Les douze nouveaux salariés de l’entreprise à but d’emploi SP Actions. Crédit : Nolwenn Jaumouillé

“Territoire zéro chômeur longue durée” : à la Plaine Santy, de premiers salariés embauchés

Dans le cadre du dispositif, douze personnes ont signé jeudi un CDI avec l’entreprise à but d’emploi Santy Plaine Actions, créée dans le quartier du 8e arrondissement à Lyon.

Le sourire était sur toutes les lèvres ce jeudi matin devant les locaux de Santy Plaine Actions, qui s'est installée dans une ancienne métallerie acquise par la Ville de Lyon dans le 8e arrondissement. Devant un parterre d'invités, les douze nouveaux salariés de cette “entreprise à but d'emploi” ont signé après deux semaines de séminaire d'intégration leur contrat à durée indéterminée, qui débute ce lundi 19 septembre.

Une étape importante dans le processus engagé il y a deux ans pour faire de ce quartier, dont le taux de chômage est de 19,8% parmi les actifs – contre 8,5% à l'échelle la métropole –, un “territoire zéro chômeurs longue durée” (TZCLD). Ce dispositif national, imaginé par ATD Quart Monde aux côtés d'autres associations, fait l'objet depuis 2016 d'une expérimentation dans différents territoires en France – 35 à ce jour, dont trois sur la métropole de Lyon (à Villeurbanne, à Saint-Fons et désormais à Lyon). “La métropole de Lyon est désormais le 1er territoire à bénéficier autant du dispositif”, s'est félicité son président Bruno Bernard. “La création d’un territoire sans chômage de longue durée est l’un des objectifs phares de notre mandat a de son côté rappelé le maire de Lyon Grégory Doucet. Un emblème de justice sociale et de la lutte contre la précarité ! C'est une grande fierté de voir aboutir deux années de travail par l'ouverture de solutions durables pour les personnes les plus éloignées de l’emploi dans le 8ème arrondissement”.

L'objectif est de garantir, dans des zones marquées par un fort chômage longue durée, le droit à l'emploi à des personnes qui en sont éloignées depuis plus d'un an, et qui vivent sur le territoire concerné depuis plus de six mois. Et ce à travers la création d'entreprises spécialement dédiées, comme Santy Plaine Actions. Le projet part de trois hypothèses, rappelées par Joachim Rocamora, président de l'association qui gère l'EBE : “personne n'est inemployable, le travail ne manque pas, et l'argent non plus”. En bref, il s'agit d'identifier les personnes en recherche d'emploi, leurs compétences et les besoins du territoire, et de construire à partir de ces données un projet d'entreprise adapté.

Des emplois conçus sur mesure

“À la différence d'une entreprise classique, une EBE ne choisit pas ses salariés, elle les embauche d'abord puis elle leur construit un emploi”, explique Joachim Rocamora. Les nouveaux salariés de Santy Plaine Actions, âgés en moyenne de 43 ans, comptent 8 femmes et 4 hommes. Certains d'entre eux sont restés de longues années sans emploi, comme Zoumar. "J'ai travaillé un an il y a 20 ans, avant de devenir mère. Mes deux premiers enfants étaient en situation de handicap, puis j'ai eu deux autres enfants. Je me suis donc consacrée à ma famille" raconte celle qui a découvert il y a un an l'existence du dispositif, un peu par hasard, et s'est lancée dans le projet.

Zoumar Mohamed Mbae a signé son CDI jeudi matin. Crédit : Nolwenn Jaumouillé

Le temps de travail chez Santy Plaine Actions, ce sont les salariés qui le choisissent, en fonction de leurs envies et de leurs contraintes personnelles. “Quand on est mère de famille, c'est toujours compliqué de trouver un emploi qui permet de concilier les deux. Pourtant nous avons besoin d'avoir cette place dans la société”, témoigne Ophelia, elle aussi nouvelle embauchée. Sur les douze personnes, six ont choisi d'être à temps plein.

Côté salaires, ils seront rémunérés au SMIC, a indiqué Nicolas Thomas, le directeur de l'EBE. Celle-ci est en partie subventionnée. “Le budget est assuré à 2/3 par l'État et un peu par la métropole avec le gain obtenu sur le RSA grâce à ces embauches. Le tiers restant, c'est notre chiffre d'affaires”. Le jeune dirigeant espère embaucher une quinzaine de personnes supplémentaires d'ici janvier. “On a déjà 40 personnes sur liste d'attente !”. Dans le quartier, 400 habitants sont potentiellement concernés par le dispositif, et l'objectif à horizon 2028 est d'en avoir recruté 200. Pour certains, leur poste au sein de l'EBE sera un emploi à long terme, pour d'autres peut-être seulement un tremplin qui leur aura permis de se former : c'est une autre dimension centrale du dispositif.

Maraîchage, friperie, ludothèque...

Un aspect encouragé par la polyvalence des missions confiées aux travailleurs : l'entreprise étant créée à partir des différents besoins recensés, elle entend développer une large palette d'activités, en tâchant de ne pas empiéter sur les services déjà présents sur le territoire. “Pour former les salariés, on va s'appuyer sur les compétences des uns et des autres, travailler en binôme, etc. C'est aussi un autre management que l'on veut impulser”, détaille Nicolas Thomas.

Certaines de ces missions seront dédiées aux particuliers, comme une ludothèque, qui permettra aux parents et leurs enfants de venir louer des jouets, une conciergerie ou bien du micro-maraîchage. “Nous allons cultiver une parcelle du quartier, et nous allons aussi proposer un service de jardinage aux particuliers”, raconte Zoumar.

“Au-delà des activités pour les particuliers, poursuit Nicolas Thomas, nous allons nous s'allier avec des acteurs locaux, pour leur proposer différentes prestations de service. Par exemple, il y a une TPE du quartier qui fait de la livraison de repas : nos salariés se chargeront de nettoyer leurs scooteurs”. Une friperie lyonnaise, Loca loca, va également les solliciter pour trier, étiqueter et ranger par âge les vêtements.

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