Retour sur le débat tenu ce jeudi 6 juillet aux salles plurielles Truffaut concernant les graffitis dans le quartier des pentes à Lyon. Trois intervenants et une trentaine de riverains ont échangé sur ce sujet tendu.
Ce jeudi 6 juillet, une trentaine de riverains du quartier des pentes dans le 1er arrondissement de Lyon se sont réunis. La mairie a organisé une table ronde au sujet des graffitis dans le quartier, dont les habitants déplorent la quantité.
Une fois les riverains installés dans les salles plurielles Truffaut, c'est Yasmine Bouagga, la maire du 1er arrondissement, qui prend la parole. Elle évoque un sujet complexe, les "tags pouvant être perçus comme une dégradation du cadre de vie, mais aussi comme une expression artistique spontanée". Avant de donner la parole aux intervenants, un représentant des conseils de quartier s'exprime : "Notre occupation, ce sont les immeubles dégradés et à réparer. De quel droit on tague mon immeuble, mon environnement. Nous savons que les services de la ville font tout leur possible mais qu’ils sont exsangues dans les moyens".
Autour de la table, ce sont successivement Julie Vaslin, docteure en sciences politiques et auteure de Gouverner les graffitis, Jérôme Catz, fondateur et directeur des espaces et centres d’art Spacejunk et Jérôme Coquaz, directeur du Cadre de Vie à la Ville de Lyon, qui prennent la parole.
Un million d'euros chaque année pour l'effacement des tags
D'abord, Julie Vaslin explique la naissance du mouvement de l'art urbain, dans les marges, l'illégalité : "la loi ne dit pas que le graffiti est interdit, elle dit que la dégradation est interdite". Elle précise que le graffiti est pratiqué par toutes les catégories sociales. Elle questionne l'audience ; pourquoi trouvons-nous certains tags beau, et d'autres sales, invasifs. Souvent, ce sont les services municipaux et de détagage qui se retrouvent à l'arbitrage : beau ou pas, légal ou non.
Justement, le directeur du cadre de vie à Lyon, Jérôme Cauquaz, a pour mission le détagage. Il détaille les deux stratégies possibles : "soit le systématique, c’est-à-dire qu’on prend une rue et qu'on efface tout, soit on a un contrat de détagage et on efface là où l'on est missionné". A Lyon, c'est la deuxième option qui a été retenue, les riverains pouvant souscrire au contrat "façade nette". Jérôme Cauquaz indique que le coût de l'effacement des tags se porte à un million d'euros par an, dont 300 000 € pour les pentes. Ce travail serait pourtant peu efficace.
"Si on veut être la capitale des tags, c'est bien parti"
La parole est alors aux habitants, dans une ambiance qui se crispe. La plupart d'entre eux dénonce une prolifération des tags ces dernières années, notamment sur des lieux du patrimoine UNESCO. C'est ce qu'exprime Didier, un habitant : "Il y a des choses intéressantes, et d’autres dégueulasses. Est-ce que l’afflux des tags n'irait pas à l’encontre de l’expression artistique ?". Un autre rebondit : "Je suis un fan de street art quand il est de qualité. Je peux admettre tous les arguments, mais je ne peux pas accepter que le monument rue Burdeau soit dégradé".
"Si on veut être la capitale des tags, c’est bien parti", ironise même l'un des habitants. Pourtant, pour d'autres, le quartier des pentes est aussi celui, historiquement, de l'expression artistique et du street art. "Je trouve qu’effacer les tags du quartier c’est aussi renier l’histoire de ce quartier", enchérit un riverain de longue date. La question des graffitis, c'est donc aussi celle de juger ce qui est de l'art ou non.
Cette prolifération récente (le tag n'étant pas une nouvelle pratique), s'explique pour Julie Vaslin par le changement des villes : "Dans plein de villes, les contre-cultures sont dans des lieux alternatifs et le jour où ces lieux disparaissent avec la densification des villes, les contre-cultures émergent dans l’espace public".
Effacement systématique ou promotion du street art ?
Différentes solutions ont été abordées dans la soirée. Edouard Hoffmann, tout d'abord, a pris la parole pour dénoncer les tags et présenter sa pétition. Celle-ci, intitulée "Propreté et sécurité à Lyon", appelle la Ville à enlever de manière systématique tous les tags et à créer une brigade d'agents municipaux de proximité.
Pour d'autres, la solution serait plutôt de "faire le développement du street art en parallèle" ou de "dynamiser les murs d'expression libres". Jérôme Catz prend l'exemple de Philadelphie, qui avec son programme d'art mural a accompagné les graffeurs.
"Le mur appartient au propriétaire"
Si le développement du street art est dans les compétences de la Ville, elle ne peut en revanche effacer que les murs publics : "Le mur appartient au propriétaire, ce n'est pas évident que la mairie doive intervenir car elle agit sans l’avis des propriétaires", note Julie Vaslin. De plus, des conflits de compétences peuvent exister avec la Métropole.
Enfin, le chef d'une entreprise privée d'effacement de tag, Aspectra, évoque une autre piste : "La clé est d'intervenir vite, car les graffeurs perdent de l'argent et reviennent moins".
A la fin des interventions, la première adjointe à la mairie du 1er prend la parole, assurant que "cette table ronde est un point de départ pour ce sujet". Les riverains ont ensuite pu continuer d'échanger autour de boissons et apéritifs.
Apaiser quoi ? La "Mairie" ne fait rien contre ces tags. Voila, c'est tout, c'est factuel.
Ils vont encore se chercher des excuses, c'est ça ?
Bonjour. J'ai assisté à cette réunion; auparavant, je m'étais rendu sur les sites des intervenants, de qualité en général. J'ai pu ainsi anticiper sur ce que nous allions entendre; historiquement intéressant, mais ce qu'attendaient les Croix Roussiens présents, c'étaient une ébauche de volonté de lutte contre cette invasion prolifique des tags. Il n'en n'a rien été. Il faut savoir que les pouvoirs des mairies d'arrondissement sont extrêmement limités. La seule décision peut venir de Grégory Doucet; il ne semble pas à ce jour qu'un tel combat soit dans ses projets. Or, il y a URGENCE; d'ici quelques mois, un cap de dégradation sera franchi et le retour impossible. Une réunion pour rien? A suivre
Qu'appelez-vous un "cap de dégradation franchi" ?
"Le mur appartient au propriétaire, ce n'est pas évident que la mairie doive intervenir car elle agit sans l’avis des propriétaires", Ou dire on s'en lave les mains !