Sentinelle : de nouveau au coeur du dispositif de sécurité à Lyon ?

L'opération militaire Sentinelle, parfois contestée sur sa forme jugée statique, avait été réduite à 7000 hommes le 11 juillet dernier, après la compétition de football de l'Euro. Le lendemain de l'attentat de Nice, François Hollande déclare que l'opération retrouve un effectif de 10 000 hommes sur le territoire national. Dans la région, la préfecture envisage de faire appel aux militaires réservistes ou retraités.

Au lendemain des attentats contre Charlie Hebdo et l'Hyper Cacher en janvier 2015, l'opération Sentinelle est mise en place en France dans le cadre du plan Vigipirate : 7000 soldats, dont près de 750 dans le Rhône, sont déployés dans la durée devant les bâtiments jugées sensibles. Pendant un mois, l'effectif peut être porté à 10 000 hommes, ce qui a été le cas depuis les attentats du 13 novembre 2015 et pendant toute la durée de l'Euro 2016. Le 11 juillet dernier, la porte-parole du ministère de la Défense, Valérie Lecasble, déclare que "les effectifs affectés à Sentinelle vont être ramenés de 10 000 à 7000 hommes". Une réduction qui n'a duré que quelques jours, puisque l'effectif est de nouveau porté à 10 000 par la décision de François Hollande au lendemain de l'attentat du 14 juillet à Nice.

Surveillance statique : une compétence de soldat ?

Déjà en octobre 2015, le général Michel Pattin, directeur des opérations et de l’emploi de la gendarmerie nationale, mais aussi Pascal Lalle, directeur central de la sécurité publique à la direction générale de la police nationale, jugeaient que les missions intérieures effectuées par l'opération Sentinelle relevaient avant tout "des activités des forces mobiles de gendarmerie et de police". Cependant, les réductions d'effectifs des années 2010 et 2011 au sein de la gendarmerie et de la police ont engendré l'impossibilité d'affecter des hommes déjà largement mobilisés sur d'autres missions de même importance. Le député François Lamy (PS), chargé d'examiner les crédits alloués en 2016 aux forces armés, conclut dans son rapport que "sans recours aux armées, la mise en oeuvre de Vigipirate alerte attentat ne serait pas possible". Selon le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, l'opération Sentinelle à un cout d'un million d'euros par jour.

Risque de lassitude et baisse des entrainements spécifiques

À en croire le rapport du député François Lamy, l'opération Sentinelle ne semble pas faire l'unanimité au sein de la grande muette. Afin de rester mobilisés sur le territoire pour l'opération, les soldats ont vu leurs journées de préparation opérationnelle s'amoindrir. Le rapport parlementaire souligne que "le rythme de passage des unités dans les centres d’entraînement a dû être considérablement revu à la baisse : 70 % des rotations dans les centres d’entraînement spécifiques ‒ comme le centre d’entraînement aux actions en zone urbaine (CENZUB) et le centre d’entraînement au combat (CENTAC) ‒ ont été annulés en 2015.″ Le député souligne également le risque de "lassitude des militaires", engagés dans une "situation de mise en tension" qui les éloigne longtemps de leur famille pour des opérations de surveillance peu gratifiante et usante, alors que beaucoup considèrent que par nature "l'ennemi terroriste contourne la force". Le 11 juillet dernier à Villeurbanne, deux militaires postés devant la synagogue subissaient une interpellation malsaine de deux individus de 23 et 24 ans : "la kalachnikov est prête".

Rapport de la commission Fenech : une réorganisation de l'opération est préconisée

"L’opération “Sentinelle” n’a pas vocation à s’inscrire dans la durée" a conclu la commission d'enquête parlementaire sur les attentats du 13 novembre mené par le députée (LR) du Rhône Georges Fenech le 5 juillet dernier. Même chose concernant le plan Vigipirate, pour lequel la commission parlementaire considère que "l’incidence réelle sur la menace terroriste de cette posture générale pourrait être discutée, elle n’a pas réellement permis de prévenir un attentat depuis 1995" précise le rapport. Les députés rappellent également les chiffres statistiques de l'opération Sentinelle : les armes n'ont été utilisées qu'une fois le 1er janvier dernier à Valence, après qu'un homme ait tenté d'agresser les soldats. Sans se servir de leurs Famas, les militaires ont fait usage de la force à 28 reprises, dont 17 fois en état de légitime défense, six fois en prêt de main-forte aux forces de l’ordre et cinq fois pour des interpositions ou des flagrants délits. Ils ont également constitué 1 302 périmètres de sécurité, prêté main-forte aux forces de sécurité intérieure à 285 reprises, et porté 151 fois secours à la population.

Le préfet du Rhône souhaite faire appel aux réservistes et aux retraités de l'armée et de la police

Suite à la réunion nationale des états major de l'armée ce vendredi 15 juillet, le préfet du Rhône, Michel Delpuech, a tenu une conférence de presse. Pour lui, le dispositif Sentinelle devra être mobilisé en priorité sur les "grands lieux de rassemblements" et "évènements festifs de l'été". Une présence qui sera évaluée "au cas par cas en fonction du risque et de la présence d'autres forces de sécurité". Sans doute conscient que les nouvelles embauches dans l'armée décidées par François Hollande en 2015 ne seront opérationnelles qu'à la fin de 2017 et que le maintien d'un effectif à 10 000 hommes est difficilement possible dans la durée, Michel Delpuech envisage de soulager les effectifs militaires et policiers en faisant davantage appel aux réservistes, voire même aux retraités de l'armée et de la police. "Il s’agit de faire revenir des militaires à la retraite pour des missions de garde et de proximité. Cela demande une certaine organisation, il faut les appeler, les équiper. Mais la question est clairement posée de faire appel à eux". Un premier chiffre d'un millier d'hommes a été évoqué, sans qu'il ne soit confirmé.

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