centre éducatif fermé rhône
@ Adrienne Sigel

Visite du premier centre éducatif fermé du Rhône

REPORTAGE - Le premier centre éducatif fermé du Rhône (41e français) destiné à accueillir douze mineurs délinquants multi-récidivistes a ouvert ses portes exceptionnellement, vendredi 17 février, à l'occasion de la visite de Michel Mercier, garde des Sceaux et président du Conseil général du Rhône. Une école de la dernière chance pour ces jeunes. Visite.

@ Adrienne Sigel

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Vaste, neuf, en pleine campagne, le Centre Educatif fermé de Saint-Jean-la-Bussière (nord du Rhône) n’a pas l’aspect d’un lieu de détention et ressemble davantage à un foyer d’accueil. Pas de murs d’enceinte ni de caméras de surveillance. La volonté d’isolement est pourtant bien là, elle vise à préserver les jeunes de toute tentative de récidive. "Une très belle situation géographique", estime tout de suite Michel Mercier, maire de Thizy de 1977 à 2001 à 4,7 km, là où il a commencé sa carrière politique.

Implantée non-loin du cœur du village - "qui n’a constaté aucun fait de délinquance depuis l’arrivée du centre" - la grande bâtisse de pierres jaunes, à laquelle sont greffés quelques bâtiments annexes, se fond dans le paysage. Six chambres, des salles de classe, une salle de sport équipée, des salles de travaux techniques, plusieurs lieux de vie, ainsi qu’un parc avec étang, constituent l’environnement des dix mineurs de 15 à 18 ans actuellement accueillis.

Six mois pour un nouveau départ

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Le projet pédagogique se veut intense et structuré. Divers ateliers techniques (jardinerie, plâtrerie, ébénisterie et cuisine) viennent rythmer les journées, auxquels s’ajoutent des activités culturelles et sportives ainsi que des suivis de projets personnalisés. "Dans un premier temps, on leur donne un rythme de travail, on les prépare à ressortir. Dans un second temps, on s’occupe de leur intégration professionnelle. L’objectif est de les réintégrer dans le droit commun", explique un éducateur. Ils sont seize, comme lui, à recadrer ces jeunes, à leur transmettre techniques et savoir-faire, à les écouter et à les mettre en confiance toute la journée. "On joue forcément un rôle de psychologue", confie Paolo Da Silva, éducateur à l’atelier plâtrerie. Il poursuit : "on leur donne des conseils, on est un peu leur famille par procuration. Mais on tient un écart, c’est très important. Ils nous vouvoient, et nous aussi. En cas de débordements, les éducateurs sportifs sont là pour les maitriser, si besoin".

65% des mineurs ne récidivent pas

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"Depuis que je suis ici, je me sens beaucoup mieux, j’ai l’impression que je grandis", affirme ce jeune de 15 ans placé sous contrôle judiciaire au centre, occupé à vernir un cheval à bascule. Dans la salle de sport aux poutres apparentes, des appareils de musculation, des tapis de sol, une table de ping-pong. Surveillé par le Garde des Sceaux, un autre jeune court sur un tapis électrique. "Je vais jusqu’à dix minutes ?", lance-t-il, impassible, à son éducateur.

Pour Kamal Labiod, directeur du centre, la réussite repose surtout sur la relation de confiance qui se tisse entre les jeunes et les éducateurs. "On a beaucoup travaillé sur la procédure d’accueil, afin qu’elle soit la plus sécurisante possible. Les mineurs ne ressentent pas cet enfermement comme de l’incarcération, mais comme une structure avec des limites établies. C’est la fiabilité de l’accompagnement adulte qui est importante. On mène à terme tout ce qu’on a annoncé à chaque mineur, et c’est là que l’on créé le lien de confiance".

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La condition d’enfermement est souvent interrompue puisque certaines activités sportives et les consultations médicales se déroulent à l’extérieur. "On est sur une contenance psychique", poursuit le directeur. "Le lieu, l’accompagnement social mis en œuvre, sont vraiment en lien avec une fermeture, matérialisée par des barrières, mais qui ne font qu’impacter le psychologique car rien ne peut empêcher un mineur de se sauver". Selon lui, 65% des jeunes sortis du CEF ne récidiveraient pas.

Fin de la visite. Michel Mercier, flanqué d’un cortège d’officiels, se prête au jeu du point presse devant les journalistes : "les CEF, dit-il, sont une chance pour ces jeunes, ils leur offrent des méthodes qui sont adaptées à leur réinsertion. Les centres sont maintenant inscrits dans le paysage judiciaire des mineurs et leurs résultats sont très encourageants", estime le Garde des Sceaux et Président du Conseil général. Il insiste, à plusieurs reprises, sur la nécessité de mettre en place un "Code pénal des mineurs", qui se substituerait à l’Ordonnance du 2 février 1945, relative à l’enfance délinquante. "Le droit pénal des mineurs doit être remis en question. En ce sens, nous aurons forcément à revenir sur l’Ordonnance de 1945. Il faut une justice adaptée aux mineurs d’aujourd’hui, il faut un Code pénal des mineurs", conclut-il avant de remonter dans sa berline et de repartir aussi vite qu’il est arrivé.

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