Son appel à une unité de la gauche incluant le PS pour les élections municipales 2026 a crispé dans son camp. L'adjoint LFI au maire de Lyon, Laurent Bosetti persiste et signe.
"Il faut que nous soyons unitaires pour les prochaines échéances électorales." Rejetant la position de Jean-Luc Mélenchon qui excluait le PS du Nouveau front populaire, les propos de Laurent Bosetti sur le plateau de 6 minutes chrono la semaine dernière ont suscité une vive réaction de la députée La France insoumise de la 1ère circonscription de Lyon, Anaïs Belouassa Cherifi.
L'unité de la gauche, avec ou sans le PS ?
"En politique, les aventures solitaires se terminent dans la solitude", a prévenu la députée dans un post X. Et le député LFI de Villeurbanne, Gabriel Amard de réagir lui aussi : "Monsieur Bosetti, il n’y a pas plus unitaires que nous. Nous continuerons à rassembler sur les bases du programme du NFP. Pas question de se rassembler sur la base de la capitulation du PS."
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En coulisses, il se murmure même que l'adjoint LFI de Grégory Doucet pourrait écoper d'une mise à l'écart voire d'une exclusion du parti au sein duquel la critique du chef Jean-Luc Mélenchon et l'expression d'un avis divergeant sont peu voire pas tolérés. Laurent Bosetti persiste et signe. Il répond aux questions de Lyon Capitale.
Lyon Capitale : Vos propos appelant à une unité de la gauche incluant le Parti socialiste ont fortement irrité les députés LFI du Rhône, vous attendiez-vous à une telle réaction ?
Laurent Bosetti : Je dirai que je regrette la surréaction. Dans mon propos, il n'y a aucune provocation ou agressivité, il s'agissait juste d'exprimer une opinion différente de celle de Jean-Luc Mélenchon. Je veux bien entendre que les uns et les autres ne se retrouvent pas dans cette stratégie. Ce qui me gêne un peu plus dans cette surréaction, c'est le fait que ne puisse pas s'exprimer une proposition divergente mais qui n'est pas non plus farfelue.
"Mes propres camarades qui ont été élus avec l'unité et uniquement avec l'unité de la gauche, ceux là seraient capable de dire qu'il faut partir seuls. Je trouve cela extrêmement étonnant"
L'unité de la gauche a été pratiquée dans le NFP et dans la Nupes, c'est une proposition solide qui mérite d'être mise au débat. Cette surréaction me semble créer quelque chose de conflictuel là où il n'y en avait pas besoin. Il y a une conflictualisation du débat, comme si on voulait faire taire les expressions divergentes dans le mouvement.
Anais Belouassa Cherifi vous a appelé à "respecter les insoumis lyonnais qui construisent ensemble leur stratégie municipale". Vous êtes un insoumis lyonnais, qui plus est membre de l'exécutif municipal, participez-vous à ces débats ?
Les assemblées municipales qui vont définir la stratégie vont arriver dans les prochains mois. C'est justement parce qu'elles n'ont pas encore eu lieu que je trouvais normal de pouvoir alimenter le débat en proposant une perspective. D'ailleurs je n'avais pas prévu de la proposer avant que Jean-Luc Mélenchon ne prenne de manière assez unilatérale, selon moi, une position selon laquelle les socialistes ne seront plus nos alliés. Le but n'est pas de s'arrêter à chacun de nos différends, sinon le NFP éclate chaque mois.
Il y a une opinion de JLM qui s'exprime, il ne va pas être repris. Et s'il y a une opinion qui diverge, là on nous reprend en disant qu'il ne fallait pas s'exprimer avant le processus collectif. Selon que vous soyez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir d'une certaine manière.
Vous estimez qu'il n'y a pas d'intérêt pour la France insoumise de se lancer au premier tour sans les socialistes, voire sans les écologistes ?
L'objectif, c'est la victoire de la gauche avec une forte représentation des insoumis. Pour autant à chaque fois que la gauche veut se compter et part chacun dans sa ligne de course pour faire valoir sa boutique, elle se plante. Les électeurs appellent à ce que la gauche se réunisse. Et d'ailleurs dans le rapport de force, quand on voit la force de la réaction que ce soit la droite conservatrice ou de l'extrême droite, nous avons tous intérêt à partir ensemble.
"Les insoumis sont largement sous-représentés par rapport au poids électoral qu'ils ont enregistré sur les différents scrutins"
C'est d'autant plus vrai dans des exécutifs où nous sommes aux manettes et où on doit aussi défendre le mandat que l'on a porté ensemble. Mandat évidemment perfectible à Lyon, à Villeurbanne, à la Métropole de Lyon. Mais, on ne doit pas avoir à se distinguer à outrance au premier tour en tapant sur le dos des partenaires avec lesquels on a travaillé depuis six ans.
Les points de divergences qui ont été exprimés depuis six ans sur la ZFE, les caméras de vidéosurveillance ou sur l'hébergement d'urgence à la Métropole ne justifient pas selon vous de partir séparés ?
Pour moi c'est salutaire, nous sommes dans un exécutif où l'expression divergente est permise. Sur les sujets où on n'arrive pas à se mettre d'accord, on le fait savoir, on vote différemment, on dépose des amendements, ça me paraît être une force dans l'unité de la gauche d'avoir quelque chose de respectueux du pluralisme. Sur la méthode, c'est quelque chose à consolider.
Estimez-vous pour autant qu'à Lyon et la Métropole de Lyon, les insoumis doivent être davantage représentés ?
On voudrait parfois me faire passer pour quelqu'un qui ne sert pas les insoumis en demandant l'intégration des socialistes dans une liste commune, mais mon propos est aussi de dire que les insoumis sont largement sous-représentés par rapport au poids électoral qu'ils ont enregistré sur les différents scrutins. Je plaide pour que les insoumis soient beaucoup mieux représentés demain, beaucoup plus qu'ils ne le sont aujourd'hui. L'exemple de Villeurbanne où les socialistes et les insoumis étaient partis ensemble permet aujourd'hui une bonne représentation du groupe insoumis au conseil municipal, et j'aimerais qu'on puisse arriver à un résultat similaire sur un certain nombre d'exécutifs.
"À vouloir exclure le PS et dire qu'ils ne sont plus nos alliés, on encourage une ligne où le PS se présenterait sans le NFP et plutôt en se rapprochant du centre"
Quels sont ces exécutifs, on pense à Vaulx-en-Velin, Vénissieux, ou même Villeurbanne... Ces communes doivent être dirigées par des Insoumis ?
L'avenir de ces communes appartient aux insoumis de ces communes dans leurs assemblées municipales. Derrière cela, ce que je peux dire, c'est que dans toutes ces communes, il faut que LFI soit beaucoup mieux représentée qu'aujourd'hui. À Vaulx-en-Velin, face à une personnalité comme Hélène Geoffroy qui repousse La France Insoumise, les jeux sont très incertains pour une unité de la gauche pure et parfaite. À contrario, à Bron, il me semblerait légitime que nous partions unis avec le NFP et avec une tête de liste insoumise au regard des résultats écrasants que nous avons obtenus lors des derniers scrutins.
À Lyon, il y aussi l'éventualité d'une candidature de gauche qui ne serait pas celle de l'exécutif sortant, on pense à Nathalie Perrin-Gilbert ou à Sandrine Runel, votre message leur est aussi adressé ?
Évidemment c'est mon inquiétude. À vouloir exclure le PS et dire qu'ils ne sont plus nos alliés, on encourage une ligne où le PS se présenterait sans le NFP et plutôt en se rapprochant du centre. On pense à David Kimelfeld ou à Place publique. Comment maintient-on le cap du NFP avec le Parti socialiste ? C'est mon inquiétude principale. C'est pour cela que je leur tend la main, pour qu'on parte tous groupés sans inventer des différences qui dépasseraient tous nos points de convergences beaucoup plus nombreux.
N'y a-t-il pas un clivage entre une relative unité de la gauche locale, et des dissensions plutôt nationales ? D'où ces "surréactions" des députés.
On peut avoir des stratégies nationales qui mettent à mal des négociations et des passerelles locales. C'est dommage parce qu'il est vrai qu'au niveau national nos points de divergences sont plus marqués, mais on a pourtant su les mettre de côté notamment lors des législatives. C'est là aussi un point d'étonnement : mes propres camarades qui ont été élus avec l'unité et uniquement avec l'unité de la gauche, sans quoi ils n'auraient pas été élus, ceux là même seraient capable de dire qu'il faut partir seuls. Je trouve cela extrêmement étonnant.
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Coquille : "cela seraient capable de dire -> "ceux-là"