Didier Van Cauwelaert nous donne les clés de l’impossible

ENTRETIEN – Dans le Dictionnaire de l'impossible, son dernier livre paru chez Plon, Didier Van Cauwelaert nous parle de phénomènes irrationnels, mais dont il donne les clés avec un formidable enthousiasme.

La combustion spontanée, l’hostie qui lévite en direct sur France 2, le langage des abeilles, la mort imminente, les prédictions de Darwin, l’utilisation des médiums par les services secrets, les guérisons miraculeuses… Didier Van Cauwelaert nous emmène dans des univers que la majorité n’effleure qu’avec précaution, par peur de l’inconnu ou d’être moqué par ceux qui font de la logique un rempart.

Ainsi, en s’appuyant sur des faits précis, très documentés, et non sur son imagination comme à son habitude, l’écrivain prix Goncourt, grand prix du théâtre de l'Académie française, prix Science-Frontières de la vulgarisation scientifique, franchit les frontières du visible et de la raison ordinaire pour voyager aussi loin que ses sens, ses envies, ses convictions, la nécessité l’entraînent. L’homme ne fait rien du bout du cœur.

Son parcours montre qu’il se jette tout entier dans ce qu’il entreprend : ses romans, ses essais, ses pièces de théâtre, ses collaboration au cinéma et à la télévision… Une vie dense, intense, fondée sur une quête intérieure impérieuse qui le pousse, par empathie, à approfondir sans cesse sa connaissance du monde, des autres et de lui-même. Un cheminement qu’il nous convie à faire avec lui en nous incitant, au travers de ces expériences incroyables, à vivre et à penser le monde autrement !

Lyon Capitale : Vous dites que l’intelligence consiste à créer des liens entre les choses…

Didier Van Cauwelaert : Nous oublions trop souvent qu’il existe des liens qui nous unissent, nous raccordent, spontanément et en permanence, aux autres, à la nature, aux animaux… Reconnaître, discerner, analyser, apprendre à utiliser ces relations est une forme d’intelligence qui s’entretient et que nous pouvons développer si nous habituons notre cerveau à percevoir ces rapports entre les choses.
Les formidables avancées des neurosciences, dont je parle dans le livre, prouvent l’incroyable neuroplasticité du cerveau et montrent qu’avec un peu d’entraînement il accroît facilement le nombre de ses connexions, ce qui agit sur nos capacités. Ce constat, et savoir que tout est lié, permet de transformer profondément notre vision du monde et notre approche de la réalité. Nous pouvons étudier par exemple le comportement des animaux, des plantes, des arbres, pour découvrir des potentialités que nous possédons à l’état latent et que nous n’exploitons pas, faute d’en avoir l’utilité. L’observation de nos environnements peut également nous aider à comprendre comment lutter contre le stress, qui est très consommateur d’énergie.
La société actuelle, les outils qu’elle met à notre disposition tendent à nous rendre paresseux. Aussi, obligeons-nous à dépasser nos limites, nos peurs. Découvrons nos capacités cachées. Apprenons à mobiliser nos énergies. Pour nous et pour les autres. Nous ne sommes pas des individualités séparées. Nous appartenons à un tout. Se relier à ce tout rend plus altruiste et plus heureux. Ouvrons-nous à ce qui est. Prenons des risques pour soi et autrui, pour devenir plus libre, plus humain, moins centré sur nous-même. Demandons-nous sans cesse l’impossible, pour ne pas nous endormir, pour aller au bout de nous-mêmes… Pour vivre pleinement, tout simplement.

Quel est le sens de la vie pour vous ?

La vie sert à créer des liens. À comprendre que nous sommes connectés à ce qui nous entoure, au visible, à l’invisible. À développer l’empathie. À modifier la réalité grâce à l’imaginaire, l’idéal, la générosité, l’intelligence.
La force qui gouverne la vie est l’imagination. Nous devons profiter de ce passage sur terre pour nous en servir et faire en sorte que tout soit mieux, dans tous les domaines. Ce n’est pas facile, mais c’est possible. Il y a des hauts et des bas, mais le destin de l’homme est d’écrire le monde, de le rêver grand, et de le construire de manière belle et éthique. Aussi ne perdons pas de temps à nous révolter contre des choses inévitables telles que la mort. J’ai le privilège de ne jamais avoir eu peur de la mort. Peut-être – c’est une hypothèse – parce qu’ayant fait un arrêt du cœur à la naissance j’y ai été confronté très tôt.
Ce qui pourrait expliquer également mon aptitude à éprouver, depuis toujours, une empathie joyeuse et naturelle pour les êtres et les choses. Quoi qu’il en soit, nous sommes tous, chacun avec nos spécificités, au service de la vie. Nous avons un rôle à jouer dans le mouvement général de la création, y compris après la mort. Je pense qu’il y a autre chose après. Une forme de conscience qui dépendra de ce qui nous sera nécessaire et des besoins de l’univers, au moment où nous mourrons.

En introduction à votre dernier livre, trois phrases résument, semble-t-il, votre démarche. La première est de saint Augustin et parle de la nécessité de lutter contre l’ignorance…

La science évolue très vite. Méfions-nous des jugements hâtifs et de ne pas rejeter trop vite des phénomènes que nous ne comprenons pas encore. Notre méconnaissance des lois de la nature peut nous faire croire au miracle ou nous conduire à parler de paranormal pour des faits qui seront bientôt explicables. Le terme paranormal a été employé, la première fois, en 1902, c’est-à-dire hier, à l’Académie des sciences pour parler des atomes et des molécules. Avec le recul, cela semble incroyable. Aussi, soyons prudents ! Ce qui semble vrai aujourd’hui sera peut-être faux demain. Ne condamnons pas des réalités qui remettent en question nos concepts et nos croyances. Essayons plutôt de comprendre ce qu’elles disent du monde.

La deuxième est de Descartes, qui parle de la joie intérieure, de l’enthousiasme, de la faculté d’émerveillement, comme forces auxquelles nous devons nous ouvrir pour inviter les aspects heureux de l’existence dans notre vie…

Descartes, dont on a oublié l’intérêt pour le chamanisme et la formidable ouverture d’esprit… Descartes reconnaissait le pouvoir de l’esprit sur la matière, le hasard, les événements. Il a montré comment nos dispositions intérieures influencent les circonstances et le monde extérieur. Ce constat déterminant doit orienter notre manière de vivre. Sans nous condamner pour autant au bonheur éternel. Personne ne vit dans une extase perpétuelle. Mais, pour nous inciter à nous relier aux forces motrices qui sont associées à la joie, à l’amour pour autrui et à l’humour. L’humour est ma colonne vertébrale. Il m’aide à sortir des situations compliquées et douloureuses.

“Changer notre vision du monde, c’est changer le monde”

Enfin, la troisième est d’un médium de l’armée, Joe McMoneagle, qui dit en substance que douter fait partie de l’art de penser…

Le scepticisme, dès lors qu’il n’est ni gratuit ni aveuglant, permet de se remettre en question, et d’avancer avec lucidité et recul. Il m’a accompagné dans la rédaction de cet ouvrage, dans lequel je relate des faits étonnants. Ce que je ne pouvais faire qu’en étant rigoureux, exigeant et précis. Pour cela, j’ai travaillé avec des scientifiques, je me suis appuyé sur des expériences que j’ai faites avec des chercheurs renommés, sur les états modifiés de conscience et sur les pouvoirs de la pensée ; j’ai transmis les connaissances d’amis disparus, tels que Rémi Chauvin ; j’ai compulsé un très grand nombre de documents et rédigé des notes qui renvoient à des ouvrages ou à des articles que le lecteur peut consulter pour aiguiser son esprit critique… Ce travail m’a demandé un très grand investissement en temps et en énergie. Mais il était essentiel pour moi de partager les informations que j’ai eu le privilège de recevoir jusqu’à présent. Et de participer au réenchantement de la vie, en faisant évoluer la vision du monde de ceux qui me lisent…
Changer notre vision du monde, notre perception sur quelqu’un, c’est changer le monde. La réforme initiale que nous devons opérer, chacun à notre niveau, est là, pas ailleurs. Je le montre dans les chapitres dans lesquels je parle de la puissance fantastique de notre cerveau. C’est lui qui crée la réalité que nous percevons. Le savoir, et comprendre que l’univers nous aide dès que l’on s’efforce de devenir plus autonome, donne envie de prendre nos vies en main, et encourage à changer. C’est enrichissant et très stimulant.

Cette approche de la vie fait-elle de vous un homme heureux ?

L’empathie que j’éprouve spontanément pour les êtres et la vie en général est au départ de cette approche. Elle me pousse à être en harmonie, en accord avec les forces qui m’entourent, m’habitent, me dépassent, me transcendent ; à être en lien avec l’ensemble de l’existence, sans jugement d’exclusion, sans fanatisme… Le bonheur est un état de partage, fragile, menacé par l’extérieur et par la peur qu’on a de le perdre. Mieux vaut miser sur la joie, qui est une force motrice, un système immunitaire, pour changer le monde grâce à la puissance de notre imaginaire. Je m’y efforce. J’espère que ce livre et le prochain tome qui suivra aideront les lecteurs à faire de même.

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