Radars : peut-on se fier à l’étude qui minimise leur impact?

Une récente étude montre que les radars fixes n’auraient permis d’épargner "que" 740 vies entre 2003 et 2010. Loin des 15.000 annoncées jusqu’ici. Mais déjà, cette enquête subit le flot des critiques.

Les radars fixes sont-ils vraiment utiles ? Depuis leur mise en place sur le bas-côté des routes, la question revient fréquemment sur le tapis, et divise. Une nouvelle étude réalisée par deux chercheurs de l’Insee (qui ont depuis quitté l’institut) jette à nouveau le pavé dans la mare et suscite interrogations et critiques.

Et pour cause. D’après cette étude, si l’impact des radars fixes serait fort dans les premiers temps de leur installation, localement, leur efficacité s’émousserait dans le temps. " L’installation de radars fixes dans des communes de moins de 6.000 habitants diminue de 13 à 17% le nombre d’accidents corporels et de 50 à 75% le nombre de décès au cours des premiers mois suivant leur installation, souligne l’étude qui affirme que "cet effet décroit au-delà de 6 mois, tout en restant substantiel : une réduction de 11% pour les accidents et de 25 à 50% pour les décès, par rapport à une situation sans radar fixe".

L’étude affirme que ce type de radar aurait évité "740 décès, 2.750 blessés graves et 2.230 accidents graves entre 2003 et 2011". Un chiffre qui apparait minime comparé à une autre enquête réalisée en mars dernier par un chercheur de l'Institut français des sciences et technologies des transports de l'aménagement et des réseaux. Selon cette étude, les radars fixes auraient permis, entre novembre 2003 et décembre 2010 d’éviter quelque 15.000 accidents mortels et 62.000 accidents non mortels. Autant dire que le gap est énorme.

Vitesse réduite de 10km/h en 10 ans

Du côté de la sécurité routière, on soutient que les radars fixes ont une véritable influence avec une baisse de la vitesse de 10 km/h en 10 ans. "L’accidentologie a diminué de l’ordre de 65% sur une zone de 4.000 mètres autour des radars fixes dans les 5 années qui suivent l’installation", rappelle le service qui dépend du ministère de l’Intérieur. Toutefois sur la méthodologie de l’enquête qui vient d’être publiée, on s’interroge dans les services de la sécurité routière. "L’étude se limite à l’effet du radar sur la commune, mais il doit être mesuré sur un itinéraire ; il est d’usage de raisonner en termes de trajets".

Chantal Perrichon, présidente de la ligue contre la violence routière reste prudente sur cette étude. Elle précise néanmoins l’avoir "confiée à 4 experts reconnus dans le domaine de la sécurité routière", qui auraient déjà pointé des biais. Ils rendront leurs observations dans 15 jours.

Une enquête plus statistique qu'épidémiologique

Il faut dire que l’enquête, plus statistique qu’épidémiologique a de quoi surprendre. Pour parvenir à cette conclusion, les deux auteurs ont utilisé "un modèle semi-paramétrique très flexible décrivant l’occurrence des accidents et l’effet que les radars peuvent avoir sur eux". En gros, ils intègrent de nombreuses données généralement non prises en considération et peu évaluée pour extrapoler leurs résultats. Des effets qui ôteraient la réduction du nombre de victimes d’accidents de la route du crédit des radars fixe. L’effet d’annonce médiatique et la parole politique sont ainsi identifiés comme des catalyseurs de la réduction de vitesse au volant.

"Ils évoquent des changements d’itinéraire à cause d’un radar sur la route, mais connaissez-vous quelqu’un qui change de trajet quand il y a un radar sur la route ?", s’étrangle Chantal Perrichon.

Contactés par Lyon Capitale, plusieurs experts ont refusé de commenter cette étude pour l’instant, tout juste certains l’ont-ils jugée parcellaire, celle-ci ne prenant pas en compte les radars installés dans les communes de plus de 6000 habitants et encore moins sur les autoroutes.

L’Insee, de son côté prend ses distance et affirme que les conclusions de cette enquête "n’engagent que ses auteurs".

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