"Et ils sont où, et ils sont où les écolos ?" "La Métropole de Lyon engagée pour expulser", "C'est ça leur hospitalité ?". Des manifestants ont reproché au président de la Métropole de Lyon, Bruno Bernard et aux maires de Lyon et de Villeurbanne, Grégory Doucet et Van Styvendael, de ne pas en faire assez dans la lutte contre le sans-abrisme. En plein cœur d'une conférence de presse sur la semaine de l'hospitalité. Reportage.
Du 13 au 23 octobre 2021, la semaine de l’hospitalité a lieu dans la Métropole de Lyon. Des conférences débats et des ateliers pour que les citoyens discutent autour de l'hospitalité. Une semaine organisée par la Métropole, les villes de Lyon et de Villeurbanne. "Durant 10 jours, citoyens, associations, acteurs publics et privés, locaux, nationaux et européens, sont invités à se réunir pour échanger autour de l’hospitalité. Plusieurs événements sont organisés gratuitement et ouverts à tous : ateliers, plénières, causeries, expositions, projections, visites, débats...", précise la Métropole de Lyon, qui pilote cette semaine de l'hospitalité.
Des conférences, de nombreux ateliers sont également au programme. Toutes les conférences et les ateliers sont gratuits. Il faut toutefois s'inscrire en amont aux conférences et ateliers ICI. Si la Métropole fait de l'hospitalité "un enjeu du territoire", des associations et collectifs ont organisé plusieurs rassemblements cette semaine "pour rappeler aux pouvoirs publics leur manquement". Le collectif "Jamais sans Toit" et la FCPE 69 se sont notamment rassemblés devant l’Hôtel de ville de Lyon mercredi. Ils dénonçaient notamment l'évacuation de plusieurs squats ces dernières semaines dans la Métropole de Lyon, dont un mercredi à Villeurbanne. Et que plusieurs familles et enfants se retrouvent à la rue.
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Jeudi soir, à l'occasion d'une conférence de presse présentant les objectifs de la semaine de l'hospitalité à la résidence Château-Gaillard, à Villeurbanne - où plus d'une centaine de logements temporaires sont mis en place -, des manifestants ont directement interpellé les élus présents, notamment Bruno Bernard, le président de la Métropole de Lyon, Grégory Doucet, le maire de Lyon et Cédric Van Styvendael, le maire de Villeurbanne.
"Et ils sont où, et ils sont où les écolos ?", chantaient les manifestants derrière les vitres de la salle de la conférence de presse. Devant les élus et associatifs. De nombreuses banderoles ou pancartes ont également fleuri, comme "La Métropole de Lyon engagée pour expulser" ou encore "Expulsion de nouveau squat rue Dedieu (à Villeurbanne), c'est ça leur hospitalité ?".
"On ne peut pas laisser squatter n'importe quel bâtiment"
Bruno Bernard, président de la Métropole de Lyon
Les élus ont observé la scène avec calme. Ils sont revenus ensuite sur cet épisode, défendant ardemment leur "volonté politique".
"Je respecte leur avis, souffle Bruno Bernard, le président écologiste de la Métropole de Lyon. Oui, nous sommes prêts à trouver des solutions. Mais on ne peut pas laisser squatter n'importe quel bâtiment. Il y a des règles. Les associations, y compris celles qui manifestent, le savent. Elle peuvent venir nous voir quand elles repèrent des lieux vides dont elles pensent que ça pourrait faire des lieux d'hébergement".
"Il y a deux ans, la Métropole de Lyon n'accueillait pas des femmes isolées avec des enfants de moins de 3 ans. 200 personnes de ce public aujourd'hui sont accueillis. Ça ne suffit pas mais ce sont 200 personnes qui sont aujourd'hui hébergées", rappelle Bruno Bernard. Il fait référence aux "Tiny Houses", dont trois structures sont actuellement déployées dans la Métropole : à Villeurbanne, dans le 3e et dans le 9e à Lyon. Ces petites maisons constituent un hébergement d'urgence temporaire, ouvertes depuis mars 2021.
"Il y a une vraie volonté politique"
Cédric Van Styvendael, maire de Villeurbanne
Cédric Van Styvendael, le maire socialiste de Villeurbanne, poursuit : "On a ouvert des lieux, on a ouvert un nombre de places, on s'est mobilisés avec le Préfet pour le faire. Après, si certains considèrent que la manière de lutter contre la question du sans-abrisme, c'est de continuer à réquisitionner des biens qui sont des propriétés privées en dehors du droit, chacun prend ses responsabilités. Moi ma responsabilité, ce n'est pas de dire le droit, c'est que le droit soit fait". "On parle aujourd'hui d'expulsion de squat. S'il y a eu un problème à ce moment-là, les collectifs sont suffisamment organisés pour saisir les juridictions et on verra ce qu'il s'est passé. Mais qu'on ne fasse pas de procès d'intention à l'origine", poursuit le maire de Villeurbanne.
Van Styvendael défend sa ligne : "Il y a une vraie volonté politique. Chacun sera jugé sur les résultats. Ce que nous prenons comme engagements, devant les acteurs associatifs, devant la population, on se doutait que ça pouvait être un peu chahuté. On aurait pu le faire d'une autre manière : ce n'est pas compliqué pour le maire de Villeurbanne de demander à avoir une brigade devant l'entrée, mais ce n'est pas notre conception de la démocratie. On est assez clair avec ce qu'on a annoncé, ce qu'on fait et ce qu'on va continuer à faire. Oui, on ne s'en satisfait pas qu'il y ait encore des enfants à la rue notamment. On se donne non pas des objectifs chiffrés sur un nombre de places à trouver, on se donne un objectif de réduction du sans-abrisme sur notre territoire. On ouvre des lieux. Une fois qu'on s'est indignés, il faut passer à l'action".
"Celui qui a la baguette magique pour tout résoudre les problèmes de sans-abrisme ou d'enfant à la rue, je la veux bien cette baguette magique. Personne ne l'a jamais trouvée"
Grégory Doucet, maire de Lyon
Attaqué sur un sujet où ils sont très attendus, socialistes et écologistes, les élus demandent du temps. Et d'être jugés sur les actes. Le maire écologiste de Lyon, Grégory Doucet, insiste : "On ne peut pas nous faire le procès de ne pas chercher à trouver des solutions. Les situations sont extrêmement différentes et complexes. Ce que nous sommes en train de démontrer avec cette semaine de l'hospitalité, c'est que nos collectivités elles cherchent à travailler ensemble. On est en train d'écrire un nouveau récit autour de ça. Villeurbanne, Lyon, la Métropole de Lyon, l’État. On est en train de travailler différemment. Celui qui a la baguette magique pour tout résoudre les problèmes de sans-abrisme ou d'enfant à la rue, je la veux bien cette baguette magique. Personne ne l'a jamais trouvée".
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"Le logiciel, ça fait un an qu'il a changé, poursuit Grégory Doucet, le maire de Lyon. Oui, pour certains, ce n'est pas encore assez. Oui, il y a de l'impatience. C'est normal qu'il y ait de l'impatience, il y a tellement eu d'années où il y a eu peu de choses qui ont été faites. On essaye de répondre à tous les enjeux, à toutes ces problématiques. On n'a pas à rougir. Qu'on soit bousculés, c'est très bien, je les invite à aller bousculer d'autres collectivités qui à d'autres niveaux auraient besoin d'être un peu secouées et de changer de logiciel. Plus on s'y mettra tous ensemble, plus on y arrivera. On est au début de l'histoire. Mais c'est le jeu. On a choisi d'être élu, si on ne voulait pas être bousculé, on aurait fait autre chose", conclut le maire de Lyon.
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Lorsque les pères s’habituent à laisser faire les enfants,
Lorsque les fils ne tiennent plus compte de leurs paroles,
Lorsque les maîtres tremblent devant leurs élèves et préfèrent les flatter,
Lorsque finalement les jeunes méprisent les lois parce qu’ils ne reconnaissent plus au dessus d’eux l’autorité de rien ni de personne. Alors c’est là, en toute beauté et en toute jeunesse, le début de la tyrannie.
La République de Platon