immeuble à Lyon
L’Agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes

Soupçons de pantouflage à l'Agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes

Après le Parquet national financier, un signalement a été fait au procureur de la République de Lyon concernant de potentielles prises illégales d'intérêts d'anciens hauts cadres de l'Agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes.

Le signalement met en cause trois hauts cadres de l'Agence régionale de santé (ARS) Auvergne-Rhône-Alpes : Jean-Yves Grall, son ancien directeur (aujourd'hui membre du Collège à la Haute autorité de santé), Serge Morais, ex-DG adjoint et Céline Vigné, qui occupait le poste de directrice de l'offre de soins. Deux autres personnes physiques (un psychiatre et un consultant) et trois sociétés, ainsi que leur filiales, sont également concernées.

Vendredi 12 avril, les référents de l'association anticorruption Anticor dans le Rhône ont porté à la connaissance du nouveau procureur de la République de Lyon, Thierry Dran, des faits qui leur ont été signalés concernant l'ARS d'Auvergne-Rhône-Alpes, l'organisme qui met en oeuvre la politique sanitaire à l'échelon régional. "Dans le cadre de ce signalement, nous souhaitons mettre en lumière des éléments qui nous paraissent montrer que des agents publics de l'ARS d'Auvergne-Rhône-Alpes ont, en tant que responsables de celle-ci, signé ou contribué à valider des autorisations d'ouvertures de cliniques psychiatriques privées, puis, une fois en disponibilité, ont collaboré directement ou indirectement avec celles-ci, en y occupant des postes à responsabilité."

Pantouflage

Dans cette note circonstanciée de treize pages - à laquelle Lyon Capitale a eu accès -, les référents locaux d'Anticor s'interrogent sur le fait que Serge Morais et Cécile Vigné aient reçu "des participations en travail et en capitaux" ou soient "intervenus dans plusieurs sociétés privées", dont une partie est liée à des autorisations d'ouvertures validées par l'ARS. Et de citer l'article 432-13 du code pénal qui réprime la prise illégale d’intérêts commise par un ancien agent d'une administration publique, une infraction pénale qui sanctionne schématiquement le fait d’avoir été des deux côtés.

On parle ici de délit de "pantouflage", qui désigne l’infraction de prise illégale d'intérêts commise par une personne ayant exercé une fonction publique, avant l'expiration d'un délai de trois ans suivant la cessation de ces fonctions.

Article 432-13 du code pénal
"Est puni de trois ans d'emprisonnement et d'une amende de 200 000 €, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l'infraction, le fait, par une personne ayant été chargée, en tant que membre du Gouvernement, membre d'une autorité administrative indépendante ou d'une autorité publique indépendante, titulaire d'une fonction exécutive locale, fonctionnaire, militaire ou agent d'une administration publique, dans le cadre des fonctions qu'elle a effectivement exercées, soit d'assurer la surveillance ou le contrôle d'une entreprise privée, soit de conclure des contrats de toute nature avec une entreprise privée ou de formuler un avis sur de tels contrats, soit de proposer directement à l'autorité compétente des décisions relatives à des opérations réalisées par une entreprise privée ou de formuler un avis sur de telles décisions, de prendre ou de recevoir une participation par travail, conseil ou capitaux dans l'une  de ces entreprises avant l'expiration d'un délai de trois ans suivant la cessation de ces fonctions."

Un signalement au Parquet national financier

Il s'agit, selon Anticor, des sociétés privées de santé mentale Clinipsy ("connues sous les noms de Psypro et Eiaja et implantées dans plusieurs villes") et Ykoe (et ses filiales), vers laquelle tous les actifs de Clinipsy ont été transférés.

"Il semble que l’on puisse soupçonner M. Morais et Mme Vigné de la commission du délit de prise illégale d’intérêts commis par un ancien agent d’une administration publique" conclut l'association Anticor dans son signalement au parquet de Lyon.

Le signalement d'Anticor au procureur de la République de Lyon fait suite à un premier signalement, concernant les mêmes faits, déposé le 18 février 2023 devant le Parquet national financier par l'ancien directeur du centre hospitalier psychatrique Saint-Cyr (à saint-Cyr-au-Mont-d'Or), Jean-Charles Faivre Pierret.

Ce dernier avait été récompensé, samedi 27 janvier dernier, d'un prix Ethique de lanceur d'alerte par l'association contre la corruption Anticor. La Marianne qui lui avait été remise à Paris avait salué son "courage" pour avoir dénoncer les pratiques de conflit d'intérêts à l'Agence régionale de santé (ARS) d'Auvergne-Rhône-Alpes.

Lire aussi :
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