Vélo à Lyon : les limites de l'urbanisme tactique

La métropole de Lyon vient d'annoncer la suppression de deux voies cyclables temporaires, deux améliorations et la finalisation de celle rue Édouard Herriot. Si le rééquilibrage de l'espace public ne se fera pas en un jour, l'urbanisme tactique a les défauts de ses qualités.

À travers le monde entier, les grandes métropoles ont lancé des opérations d'urbanisme tactique pour rééquilibrer l'espace public et donner plus d'espace aux piétons et cyclistes. Deux éléments étaient au cœur des enjeux : permettre la distanciation entre les individus dans le contexte de l'épidémie de COVID-19 et encourager la mobilité douce à vélo en alternative à la voiture face à la crainte de prendre des transports en commun.

La métropole de Lyon s'était inscrite dans ce mouvement annonçant plus de 70 kilomètres d'aménagements transitoires. Deux mois plus tard, après le début de la tendance, de nombreuses collectivités ont parfois renoncé à ces pistes à plus ou moins grandes échelles.

Des suppressions et des améliorations

À Lyon, la métropole vient d'annoncer des suppressions et adaptations. Deux itinéraires sont suspendus, car ils génèrent "trop de congestion" pour les automobilistes : pont de la Guillotière et Avenue de Saxe dans le sens Sud / Nord. A contrario, les aménagements de la rue Duquesne et quai Charles de Gaulle seront améliorés. Le premier débutera à partir de Foch et non plus quai de Serbie. Pour le second, une modification de la régulation des feux sera mise en place.

Enfin, le symbole Herriot est bientôt terminé, les bacs ont été enlevés depuis plusieurs semaines et les travaux seront livrés le 26 juin avec pose de balisettes, marquage et axe vélo de 3 mètres de large dans le sens Bellecour vers Terreaux. Pour la descente nord / sud, la signalétique sera renforcée sur l'axe parallèle : rue Paul Chenavard, rue de Brest, rue Gasparin. Le reste des projets, qui devraient dépasser les 80 kilomètres, n'est pas remis en question, pour l'instant.

Les défauts de ses qualités

L'urbanisme tactique a l'immense avantage de faire gagner du temps dans le déploiement de pistes cyclables. Ce qui aurait dû arriver en plusieurs mois a pu être mis en place en quelques semaines.

Mais cette vitesse d'exécutions se heurte à plusieurs limites : absence de plots ou d'éléments en béton pour renforcer la séparation avec les véhicules (le secteur fait toujours face à une rupture de stock majeure), impossibilité de faire de la pédagogie auprès des automobilistes qui pensent voir des pistes "vides", alors qu'il s'agit en réalité de piste "fluides", nécessité de revoir les plans de circulation pour décourager des transits intérieurs via des schémas de type "plan superblocks" comme c'est le cas à Barcelone (les voiries traversantes ne proposent plus de continuité). De même, le concept se heurte à une absence de volonté politique forte de la ville de Lyon pour verbaliser via la police municipale les automobilistes garées sur les pistes temporaires et classiques ou éviter la congestion qui se forme à cause de conducteurs qui changent de voies ou ne respectent pas les aménagements et ralentissent le trafic quand ils reviennent sur la route principale qui leur est dédiée...

Sur ces derniers points, une nouvelle tendance majeure a émergé à travers le monde entier : l'urbanisme tactique ne sert à rien si les villes ne choisissent pas d'impulser une forte politique de verbalisation pour faire respecter aménagements, mais aussi trottoirs (via des agents de la police municipale ou vidéo verbalisation).

Vers la nécessité d'aménagement qui s'inscrivent dans la durée

Si la grande majorité des aménagements transitoires devaient être maintenus. La question de leur pérennité se pose aujourd'hui. La peinture jaune n'a jamais fait une piste cyclable qui s'inscrit dans le temps. Pour le pont de la Guillotière, une structure plus lourde est à l'étude, pour bien séparer trafic et cyclistes de part et d'autre.

Avec l'impressionnante augmentation du trafic vélo à Lyon depuis le début du confinement, l'importance de structures pérennes se fait plus forte. La vigilance aussi du côté des usagers vélo pour éviter un scénario comme celui du pont de la Mulatière. Sous-dimensionné et inadapté aux usages à double sens sur le secteur, cet agrandissement dans sa version finale n'avait déclenché aucune réaction politique à l'époque, validé par l'ensemble des groupes qui se présentent devant les électeurs le 28 juin.

 

 

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