Union historique pour l’Église protestante de France, à Lyon

ENTRETIEN - C'est un événement majeur qui se tiendra à Lyon ce samedi 11 mai, avec la réunion des réformés et des luthériens au sein de l'Eglise protestante unie de France. Le pasteur Laurent Schlumberger, président du Conseil national de l'Eglise protestante unie de France, répond à Lyon Capitale, sur le poids historique de cette union.

Lyon Capitale : En quoi cette union des réformés et des luthériens est-elle historique ?

Laurent Schlumberger : Il y a un an et demi, deux ans de cela, ce sont les observateurs, des journalistes, des spécialistes, qui ont pour la première fois parlé d'un événement historique au sujet de cette union des luthériens et des réformés au sein de l’Église protestante unie de France. Nous étions la tête dans le guidon, nous travaillions sur cet événement depuis plusieurs années, alors peut-être est-ce pour cela que nous n'en avions pas pris immédiatement conscience de tout son poids. Mais il s'agit effectivement d'un événement historique. C'est la première fois qu'un mouvement d'unité du protestantisme ne provoque pas de divisions sur les bords. Aujourd'hui, toutes les paroisses avancent ensemble dans cette même démarche d'union.

Qu'est ce qui motive l'avènement de cette Église unie ?

Pendant 5 siècles, le protestantisme français a fonctionné comme un petit troupeau où l'on se retrouve entre-soi où l'on se serre les coudes. Maintenant nous nous ouvrons plus vers l'extérieur. Nous glissons vers un deuxième modèle plus tourné vers les autres. C'est un nouvel élan pour une Église de témoins.

S'agit-il d'une démarche ancienne ?

Déjà en 1910 le mouvement œcuménique donnait la priorité au partage de l'Evangile, sur l'étiquette confessionnelle. En 1973 la concorde de Leuenberg disait en somme "si l'on est d'accord sur l'essentiel, alors vivent les différences". C'est le modèle de la division réconciliée. Mais c'est en 2007 que nous avons pris la décision d'amorcer cette union des luthériens et réformés au sein d'une Église protestante unie. Cela fait donc six ans que nous travaillons à mieux nous connaître et à mieux marier nos styles.

Quelles sont justement les différences entre luthériens et réformés ?

Les différences sont plutôt des divergences de style que de fond réellement. Pour marquer un peu le trait, on pourrait dire que les luthériens ont dans leur organisation, une dimension un peu plus épiscopale tandis que les réformés fonctionnent avec des assemblées élues. Ces différences nous les conjuguons aujourd'hui dans un esprit d'hospitalité, pour s'accueillir les uns les autres.

Peut-on parler de la création d'une nouvelle Église aujourd'hui ?

Non, ce n'est pas une création puisque nous ne partons pas de rien. Mais c'est en revanche une belle métamorphose que nous opérons. Alors que les mouvements identitaires s'affirment de plus en plus dans les religions, cette transformation est donc une démarche à contre-courant.

Vous créez l’Église protestante unie de France. Est-ce que d'autres Églises protestantes dans le monde ont suivi le même chemin de l'union ; et pourquoi ne pas se rapprocher d'elles pour envisager une Église unie à l'échelle internationale ?

L'Allemagne, les Pays-Bas, le Canada et d'autres pays encore ont déjà créé des Églises unies. Mais il est vrai que chez les protestants, la dimension nationale est assez importante, majoritairement pour des raisons historiques. Alors on peut plus facilement envisager des coopérations avec les Églises des autres pays que réellement une structure internationale. En même temps, il y a pourtant quelque part une recherche dans ce sens avec la tenue il y a un an d'un synode européen.

Vous évoquiez tout à l'heure le fait de se tourner vers l'extérieur. Ces mots rappellent un peu ceux du pape François qui avait appelé à aller vers la périphérie de l’Eglise. Quel regard porte l’Église catholique sur la création de l’Église protestante unie de France ?

Un regard très positif et bienveillant, notamment à Lyon par monseigneur Barbarin qui prononcera un discours très fort à l'occasion du service inaugural samedi. Nous ressentons beaucoup de proximité de la part de l’Église catholique qui voit dans cette union peut-être une forme d'interpellation. Un vœu à s'ouvrir. Un message d'autant mieux perçu par une partie de l'Eglise catholique symbolisée par ce nouveau pape François.

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