Yémen : des armes fabriquées à Lyon utilisées contre des civils

Un rapport classé “confidentiel Défense” que s'est procurée la cellule investigation de Radio France, en partenariat avec Disclose, assure que des armes françaises sont bien utilisées contre des civils dans le conflit au Yémen. Une révélation qui contredit le discours du gouvernement, et confirme les informations publiées par Lyon Capitale en mai 2018.

Selon un article publié ce lundi par la cellule investigation de Radio France en partenariat avec Disclose, des “armes françaises vendues à l’Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis, sont bien utilisées dans la guerre que mènent les deux pays au Yémen, contre les rebelles houthis, une minorité chiite soutenue par l’Iran.” L'enquête s'appuie sur un rapport de 15 pages classé “confidentiel Défense” de la Direction du renseignement militaire (DRM), daté du 25 septembre 2018. Celui-ci confirme les informations publiées en mai 2018 par Lyon Capitale sur l'utilisation d'armes fabriquées dans la région Auvergne-Rhône-Alpes dans le conflit yéménite. Il y a un an déjà, le Gouvernement français continuait d’honorer ses commandes à la coalition menée par l’Arabie saoudite, et d’attribuer des centaines de licences d’exportation d’armes sur la zone. Parmi les groupes en bénéficiant, on trouvait Nexter et Renault Trucks Defense, qui disposent de sites de production ou de recherche et développement respectivement à Roanne et à Lyon. De 2012 à 2017, le groupe Nexter a notamment fournit à l'Arabie saoudite 234 blindés Aravis, 1 000 missiles guidés Bonus-2 et 32 canons Caesar, tous fabriqués ou assemblés sur son site de Roanne. Quant à Renault Trucks Defense, le groupe a vendu à l’Arabie saoudite 71 blindés de type Bastion.

Les dispositifs Caesar, canons de huit mètres de long positionnés sur des camions blindés, peuvent tirer jusqu’à huit obus par minute avec une portée de plus de 40 kilomètres. Ils peuvent être chargés avec les missiles Bonus-2, commandés par le régime, capables de percer le blindage de véhicules lourds. Selon France Inter et Disclose, 48 de ces canons sont déployés le long de la frontière yéménite. Le rapport qu'ils ont obtenu indique “qu’ils appuient les troupes loyalistes, épaulées par les forces armées saoudiennes, dans leur progression en territoire yéménite”.

Des informations qui contredisent la version les affirmations de Florence Parly, la ministre des Armées le 20 janvier dernier sur France Inter. “Je n’ai pas connaissance du fait que des armes [françaises] soient utilisées directement au Yémen”, affirmait la ministre. Selon Disclose et France Inter, le document confidentiel défense qu'ils ont obtenu, intitulé “Yémen - Situation sécuritaire”, “a été transmis au chef de l’État, Emmanuel Macron, à Matignon, mais aussi à la ministre des Armées, Florence Parly, et au ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, lors du conseil de défense restreint consacré à la guerre au Yémen, qui s’est tenu le 3 octobre 2018, à l’Élysée”. Un document qui contredirait la version des autorités françaises qui avançaient jusqu'ici “une utilisation uniquement “défensive” de l’armement français au Yémen”. Depuis le début du conflit, 8 300 civils ont été tués, dont 1 283 enfants.

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