En provenance de la ville, ils se sont installés en Ardèche ou dans la Drôme où ils ont repris les fermes abandonnées. Objectif : créer les embryons d'une nouvelle société.
Trois questions à Anne Béraud-Butcher, réalisatrice du documentaire "Au pays du Baba", qui sera rediffusée fin août sur France 3, dans l'émission la Case de l'oncle Doc.
En 1970, elle est étudiante en fac de lettres à Grenoble pour "ne rien foutre et fumer des pétards". Ses copains les plus gauchistes sont partis s'installer à la campagne. Elle ne les a pas suivis : "je les ai surtout observés".
Lyon Capitale. Pourquoi vos copains s'installaient-ils en communauté, à la campagne ?
Anne Béraud-Butcher : Ils ne voulaient pas entrer dans la société de consommation. On vivait à Grenoble dans une ville bourrée d'ingénieurs, en plein boom économique. Ils ne voulaient pas vivre en achetant des voitures et des frigos. Ils refusaient cette vie de couple, qui était celle de nos parents, et revendiquaient le droit à la paresse : "on ne va pas passer notre vie à travailler comme des dingues pour servir la soupe au capitalisme". En partant à la campagne, ils pensaient qu'ils auraient une vie plus authentique. Les plus militants espéraient aussi que ces expériences communautaires allaient s'étendre pour construire la société de demain.
Qu'est-ce qui vous déplaisait dans cette expérience du retour à la terre ?
L'Ardèche du Nord, où s'étaient installés mes copains, était un pays très dur, avec de longs hivers et des gens qui en bavent, en font baver. Mais surtout, je n'ai pas aimé l'ambiance qu'il y avait entre eux. Ils étaient déjà très "exclusifs" : ce qui arrivait de la ville leur faisait peur. Même si je les connaissais, les gens se montraient très méfiants à mon égard.
Pourquoi, pour la plupart, ces expériences n'ont pas tenu ?
Tout d'abord, on n'a pas été éduqué pour vivre en tribu. L'affectif a aussi beaucoup joué. Les filles n'en pouvaient plus de voir que, ce qui intéressait surtout les garçons, c'était de coucher avec toutes les filles qui passaient à portée de main. Ça a explosé pour des questions de cul.