Edredon sensible – A Vaulx Jazz 2019 © DR
photo d’illustration © DR

À Vaulx Jazz, impair et passe

Qui dit année impaire dit désormais À Vaulx Jazz, incontournable raout jazz – et plus car affinités – désormais calé sur un rythme biennal qui en renforce la valeur sans en raboter l’identité forte. À l’image d’une programmation riche en protéines musicales. Aperçu.

Ce n’est pas parce que À Vaulx Jazz est désormais biennal qu’il a perdu de son importance et de son aura au sein du paysage culturel de l’agglomération. Bien au contraire. Déjà, parce que le mode biennal est un classique, pour ne pas dire un incontournable, de l’agglomération lyonnaise. Ensuite, parce que cette périodicité, qui laisse, il faut bien le dire, les amateurs de jazz et aficionados du festival orphelins les années paires, a le mérite de susciter le désir et même de l’accroître. Enfin, parce que l’événement vaudois, toujours aussi soucieux d’universalisme et d’accès à la culture pour tous, reste sans doute malgré tout le deuxième événement régional de la discipline derrière le rouleau compresseur viennois estival, ce qui n’est pas rien.

Ouverture le 11 mars avec Kunta

L’événement ne change pas ses bonnes habitudes, puisqu’il est toujours précédé d’un before qui multiplie séquences hors les murs (c’est-à-dire hors du centre culturel Charlie-Chaplin, son cœur battant) et embardées interdisciplinaires. Le festivalier multiplie ainsi les sauts de puce entre le Pathé Carré-de-Soie et Les Amphis (pour le cinéma), l’esplanade Duclos, les bibliothèques Chassine et Perec, la Maison des fêtes et des familles ou le Planétarium. Un hors-les-murs dont l’ouverture, qui sera aussi celle du festival, ce lundi 11 mars, est confiée (à la MJC de Vaux-en-Velin) à Kunta, une formation puisant largement dans les racines de l’afro-beat et de l’éthio-jazz. Avant de se poursuivre en jam session ouverte encadrée par les professeurs du Conservatoire.

Prince de la stretch, soirées thématiques et sax

Christian Scott © Delphine Diallo
Christian Scott © Delphine Diallo

Parmi les autres événements à retenir : la projection de Born to be blue, biopic consacré à Chet Baker, suivie d’une carte blanche à un spécialiste du maître, Jean Méreu ; le concert jazz au coin du feu de Sofiane Saïdi & Mazalda ; l’installation de Valentin Durif suivie d’un voyage musical avec No Tongues (sans doute la soirée la plus perchée du festival) ; la sieste musicale – pas d’événement digne de ce nom sans une bonne sieste – du duo rêveur Katha Sary ; la prestation du prince de la stretch music Christian Scott à l’Épicerie Moderne ou les afters du Périscope.

Freaks © A. Jeanson / Eve Risser & Naïni Diabaté / Thomas de Pourquery & Co. / Raashan Ahmad (montage LC)
Freaks © A. Jeanson / Eve Risser & Naïni Diabaté / Thomas de Pourquery & Co. / Raashan Ahmad (montage LC)

Les soirées au centre culturel Charlie-Chaplin se déclineront comme à l’habitude en mode thématique : concert scolaire en compagnie du Very Big Experimental Toubifri Orchestra ; soirée XXL avec le même Toubifri et le Red Desert Orchestra d’Eve Risser et Naïny Diabaté ; événement transe avec le plus éthiopien des groupes lyonnais, Ukandanz, et les Freaks psyché du violoniste protée Théo Ceccaldi ; une autre estampillée Orange Sonic avec en vedette le Pantagruel du sax Thomas de Pourquery et ses Friends from Congo (dont le chorégraphe Delavalett Bidiefono et sa troupe) ou un soir pour se demander si le “hip-hop is the new jazz” (réponse dans la question) avec le hip-hop live de The Wolphonics et le gourmand Raashan Ahmad.

Louis Sclavis Quartet © Luc Jennepin / The Buttshakers / Chris Potter © Tamas Talaber / Obradovic-Tixier Duo / Delgrès © Rémy Solomon (montage LC)
Louis Sclavis Quartet © Luc Jennepin / The Buttshakers / Chris Potter © Tamas Talaber / Obradovic-Tixier Duo / Delgrès © Rémy Solomon (montage LC)

Qui dit À Vaulx Jazz dit aussi saxologie – avec un plateau riche comme Crésus agrémenté de l’Obradovic-Tixier Duo, du Louis Sclavis Quartet (pour un projet autour de l’artiste Ernest Pignon-Ernest) et de Chris Potter Circuits – et soirée blues : un voyage de Chicago à Lyon en passant par les Caraïbes (Ladell McLin Trio, Delgrès, The Buttshakers).

Roi cramoisi et fête des voisins

À chaque édition, À Vaulx Jazz, c’est aussi un projet hommage à un grand œuvre ou un artiste totémique (The Stooges, Sun Ra, précédemment). Cette année, le mythe du rock progressif que constitue le King Crimson de Robert Fripp – présent en chair et en os à Fourvière cet été. Un King Crimson Projekt confié aux bons soins des élèves musiciens des conservatoires de musique de Vaulx, Saint-Priest, Villeurbanne et Le Puy-en-Velay qui risque de constituer un voyage inoubliable à la cour du roi cramoisi.

Le tout s’achèvera en grande pompe avec en vedette d’illustres et chers voisins en les personnes du pianiste suisse Nik Bärtsch et de la fée belge Mélanie De Biasio. Comme toujours, c’est copieux, éclectique, aussi roboratif que le désormais célèbre concours de soupe (au sens propre, hein !) qui balise le festival et, tout compte fait, cela valait bien deux ans d’attente.


À Vaulx Jazz – Du 11 au 30 mars au centre culturel Charlie-Chaplin (Vaulx-en-Velin) – www.avaulxjazz.fr


[Article publié dans Lyon Capitale n° 786 – Mars 2019]

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