Tests osseux: la métropole de Lyon imite le conseil général

Changement institutionnel ne signifie pas rupture politique. La métropole de Lyon se borne à répéter strictement la politique répressive menée au département du Rhône en matière de protection de l'enfance et tout particulièrement à l'égard des mineurs isolés étrangers.

La section lyonnaise de la Ligue des droits de l'homme s'en est émue dans un communiqué récent. Comment "la métropole de Lyon qui se revendiquait "Ville amie des enfants" peut se montrer aussi ennemie des étrangers jeunes et isolés, arrivés sur son territoire ?"

L'évaluation de l'âge de ces jeunes étrangers, notamment la pratique des tests osseux, figure au premier rang des reproches adressés à la collectivité présidée par Gérard Collomb depuis le 1er janvier dernier.

Les tests d'âge osseux sont réalisés de façon systématique dès lors qu'un doute se fait jour sur l'âge ou l'identité réelle de jeunes étrangers. Les étrangers mineurs qui arrivent sur le territoire national ne sont en effet pas expulsables et bénéficient d'une prise en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance (ASE). La mise au jour de leur majorité supposée permet de soustraire ces jeunes aux prestations sociales qu'ils recevaient au titre de la protection de l'enfance.

Pétition

Le 17 janvier dernier, RESF a lancé une pétition nationale (ici) afin d'interdire le recours à ces tests osseux. L'association de défense des étrangers mineurs rappelle que le conseil général du Rhône a, depuis 2012, poursuivie près de huit jeunes devant les tribunaux pour faux, usage de faux, usurpation d'identité ou fraude aux prestations sociales. Dans ce dernier cas, les juges ont pu ordonner le remboursement des prestations perçues. Parfois s'y ajoute la double peine d'une reconduite à la frontière.

Depuis le début de l'année, la Métropole de Lyon a transmis au moins deux dossiers de minorité contestée par les tests osseux au procureur de la République. Le problème c'est que ces tests ne valent pas grand chose.

Une circulaire de mai 2013 du ministère de la justice encadre strictement la mise en place de ces tests qui ne doivent être réalisés que si un doute persiste qu'après avoir établi la minorité de l'intéressé par un "faisceau d'indices": entretiens avec le jeune, vérifications des documents d'état civil. Ce n'est que si un doute persiste que les tests osseux doivent être réalisés alors même que leur scientificité est contestée.

Déficience

De ce point de vue, la justice lyonnaise a pris en considération dans plusieurs arrêts la déficience ces analyses osseuses. Ainsi, la cour d'appel de Lyon, dans un jugement rendu le 26 mars 2013, rappelle fermement que "les tests d'âge osseux, compte tenu de leur fiabilité déficiente, eu égard à d'importantes marges d'erreur, ne permettent pas de servir à eux seuls de fondement à la détermination de l'âge d'un mineur isolé étranger".

Le test consiste en une radio de la main et du poignet. L'examen se borne à constater la présence ou non de cartilage de croissance. Plus le cartilage a disparu, plus le jeune atteindrait l'âge de la majorité. Les radios sont comparés à un atlas de référence réalisé en 1950 sur de jeunes américains blancs...

Logique comptable

Dans un avis publié le 26 juin 2014, la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) a contesté l'examen osseux, précisant les logiques comptables qui sous-tendent l'utilisation de ces tests osseux : "en pratique, par le biais de l'utilisation abusive de cette méthode, (l'évaluation de l'âge permet) de réguler l'accueil des mineurs isolés étrangers en fonction du nombre de places libres dans les services dépendant de l'aide sociale à l'enfance ou de la politique menée en la matière par le président du conseil général".

"Dès lors que nous avons un doute sur l'âge d'un mineur, nous pratiquons ces tests osseux qui peuvent être complétés par un examen dentaire. Dès qu'il y a fraude, nous saisissons le procureur de la république", nous explique-t-on du côté de la métropole de Lyon.

La création de cette nouvelle collectivité, qui prend en charge sur son territoire les compétences du département, aurait pu être l'occasion précisément d'une remise en question des pratiques du conseil général. Occasion manquée.

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