La commissaire de la 14e Biennale d’Art contemporain de Lyon est la directrice du centre Pompidou-Metz. Invitée par Thierry Raspail, dont c’est la dernière biennale, elle revendique son appartenance au circuit institutionnel public et cite volontiers Mallarmé et Umberto Eco pour la “modernité”. Verbatim.
La 14e Biennale d’Art contemporain de Lyon, qui ouvre ce mercredi 20 septembre, est le deuxième volet d’un triptyque consacré à “La modernité”. Thierry Raspail, son directeur artistique, a choisi pour celle-ci comme commissaire invitée Emma Lavigne, la directrice du centre Pompidou-Metz. “Il est important que le commissaire invité soit une femme et une Française”, estime-t-il.
Qui est Emma Lavigne, la commissaire de la Biennale ?
Emma Lavigne interroge la réalité de la “femme artiste” (exposition “Elles” à Beaubourg en 2009) et a beaucoup travaillé sur le corps dans la création, l’importance de l’“objet” d’art et la notion de chef-d’œuvre. Toutes notions “ouvertes” ! Modernité du retour ?
“Les “mondes flottants” de la Biennale sont traversés par le vent des soulèvements”
“Il faut revenir à une forme de modestie, dit-elle, se préserver de l’hypertrophie des budgets et de la spectacularisation des expos. Revenir aussi à l’émotion que doit procurer une œuvre d’art ainsi qu’à l’importance de l’esthétique, sans faire le choix d’œuvres décoratives. Il faut se réapproprier les œuvres, les “cannibaliser”. Le champ des arts est bien sûr social, économique, politique… Les œuvres sont des véhicules de la pensée et permettent la prise de conscience. À l’heure d’une mondialisation galopante générant une constante mobilité, l’accélération des flux et la “liquidité” du monde, il faut explorer la portée du concept de “moderne”. Empruntant son titre au mot japonais ukiyô, qui envisage le monde dans son impermanence et dans son processus de renouvellement, sources de liberté et de créativité, la Biennale place au cœur de ses enjeux les attitudes libertaires d’artistes qui ne cessent de repousser les limites de l’œuvre d’art afin de l’ouvrir encore davantage sur le monde. À l’image de l’immense voile blanche Wide White Flow de Hans Haacke ou des cerfs-volants de When Sky was Sea de Shimabuku, les “mondes flottants” de la Biennale de Lyon sont traversés par le vent des soulèvements, des fulgurances poétiques et déflagrations esthétiques contemporaines.”
“L’actualité ne peut renier son histoire” (Thierry Raspail)
Créateur du MAC et de la Biennale, entre autres, Thierry Raspail est le directeur artistique de la Biennale de Lyon (et de France) pour la dernière fois puisqu’il prendra sa retraite en avril 2018. Quand il se retourne sur les précédentes, il observe que “les Biennales de Lyon ont évolué, dans le sens où elles sont moins une expansion du musée, de moins en moins historiques et montrent l’appropriation de l’art par toutes les cultures”. Pour expliquer le choix de “La modernité” comme thème du triptyque dont la Biennale 2017 est le deuxième volet, il dit ceci : “Dans les années 1940-1950 le “contemporain” s’affirme avec l’arrivée du pop, du rock, la fin des “avant-gardes” et du diktat de “la nouveauté”. J’ai choisi de faire du “moderne” le fil rouge d’une trilogie, après le global, l’histoire et la transmission. L’actualité ne peut renier son histoire. Sont engagés les questionnements sur les enjeux tels que l’universalité, la raison, l’esthétique, l’identité, les influences… On le voit avec les œuvres présentées dans les trois lieux officiels, mais aussi avec les Archipels et les aires Veduta, qui sont des plateformes multimodales consacrées à l’esthétique de la réception et au partage. Résonance permet de s’étendre dans la région avec des expériences inattendues.”
Pour un aperçu des thèmes et des artistes de cette Biennale, lire : Une Biennale 2017 entre expérience et expérimentations