du gouvernement en la matière.
Le maire du 2e a redit qu'il souhaiterait que les pouvoirs publics mettent en place les moyens de lutter "plus durement" à la fois contre "les réseaux mafieux" et "les clients" des prostituées.
Dans tous les cas, Pascale Crozon a confirmé que le dossier reviendrait certainement bientôt sur la table des députés. En décembre 2011, le Parlement a déjà voté à la majorité une résolution pro-abolitionniste, premier pas selon Cabiria vers la pénalisation du client. "Une loi de pénalisation des clients renforcerait la clandestinité et la précarité des personnes, ce serait un désastre en terme de santé publique" prévient Laura Garby, membre de l'association.