Jean Bellorini présente au TNP Les Messagères, une version d’Antigone conçue avec les neuf comédiennes afghanes qui y ont été accueillies.
Souvenez-vous, en mars dernier, nous avions pu voir, au théâtre de la Croix-Rousse, une mise en scène d’Antigone de Lucie Berelowitsch réalisée avec une troupe de comédiens et de musiciens ukrainiens.
Cette pièce doit avoir le don d’inspirer les artistes dont le pays affronte les pires difficultés puisqu’au mois de juin prochain, cette même œuvre sera jouée par neuf comédiennes afghanes dirigées par Jean Bellorini, le patron du TNP, appuyé par le metteur en scène de leur troupe (les Afghan Girls), Naim Karimi.
Citons-les toutes, elles le méritent : Hussnia Ahmadi, Freshta Akbari, Atifa Azizpor, Sediqa Hussaini, Shakila Ibrahimi, Shegofa Ibrahimi, Tahera Jafari, Marzia Jafari, Sohila Sakhizada.
Neuf jeunes femmes qui ont dû fuir l’Afghanistan après que les Talibans se sont emparés du pouvoir et de la capitale, Kaboul, le 15 août 2021.
Leur statut d’artistes, de comédiennes, les mettait gravement en danger dans un pays où il n’y a pas d’autre place pour les femmes qu’à la maison.
Déjà interdites d’enseignement secondaire, les jeunes filles afghanes n’ont plus le droit, non plus, d’aller à l’université, selon une décision des fondamentalistes.
Le message des Messagères
Grâce à l’accueil du TNP, épaulé par Joris Mathieu et le TNG, elles ont pu bénéficier d’aides diverses et de cours de français.
“La construction d’une vie nouvelle quand tout ce qui existait a été arraché et détruit demande du temps, expliquait Jean Bellorini en septembre dernier. Nous accompagnons le groupe dans cette épreuve – apprendre une nouvelle langue, cheminer sans se perdre dans notre dédale administratif, reprendre une activité artistique, recommencer des études…”
Une passionnante exposition sur l’Afghanistan de Naim Karimi, le metteur en scène et photographe de la troupe, a déjà été présentée.
Entre incarnation et évocation
De surcroît, après une session de répétitions autour d’Antigone de Sophocle menée l’été dernier, Jean Bellorini a décidé de se mettre au service de ce groupe unique.
Ce travail débouchera sur une création, Les Messagères, à la fin du mois de juin. Un spectacle qui s’appuie sur la tragédie antique, en langue dari surtitrée en français, entre incarnation et évocation.
Les Messagères, ce sont neuf actrices qui porteront toutes les voix des personnages : Antigone bien sûr, mais aussi Créon, Ismène, Hémon, Tirésias… Elles feront entendre leur intransigeance, leur souffrance, leur amour, leur engagement. Leur humanité.
Les Messagères, ce sont ces jeunes filles qui, à travers l’œuvre de Sophocle, nous adressent un message : elles résistent, se construisent et inventent leur destin.
Ce sont des citoyennes afghanes qui disent en Occident leur amour pour leur pays. Elles veulent en être les ambassadrices joyeuses, fortes et résilientes.
Les Messagères– Du 28 au 30 juin au TNP