Lyon : la Fête des Lumières aura lieu d’une manière ou d’une autre

Le 8 Décembre/Fête des lumières aura-t-il lieu à Lyon cette année ? Après les attentats qui ont touché Paris le 13 novembre, certaines voix s’élèvent demandant son annulation. Si cela arrivait, les Lyonnais pourraient bien faire la fête autrement.

Faut-il annuler la Fête des lumières après les attentats à Paris du 13 novembre ? À l'hôtel de ville comme à la préfecture, la question est aujourd'hui posée et la décision sera difficile, quelle qu'elle soit. Les Lyonnais devraient être fixés vendredi, voire en début de semaine prochaine.

"Si j'étais à la place du maire, je ne prendrais pas ce risque." Cocréateur de la première Fête des lumières, en 1999, Roger Monnami ne voit pas comment l'édition 2015 pourrait se tenir normalement. Lui aussi parmi les pionniers, l'ancien adjoint Henry Chabert est lucide : "Il ne faudra pas en vouloir à Gérard Collomb s'il décide de prendre cette décision. Cela serait regrettable, mais la situation l'impose."

Le problème des Terreaux

Au cœur des craintes, la place des Terreaux, où la situation est déjà complexe en temps normal : tout est fait pour y éviter les mouvements de foule dangereux. Henry Chabert connaît bien cette problématique : "[Les] Terreaux [sont] un lieu particulièrement critique. Les gens y sont massés et stationnent. Le public est très nombreux sur un espace avec peu d'entrées et de sorties."

Joseph Couturier, l'artiste qui a imaginé l'illumination Sans dessus dessous devant être donnée place des Terreaux lors de cette Fête des lumières, est comme beaucoup dans l'attente de la décision : "Ce n'est pas une chose facile à prendre, s'ils n’annulent pas et qu'ils se passent quelque chose, on va le leur reprocher. S'ils annulent, ils seront critiqués." Mais il reste déterminé : "Après, en tant qu'artiste, il ne faut rien lâcher. Victor Hugo disait : “Si l'on met un bâillon à la bouche qui parle, la parole se change en lumière, et l'on ne bâillonne pas la lumière. D'une manière ou d'une autre, il faut allumer la ville, mais ce n'est pas à nous de prendre cette responsabilité. On essaye de donner du rêve aux gens et je n'aimerais pas être à la place du maire."

Faire moins, faire autrement ?

L'équation est complexe et les enjeux énormes en matière d'économie et d'image. 3 à 4 millions de personnes se pressent dans les rues de Lyon chaque année pendant quatre jours.

Roger Monnami, conscient de tout ce que la fête implique, suggère une autre solution : "Si on annule, les terroristes gagnent, mais comment peut-on fouiller tous les gens de la Presqu'île ? Ce n'est pas possible. Il y a trop de passage. Pour qu'elle ait quand même lieu, je ferais une année réduite au minimum, la ville est déjà belle."

Henry Chabert plaide lui aussi pour une édition revue à la baisse : "Il ne faut pas tout annuler pour autant, il y a un certain nombre de choses qui peuvent rester. Cela sera une manifestation qui montre qu'on résiste, qu'on ne baisse pas les bras. On peut le faire sans mettre en péril la vie des gens."

De son côté, Joseph Couturier imagine ce que pourrait être cette fête différente des autres années : "Mon souhait, c'est que la ville soit allumée d'une manière ou d'une autre. On pourrait avoir des lumignons partout, éclairés en permanence pendant quatre jours. Il ne faut pas parler d'annulation. La lumière sera présente sous une forme, d'une manière ou d'une autre. Il faudra un message fort, ne rien lâcher. C'est aussi ça, la liberté."

La Fête des lumières malgré tout

En 1852, lors du premier 8 décembre historique, alors que la Fête des lumières était encore très loin, les autorités ecclésiastiques ont annulé les manifestations à cause du mauvais temps. Les Lyonnais souhaitant quand même marquer l’événement ont alors choisi spontanément de placer des lumignons à leurs fenêtres.

C'est sans doute ce qu'il se passera à Lyon cette année si la fête est annulée ou réduite. Henry Chabert est prêt à parier là-dessus : “Je pense de toute façon, quelle que soit la décision, je suis sûr que cet aspect de la Fête des lumières sera là. Je pense qu'il y aura des bougies aux fenêtres. Les Lyonnais ne sont pas des citoyens à se laisser impressionner.”

Le lumignon tient en lui de nombreuses valeurs pour Roger Monnami : "On redécouvre la solidarité quand la France est en péril. Les petits lumignons, c'est aussi se regarder, se dire bonjour, c'est un signe de ralliement."

Laissons le dernier mot à l'historien lyonnais Bruno Benoit, convaincu que les Lyonnais seront au rendez-vous : "C'est une fête locale sur fond de religion, largement récupérée par les laïques. Il y a une histoire, on ne peut la supprimer. Beaucoup d'entre nous sont en quête de spiritualité, de communion. S'il n'y a pas de 8 Décembre de la part de la mairie, il y aura un éclairage de la part des Lyonnais. Nous témoignerons par ce geste que nous maintenons cette fête et que nous n'avons pas peur."

19 novembre 12h25 : la décision de Gérard Collomb est désormais connue, lire ici.

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