Plébiscités dès les années 1930 par Le Corbusier, les toits-terrasses connaissent un regain d’intérêt. Le toit est désormais appréhendé comme une surface répondant aux enjeux et problématiques des villes, dans un contexte de forte densification. Si toutes les métropoles européennes s’y sont mises, Lyon est à la traîne.
Ils nous promettent la lune ou presque : un panorama sur l’hôtel de ville, les hauts de la Croix-Rousse, le dôme signé Jean Nouvel de l’opéra, la tour Incity et la colline de Fourvière – selon l’angle où l’on se trouve –, le tout en plein air, au sommet d’un immeuble de la Presqu’île, à vingt-deux mètres de haut. “On verra par-dessus les toits, la terrasse étant surhaussée de deux mètres par rapport aux autres immeubles”, souligne l’architecte Rémi Blézat, associé du groupe du même nom, qui a porté le projet Maison Nô. Si vous n’en avez pas encore entendu parler, ça ne devrait pas tarder, tant la ville bruit d’échos enthousiastes. Les gérants reçoivent d’ores et déjà une dizaine de réservations par jour alors que leur rooftop n’ouvrira qu’à la mi-juillet. Pour avoir fait un tour du propriétaire, il y a en effet de très fortes chances pour qu’il devienne le “haut spot” de Lyon. Si le projet de boutique-hôtel haut de gamme de six niveaux est séduisant – notamment les escaliers revus par des graffeurs lyonnais cotés, qui en ont fait un petit musée d’art contemporain caché –, c’est surtout son dernier étage en terrasse – 200 m2 de bar et restaurant – qui donne à l’ancien siège du CIC, rue du Bât-d’Argent, un caractère véritablement exclusif.En pente douce
Exclusif, car la Maison Nô est le premier toit-terrasse toléré en Presqu’île, qui plus est dans un secteur de la ville classé patrimoine historique par l’Unesco. À l’origine, l’immeuble haussmannien de 1881 possédait une verrière laissant la lumière naturelle traverser l’atrium, un élément assez fréquent des immeubles bourgeois de cette époque. Selon Cécile Rémond, l’architecte du patrimoine chargée du dossier, les architectes des Bâtiments de France (ABF) ont “exceptionnellement” donné leur accord pour supprimer “un ensemble de toitures inesthétiques”. Après quoi, les ABF ont reçu une avalanche de demandes de toits-terrasses. Michel Le Faou, le vice-président métropolitain à l’urbanisme, est clair : “C’est certainement l’une des premières mais aussi l’une des dernières autorisations de toit-terrasse en Presqu’île. Il faut en effet tenir compte de l’histoire pour ne pas dénaturer le patrimoine qui nous a été légué. On ne peut pas faire n’importe quoi.” Pendant plus de seize siècles, les toits en pente de Lyon ont en effet été couverts de tuiles de terre cuite puis, vers la fin du xixe siècle, ces dernières ont été remplacées par des tuiles mécaniques plates, notamment sur la rive gauche, côté Rhône. “Il est primordial aujourd’hui de conserver la cohérence des toitures afin de préserver nos paysages”, explique la Drac. En d’autres termes, on ne démontera pas les toits des immeubles lyonnais pour créer des rooftops. En fait, la question se pose sur les constructions neuves. La métropole de Lyon semble s’y intéresser. Il y a un peu moins d’un an, une étude a ainsi été commandée à l’agence d’urbanisme de la ville (dont le rôle est de fournir une assistance à maîtrise d’ouvrage aux collectivités).Il vous reste 81 % de l'article à lire.
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