[Ils ont fait l'actu] Six mois, quatorze manifestations, un 49.3 et une réforme des retraites adoptée plus tard, la secrétaire départementale du Rhône de la CFDT, Sonia Paccaud, revient sur un mouvement social inédit, soutenu par deux tiers des Français.
"Le syndicat n'est pas à l'arrêt au contraire, on doit rattraper tout ce qui n'a pas été fait pendant des mois !" En cette fin de mois de juillet, Sonia Paccaud est sur le pont. La secrétaire départementale de la CFDT, devenue l'un des symboles de la mobilisation contre la réforme des retraites à Lyon, n'a pas baissé la tête, loin d'être assommée après le revers infligé par l'utilisation du 49.3, le 16 mars dernier. Toujours en tête de cortège, derrière la banderole d'une intersyndicale inédite, unie, Sonia Paccaud a charrié avec elle militants, travailleurs, retraités, étudiants et chômeurs. Rassemblés à quatorze reprises en six mois, emportés par un "sentiment d'injustice inacceptable", dans un mouvement que nul n'a pu lucidement considérer comme une simple litanie.
"Le 19 janvier, on prend conscience d'un moment déjà historique, avec une forme de pression aussi parce que l'on mesure la responsabilité que l'on, de l'obligation de réussir."
Sonia Paccaud, secrétaire départementale du Rhône de la CFDT
C'est en 1998 que l'engagement syndical de cette native du Rhône débute. Alors en emploi jeune dans les centres sociaux d'Oullins, elle rencontre un délégué du personnel syndiqué à la CFDT. "Lorsqu'il est parti, cela a été très naturel pour moi de reprendre son poste", se rappelle Sonia Paccaud, qui se retrouve alors dans les valeurs du syndicat dirigé aujourd'hui par Marylise Léon. Plus tard, elle intègre la sauvegarde de l'enfance du Rhône en tant qu'éducatrice, poursuivant son engagement syndical à travers différents mandats. En 2015, après la naissance de son premier enfant, Sonia Paccaud rejoint pour la première fois l'équipe de l'interprofessionnelle du Rhône, d'abord à temps partiel, puis rapidement à temps plein. À peine deux ans plus tard, elle reprend le poste de secrétaire départementale du Rhône, intégrant parallèlement l'exécutif régional. "Quand on est dans le social, l'engagement au côté des salariés est naturel. Ces dix, quinze dernières années, c'est un secteur qui ne va pas bien en termes de financement", confie Sonia Paccaud.
Pudique sur sa vie personnelle, portée vers l'autre, la secrétaire départementale mène également son engagement syndical sur le terrain du sexisme et de la lutte contre les violences sexuelles. Fière de porter les valeurs d'un syndicat à la pointe sur les questions de société - le seul à s'être positionné pour la dépénalisation de l'avortement dans les années 70 - Sonia Paccaud s'inquiète aujourd'hui d'un "vote refuge vers l'extrême droite", charrié par "la surdité d'un gouvernement et d'un président qui a fait monter une vraie colère". Lorsque près de 40 000 personnes battent le pavé entre Rhône et Saône le 19 janvier dernier, face à une réforme rejetée par deux tiers des Français, "tout le monde y croit très fort", confie Sonia Paccaud. "On prend conscience d'un moment déjà historique, avec une forme de pression aussi parce que l'on mesure la responsabilité que l'on a de l'obligation de réussir", ajoute-t-elle.
"Je n'ai aucun regret. On a déployé tout ce qu'on pouvait déployer"
Sur le terrain, les manifestations se suivent et se ressemblent. La mobilisation se stabilise semaine après semaine à un niveau élevé, atteignant régulièrement les 30 000 personnes à Lyon. "Des anonymes, pas du tout adhérents, venaient nous donner de l'argent. Je me souviens d'une personne d'un certain âge qui ne pouvait pas manifester, mais qui voulait marquer son soutien, c'était inédit", se remémore, souriante, Sonia Paccaud. De plus petits territoires du département "se réveillent", avec des manifestations régulières à Villefranche-sur-Saône ou à Tarare. "On avait des gens de tous horizons, de tous les territoires, pour lesquels cette réforme était injuste", observe la secrétaire départementale de la CFDT. Le 16 mars, Elisabeth Borne utilise l'article 49.3 de la constitution et engage sa responsabilité sur le texte. "Un coup de massue, confie, tête basse, Sonia Paccaud. Et d'ajouter : Puisqu'ils avaient annoncé qu'ils n'utiliseraient pas le 49.3, cela veut dire que, quelque part, nous avions gagné la bataille auprès des députés."
L'oukase 49.3 ne met pas fin au mouvement social, qui bascule dans une seconde phase, plus violente, moins contenue par les syndicats. Les manifestations se poursuivent, zébrées de violences, principalement le fait d'individus constitués en black bloc, en tête de cortège, s'emparant du mouvement social. "Ce sont des choses qui interrogent. C'est évidemment stressant d'être confronté à la violence. Le sentiment d'être empêché de manifester m'a traversé plusieurs fois. Il y a quelque chose de l'ordre d'une captation du cortège, confie Sonia Paccaud. Et d'ajouter : Il y a eu de la lassitude, des personnes qui ont dit, 'moi je ne viens plus'." Le 6 juin, deux jours avant le vote d'une nouvelle motion de censure déposée par le groupe Liot à l'assemblée nationale, une dernière manifestation, en forme de baroud d'honneur est organisée, elle réunit un peu moins de 30 000 personnes. La motion de censure est rejetée, marquant la fin de mouvement social.
"Je m'en souviendrais toute ma vie syndicale"
"Je n'ai aucun regret. On a déployé tout ce qu'on pouvait déployer", juge Sonia Paccaud. On était dans notre rôle. On l'a fait en responsabilité, les militants, les responsables de syndicats, l'intersyndicale, tout le monde a fait le job." La secrétaire départementale de la CFDT est marquée. "Je m'en souviendrais toute ma vie syndicale, la maison a vibré au son de la réforme pendant six mois", confie-t-elle souriante, évoquant "une expérience humaine très forte". "C'est une fierté que l'on a en local, d'avoir réussi à tenir notre intersyndicale. Je suis fière de ce que l'on a réussi à faire collectivement, on y a gagné en crédibilité et en respect", conclut Sonia Paccaud, se projetant sur le nouvel agenda social au programme.
Et les commerçants cassés, pillés s'en souviendront pour certains définitivement !
le comble des décisions prises 49/3 par une ex sympathisante socialiste !! mais ils sont si nombreux à avoir rejoint pour un maroquin, souvent passant d'un poste à l'autre.