Les examens d'imagerie sont des outils diagnostics indispensables, et de première ligne, dans la prise en charge des patients accueillis dans les services d'urgence. La société lyonnaise Imadis Groupe est leader en France.
Interpréter à distance, particulièrement la nuit et les week-end, des examens de scanner et d’IRM dans les services d'accueil des urgences qui exigent une efficacité diagnostique immédiate. C'est, aujourd'hui, l'enjeu de l'imagerie des urgences. Face à l'augmentation des demandes d'imagerie (+ 320 % ces huit dernières années) et la pénurie de radiologues (9 000 radiologues en France, soit 14 pour 100 000 habitants; selon la DREES*, il faudra encore attendre une dizaine d’années pour peut-être observer une embellie), les défis en imagerie dans les services d'urgence sont immenses.
*direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques est une direction de l'administration publique centrale française produisant des travaux de statistiques et d'études socio-économiques.
Les deux sociétés lyonnaises Imadis, spécialisée dans la téléradiologie et DeepLink Medical, spécialiste de la gestion de la sécurisation des données médicales, viennent de fusionner pour devenir Imadis Groupe. "Au travers de ce partenariat, environ un tiers des établissements publics français, avec service d’urgence et imagerie lourde qui bénéficient aujourd'hui d’une interprétation 24/24 et 7/7 en moins de 30 minutes." explique Vivien Thomson, son président.
Une levée de fonds, en interne auprès de 200 radiologues, a permis de réunir dix millions d'euros. "L'enjeu était d'être plus solide, de pouvoir se projeter sur l'avenir, d'avoir des projets de croissance et d'innovation."
Actuellement sur une croissance de 30% avec un chiffre d'affaires autour de 43 millions d'euros estimé en 2024, l'objectif, est un doublement de taille à cinq ans, du chiffre d'affaires et du nombre de radiologues (actuellement 600).
La restranscription intégrale de l'entretien avec Vivien Thomson
Bonjour à tous bienvenue dans ce nouveau rendez-vous de 6 minutes chrono. Nous accueillons aujourd'hui Vivien Thomson, radiologue et président d'Imadis Groupe, à la confluence. Alors Imadis Groupe, pour faire un petit historique rapide, c'est la fusion de deux sociétés lyonnaise, d'un côté Imadis spécialisé dans la téléradiologie et, de l'autre côté, DeepLink Medical spécialiste de la gestion de la sécurisation des données médicales. C'est donc un rapprochement stratégique qui vise à créer une structure, un peu hybride maîtrisant à la fois la compétence médicale et technologique. Vous dites que l'objectif c'est de redéfinir la téléradiologie en France. Aujourd'hui quelle est la situation de la téléradiologie en France justement ?
Alors, depuis 15 ans, la téléradiologie tient une place importante au sein de la radiologie française avec beaucoup de patients qui sont gérés à distance. Ça permet une optimisation des moyens humains, ça permet à des radiologues libéraux d'intervenir pour le compte d'hôpitaux publics, ça permet à des hôpitaux publics de s'organiser sur un territoire. Donc, il y a beaucoup d'enjeux et beaucoup d'usages.
Quand Imadis a été créée il y a 15 ans, le contexte était celui d'une pénurie de médecins et de radiologues. Aujourd'hui, en 2024, est ce qu'il y a toujours une pénurie de radiologues ? Les derniers chiffres que j'avais en France c'était 9 000 radiologues en France. Donc ça fait à peu près un ratio de 14 pour 100 000 habitants.
Alors, effectivement, il y a 15 ans, on avait une situation de pénurie parce qu'il y a une pyramide des âges qui est très défavorable. Ça reste vrai aujourd'hui avec beaucoup d'installations de nouvelles machines, qui créent des besoins et une pyramide des âges qui reste défavorable. Et avec un enjeu, en ce qui nous concerne à Imadis, notamment c'est la gestion du 24h/24. Il s'agit de définir comment on fait pour être capable, à l'échelle de la profession, d'avoir les mêmes moyens radiologiques, en journée et en pleine nuit, notamment dans la gestion des urgences.
J'imagine que la radiologie programmée et la radiologie urgence sont deux métiers différents.
Alors ce sont deux branches d'un même métier mais avec des spécificités très particulières. Sur la téléradiologie des urgences, on est effectivement sur un enjeu d'immédiateté et de 24h/24, qui est un petit peu différent des enjeux de l'activité programmée.
Et par exemple si vous nous donnez un exemple sur cette téléradiologie d'urgence ?
Alors, par exemple, si vous avez mal au ventre et qu'on suspecte une appendicite, que vous vous rendez aux urgences, il est important que vous puissiez être pris en charge de la même manière de 14h et à 2h du matin. Et donc là, l'enjeu c'est d'avoir un service d'urgence ouvert - il existe -, d'avoir des techniciens dans le service d'imagerie pour pouvoir faire un scanner qui va être l'examen pour le diagnostic. Ça ça existe. C'est compliqué, mais globalement ça existe. Et puis, d'avoir un radiologue qui sera capable de réaliser l'interprétation. Et l'enjeu d'Imadis, c'est de proposer en soutien aux équipes locales ,d'avoir, la nuit, des outils de transfert de sécurisation, d'optimisation, des données médicales. C'est le métier de DeepLink. Et d'avoir une équipe médicale présente 24h sur 24, notamment en pleine nuit, pour être capable d'assurer en direct l'interprétation radiologique le lien humain avec le médecin urgentiste et pour pouvoir prendre une décision pour la prise en charge de ce patient qui a mal au ventre.
Je vais rebondir sur un mot que vous avez employé c'est le lien humain. Dans certains centres de radiologie, le patient a l'impression d'être un numéro. Comment Imadis Groupe prend en compte cet aspect ?
Alors c'est un enjeu très complexe, parce qu'il y a énormément de patients à prendre en charge. Et donc, si on reprend l'exemple des urgences, il est important d'avoir un radiologue qui, dans une partie de sa vie professionnelle, ne fait pas que de la téléradiologie, mais soit au contact des patients, des manipulateurs, des réunions médicales pluridisciplinaires. Donc, les radiologues, chez nous, ne font pas que de la téléradiologie et conservent une vision tout à fait exacte de ce qu'est la vie dans un hôpital. Et puis, en direct, on est en interaction permanente avec les médecins des urgences qui, eux-mêmes, sont au lit du patient. Donc le lien il est très direct.
Cette fusion de Imadis et de DeepLink Medical s'est adosée à une levée de fonds de 10 millions d'euros. Au-delà du chiffre, pas anodin, cette levée de fonds l' aété en interne. C'est-à-dire que c'est 10 millions d'euros avec des radiologues internes à Imadis ?
Exactement. Alors, c'était un enjeu d'être solide, de pouvoir se projeter sur l'avenir, d'avoir des projets de croissance, d'avoir des projets d'innovation et, en même temps, conserver notre indépendance. Donc, on s'est tourné vers les radiologues qui exercent au sein d'Imadis, en leur proposant d'investir, ou de réinvestir pour certains, dans leur outil de travail. Et, donc, c'est ça qui a été réalisé l'été dernier, avec près de 200 radiologues qui ont investi massivement dans leur outil de travail, avec une confiance forte dans le projet et une envie de le porter, que ce projet reste dans une certaine mesure indépendant pour pouvoir avoir des décisions portées par le poids médical de la stratégie.
Quels sont les objectifs en termes de chiffre d'affaires et de développement de l'Imadis Group aujourd'hui ?
Alors sur les investissements, on a deux axes. Sur le plan médical, on travaille dans des centres de garde dans des centres Imadis où les radiologues viennent intervenir. On n'est pas sur le travail à domicile, donc il y a un enjeu financier pour installer ces centres. On en a une douzaine aujourd'hui, dans toute la France, dans les grandes métropoles. Le douzième est en cours d'installation, et l'objectif c'est d'en installer deux ou trois sur l'année 2025. Donc un enjeu d'investissement. Et puis on a 40 développeurs pour développer des outils de sécurisation d'image, de transfert mais aussi pour intégrer des outils d'intelligence artificielle de plus en plus dans nos process. Et donc, là, il y a un vrai enjeu de développement, un enjeu d'innovation. Donc c'est les deux grands axes sur lesquels cette levée de fonds va nous permettre de continuer à avancer. Aujourd'hui, on est sur 30% de croissance. On avait un chiffre d'affaires cumulé sur l'année 2023 à 33 millions. On va être aux alentours de 43 millions sur 2024. Et l'objectif, c'est un doublement du chiffre d'affaires à cinq ans. C'est la dynamique qu'on souhaite conserver.