Ce mardi 16 décembre, aura lieu le premier comité de suivi des nouveaux rythmes scolaires à Lyon, présidé par l’adjointe à l’éducation. Mais déjà plusieurs points posent question. Taux d’encadrement, Bafa, financement, disparités d’inscription selon les quartiers... Anne Brugnera répond à Lyon Capitale.
©Tim Douet
Lyon Capitale : Combien d’élèves sont aujourd’hui inscrits à l’accueil du vendredi après-midi à Lyon ?
Anne Brugnera : Les chiffres ont bougé depuis le début de l’année, mais ils se stabilisent désormais. 22 899 élèves sont inscrits à l’accueil du vendredi après-midi sur 36 249 enfants scolarisés dans les écoles publiques de Lyon. Je veux simplement rappeler que nous ne nous sommes jamais fixé d’objectif en matière de taux d’inscription. Nous avions simplement évalué des fourchettes par rapport à ce que nous avions observé dans les autres villes qui avaient déjà mis la réforme des rythmes scolaires en place. En maternelle, nous avions estimé à 60 % la fourchette haute et nous y sommes, ce qui prouve qu’il y a un réel besoin dans le domaine.
Mais il y a d’importantes disparités entre les arrondissements…
C’est vrai, ces taux d’inscription sont plus faibles dans les arrondissements et les quartiers plus populaires et il y a encore des disparités entre certains quartiers et certaines écoles (68,8 % d’enfants inscrits dans le 2e contre 57,7 % dans le 9e). Mais ça n’a rien de nouveau. Nous observions déjà ces taux d’inscription plus faibles pour l’accueil du mercredi après-midi.Comment l’expliquer ?On évoque souvent la tarification. Mais c’est faux. Il y a déjà eu un essai de la gratuité totale en ce qui concerne les mercredis après-midi, mais ça ne fait pas exploser les taux d’inscription. Je rappelle aussi que les tarifs de l’accueil du vendredi sont calculés en fonction des revenus des parents et peuvent être extrêmement modulés.
Au point d’atteindre la gratuité pour les plus modestes ?
Certaines familles peuvent solliciter l’aide à l’intégration scolaire pour financer l’accueil périscolaire de leur enfant, mais on n’arrive pas à zéro euro. Nous faisons toujours en sorte qu’il y ait un petit reliquat symbolique.
Alors, si ce n’est pas le prix, qu’est-ce qui coince ?
On soupçonne que, pour certains parents, une activité qui n’est pas obligatoire est une activité sans réel intérêt. C’est donc à nous de les convaincre. C’est à nous d’aller vers les parents pour leur expliquer que ces activités périscolaires sont un véritable plus pour leur enfant. Certains centres sociaux et MJC ont mené des actions pour aller vers les parents et prendre le temps de leur expliquer le bien-fondé de ces activités. Et ça marche. À Saint-Rambert, par exemple, on atteint des taux d’inscription qui frisent les 90 % dans certaines écoles.
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Ces faibles taux ne viennent-ils pas simplement d’activités peu attrayantes ?
Les activités se sont renforcées depuis la rentrée. La Ville met désormais à disposition des installations sportives, la patinoire Baraban par exemple. Mais il a là aussi fallu faire preuve de pédagogie avec les parents, qui jugeaient un peu simples certaines activités, comme le coloriage. Mais on ne va pas faire faire trois heures de parcours sportif à un enfant de maternelle.
Ce sont les seuls freins à l’inscription ?
Il y a aussi le frein administratif, qu’on ne peut pas négliger. Pour certaines familles, les démarches d’inscription sont compliquées. Il y a aussi le sentiment de culpabilité que peuvent éprouver certaines mères ou certains pères qui ne travaillent pas et sont à la maison à l’idée de laisser leur enfant en accueil périscolaire alors qu’ils pourraient garder les enfants eux-mêmes. Et puis il y a aussi tout simplement ceux qui ne veulent pas et ça se respecte.
Combien y a-t-il eu de désinscriptions de l’accueil du vendredi depuis le début de l’année ?
En tout, 355 désinscriptions. Mais en fait il s’agit pour la plupart d’enfants qui s’étaient préinscrits et qui finalement ne sont jamais venus. On peut dire qu’il y a eu 97 vraies désinscriptions d’enfants qui participaient aux vendredis après-midi et qui n’y sont plus revenus. Sur 22 899 élèves, c’est assez peu. À noter qu’il n’y a pas de pic de désinscription dans un quartier ou une école.
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Quel est le taux d’absentéisme à l’accueil des vendredis après-midi ?
On se situe autour de 6 à 8 %. C’est à peu près le même taux qu’en classe. Il n’y a pas d’obligation de présence, mais c’est vrai que les enfants s’adaptent mieux si leur présence est inscrite dans la durée.
Comment va s’organiser le suivi de cette mise en application des rythmes scolaires à Lyon ?
Nous avons pensé un dispositif à 3 échelons. Au niveau de l’école, le conseil de vie périscolaire rassemblera les parents, élus ou non, le directeur de l’accueil de loisirs, des animateurs, des agents municipaux des écoles... Les comptes rendus de leurs travaux seront affichés dans les écoles.Nous mettons également en place le réseau d’arrondissement, qui traitera à l’échelle de l’arrondissement de tout ce qui influe sur la vie scolaire et éducative et sur les temps de l’enfant.Il y a enfin le comité de suivi, qui est l’instance prévue dans le cadre de la réforme. Il sera présidé par l’inspecteur d’académie et moi-même. Il impliquera les services de l’Éducation nationale, de la Ville, les fédérations associatives engagées, la direction départementale de la cohésion sociale, la Caisse d’allocations familiales et les fédérations de parents d’élèves. Ses travaux seront alimentés par les retours des conseils de vie périscolaire à l’échelle de l’école et des réseaux d’arrondissement.
Quand tout cela doit-il se mettre en place ?
En ce qui concerne les réseaux d’arrondissement et les conseils de vie périscolaire, ce sera visiblement en janvier. En revanche, la première réunion du comité de suivi aura lieu le 16 décembre. Ce sera une réunion d’installation.
Ce n’est pas un peu tard ?
Non. Il fallait attendre que les projets pédagogiques soient faits, pour permettre au comité d’avoir du grain à moudre.
La maire du 1er arrondissement, Nathalie Perrin-Gilbert, ne vous a pas attendue et a déjà lancé son comité de suivi à l’échelle de son arrondissement. Vous comprenez sa démarche ?
Pas vraiment. J’ai écrit à sa directrice de cabinet pour lui dire d’attendre. Elle a préféré maintenir cette réunion, peut-être par attrait médiatique. C’est dommage, parce que je suis sûre qu’elle se serait inscrite dans le dispositif que nous mettons en place.
Combien d’encadrants ont quitté le dispositif d’accueil périscolaire depuis la rentrée ?
Nous avons eu 1 555 embauches, avec beaucoup de mouvements, mais aujourd’hui nous pouvons affirmer que le taux d’encadrement est assuré et que les équipes sont en place. Il y a eu des départs et nous nous sommes aussi séparés de quelques-uns qui ne correspondaient pas à nos attentes. En tout, 3 directeurs d’accueil de loisir sont partis et quelques animateurs.
Mais vous n’avez toujours pas le taux minimum de 50 % de titulaires du Bafa…
C’est vrai. Nous avions atteint ce taux mais, depuis, il s’est dégradé. Les services réfléchissent à effectuer des transferts d’animateurs. Dans certains centres, 100 % d’entre eux sont titulaires du Bafa. Mais je ne suis pas favorable à cette solution : les équipes sont constituées et les enfants connaissent leur animateur.
Quand allez-vous rentrer dans les clous en terme de taux de Bafa ?
Nous avons déjà formé 157 personnes à la Toussaint et nous allons continuer. Les vacances de Noël sont peu propices aux formations mais, dès les vacances de février, on devrait y être.
Est-ce légal ?
On en a discuté avec la direction départementale de la cohésion sociale, qui nous laisse le temps de former nos animateurs mais nous suit de près. Il faut comprendre qu’il y a aussi des personnes qui ont été recrutées parce qu’elles ont 15 ou 20 ans d’expérience auprès des enfants, même si elles n’ont pas le diplôme.
@TimDouet
Une réforme qui coûte de l'argent, sauf à l'État qui l'a instillée ! En période de crise, c'est une initiative bizarre, voire malheureuse…