Le mois de juillet 2016 marque un record d’inefficacité du 115 pour les demandes de logement, selon les résultats du baromètre de la Fédération nationale des associations de réinsertion sociale (Fnars), publié ce mardi 16 août. La situation est particulièrement critique dans la région Auvergne-Rhône-Alpes.
Les résultats du baromètre de la Fnars synthétisent les demandes et réponses faites au numéro d’urgence du 115. Durant le mois de juillet 2016, ce sont 21 506 personnes qui ont sollicité le 115 pour un hébergement, soit une hausse de 2,4% par rapport à juillet 2015. Mais les attributions de logement ont été rares.
55 % des appels au 115 n’ont jamais abouti
Malgré le nombre important d’appels, le taux d’attribution de logement ne s’élève qu’à 55%. 11 908 personnes n’ont jamais été hébergées, soit une hausse de 5% sur un an, et le double de la moyenne hivernale. Comme nous l’expliquions dans un précédent article, la politique “du thermomètre” contribue à faire des sans-abri les oubliés de la période estivale.
Les moyens mis en œuvre sont en effet moins importants avec la fermeture des places hivernales. Il ressort ainsi de l’étude de la Fnars que 77% des non-attributions de logement d’urgence sont dues à l’absence de places disponibles.
Pour Sébastien Guth, du foyer Notre-Dame-des-Sans-Abri (Lyon 7e), la période estivale ne doit pas être synonyme de baisse de vigilance : "En hiver, la cause de décès des sans-abri est souvent autre chose que les températures. Ce sont plutôt les accidents, violences, maladies. Nous continuons de rester vigilants en été, il y a autant de morts, voire plus",explique-t-il. En été, les sans-abri ont ainsi plus de chances de devenir les "oubliés".
En Auvergne-Rhône-Alpes, “des situations de quasi-crise humanitaire”
La situation est contrastée, comme l’a souligné sur France Info Florent Guéguen, le directeur général de la Fnars : "On a, sur un certain nombre de territoires, notamment à Lyon dans le Rhône, en Isère autour de Grenoble, en Gironde autour de Bordeaux, des situations de quasi-crise humanitaire", a-t-il déclaré. Elle est encore plus préoccupante dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, qui compte cinq départements parmi les plus mal classés, affichant un taux d’attribution de logement inférieur à 20%. Ce sont l’Isère, le Rhône, la Loire, la Drôme et la Haute-Savoie.
Certains s’insurgent contre l’absence de solutions durables pour les sans-abri. Selon Cécile Rocca, membre du collectif Les Morts de la Rue, les politiques ne recherchent pas de solutions durables pour les sans-abri. "Le 115 devrait être réservé pour les urgences : des hébergements d’urgence si un incendie se produit dans mon logement, ou en cas de violences conjugales. Mais c’est scandaleux ces “rustines” qui ne règlent pas le problème des sans-abri. C’est le mythe de l’urgence, en hiver ou en été, alors que le problème est chronique", se désole-t-elle.
Cécile Rocca regrette également que les sans-abri soient traités comme des "indésirables" dans notre société et que les politiques ne cherchent pas de solutions pour le long terme afin de les aider.
La crainte d’un recul du social
Les résultats du baromètre de la Fnars laissent également apparaître une hausse des demandes de prestations : distributions alimentaires, douches, soins, maraudes, etc. Elles ont en effet progressé de 21% en un an, et de 4% par rapport à la moyenne hivernale.
À Lyon, des aides alimentaires sont proposées avec le restaurant social, les distributions de repas et les épiceries solidaires. Pour la santé et l’hygiène, les bains-douches municipaux permettent d’aider les plus démunis. Mais la fermeture des bains-douches de l'impasse Flesselles (Lyon 1er) en début d’année a provoqué la colère de nombreuses associations, qui ont vu là un recul du social à Lyon.
Comme le confirment les résultats de la Fnars, la politique “du thermomètre” ne règle donc pas les causes profondes du problème des sans-abri, en ne l’abordant que sous l’angle du danger des températures extrêmes. "C’est être dans la rue qui tue ! C’est un drame toute l’année : insécurité, problèmes de sommeil, maladies, accidents, absence de stabilité sociale. C’est notre société qui ne marche pas", affirme Cécile Rocca, du collectif Les Morts de la Rue, qui appelle les citoyens à se mobiliser pour faire comprendre qu’il y a urgence à agir.