Célestins salle © Tim
La salle rouge et or du théâtre des Célestins © Tim Douet

A Lyon, le théâtre fait sa rentrée avec Othello

Théâtre. Alors que la plupart des théâtres n’ont pas encore rouvert leurs portes, Les Célestins accueillent un Othello qui devrait lancer la saison de la plus belle des manières.

Cyril Gueï (à droite) joue Othello dans une mise en scène d'Aurore Fattier © Annah Schaeffer

Un Othello vénitien et free-jazz

Othello est un brave et puissant soldat, un Maure, vendu comme esclave puis racheté, respecté depuis qu’il a mis son épée au service de la République de Venise. Il se marie avec Desdémone, la fille unique, d’une grande beauté, d’un sénateur vénitien important. Manipulé par son ancien sous-lieutenant Iago, qui lui fait croire que Desdémone le trompe avec son lieutenant, Cassio, il tue son épouse, avant de se rendre compte qu’elle lui était fidèle...

Ainsi pourrait-on résumer l’immense tragédie shakespearienne, Othello, en une banale histoire de jalousie et de –fausse – tromperie conjugale. À l’origine, la pièce est d’ailleurs inspirée d’une nouvelle, écrite en 1565 par un obscur écrivain italien nommé Cinthio. Ce serait passer à côté des nombreux thèmes, des subtilités et des différentes problématiques, passionnantes, que suscite l’œuvre. À rebours de ce que compte faire Aurore Fattier dans sa mise en scène programmée aux Célestins, en ouverture de cette saison. Cette jeune metteuse en scène, née en 1980 à Haïti et de nationalité française, jusque-là plutôt investie dans les écritures contemporaines (elle a mis en scène La Possibilité d’une île de Michel Houellebecq), a en effet décidé de ne négliger aucun des grands thèmes qui font la force d’Othello. Tout d’abord, épaulée de son dramaturge, Sébastien Monfè, elle tient compte de son ancrage profond dans la Venise du XVIe siècle ; ses palais, ses jeux de pouvoir, sa fascinante beauté. Pas question d’éviter non plus, comme ont pu le faire d’autres metteurs en scène par le passé, la dimension raciale, sinon raciste, de la pièce. Shakespeare fut sans doute l’un des tout premiers écrivains, en tout cas de cette envergure, à aborder cette question. Il fait d’Othello son personnage principal, montre les réactions de jalousie et de rancœur que suscitent sa réussite et son mariage avec la magnifique Desdémone. Pour autant, la metteuse en scène n’entend pas céder à la caricature : “Et jusqu’au conflit raciste qui oppose Othello aux Vénitiens, je ne peux l’envisager seulement sous l’angle de la question xénophobe ou du discours social ou historique, c’est-à-dire du débat d’idées, entre méchants racistes aux noirs desseins, et braves métèques désireux de s’intégrer. Il y a autre chose, une sorte de fascination qui lie les personnages entre eux, qui tient à leur beauté et à leur damnation.” Pour éviter le simplisme, elle a confié ce rôle à un acteur noir au talent reconnu, Cyril Gueï. Et elle a travaillé à une nouvelle traduction et adaptation du texte avec un autre comédien noir, William Nadylam, qui maîtrise toutes les subtilités de la langue... de Shakespeare. In fine, ces choix, ces intentions dramaturgiques devraient donner à cet Othello une dimension esthétique forte, tout en rendant justice à sa richesse et sa profondeur. Et cela en étant accessible au plus grand nombre.

Othello. Du 21 au 28 septembre aux Célestins

 

 

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