Assises 2015 Curiol Alwan Selasi
© Marc Melki/Actes Sud

Assises du roman : castor, familles et dépression

Parmi les nombreux auteurs encore présents à Lyon pour les Assises du roman ce week-end, Lyon Capitale a choisi de mettre en avant Céline Curiol et Mohammed Hasan Alwan. Sous la verrière des Subsistances, il sera question d’émotions mais la conversation devrait aussi tourner autour d’un mystérieux castor.

Céline Curiol, Mohammed Hasan Alwan et Taiye Selasi © Marc Melki/Actes Sud, DR, C. Hélie/Gallimard (montage LC)

© Marc Melki/Actes Sud, DR, C. Hélie/Gallimard (montage LC)
Céline Curiol, Mohammed Hasan Alwan et Taiye Selasi.

Les tribulations d’un Saoudien en Oregon

Le Castor, dit très trivialement, c’est l’histoire d’un Saoudien exilé temporairement dans l’Oregon et d’un... castor qui lui rappelle sa famille. Aussi hautement improbable que bizarrement prometteur.

Dans le livre de Mohammed Hasan Alwan, la rencontre de Ghâleb avec le rongeur emblème de cet État du Nord-Ouest américain (animal dont il ignore tout à commencer par le nom) va faire remonter par petites touches tout ce qui dans sa vie va et a toujours été plus ou moins de travers : ses relations avec ses parents, avec sa fratrie divisée en deux (son père a eu deux femmes et des enfants de deux lits) et avec Ghâda, compagne socialement inaccessible, exilée elle à Londres. Ça et les complexités de la société saoudienne, notamment la bonne société, du moins celle des nouveaux riches, attachée aux apparences. Mais aussi le choc des cultures avec l’Amérique du Nord où personne ne lui adresse la parole et où son seul ami est donc ce castor, à la fois madeleine de Proust à grandes dents et Rosebud à queue plate.

S’il n’est pas encore tout à fait quadragénaire, l’écrivain saoudien Mohammed Hasan Alwan connaît bien l’exil nord-américain puisqu’il vit à Ottawa, la capitale du Canada (et aussi un peu des castors). Avec ce quatrième roman, qui lui a valu d’être finaliste de l’équivalent arabe du prestigieux Booker Prize, cet auteur de 35 ans d’abord publié au Liban nous fait découvrir une chose que l’on connaît trop peu : l’humour saoudien.

Céline Curiol au cœur des ténèbres

Auteure du très remarqué Voix sans issue, Céline Curiol revient sur le devant de la scène littéraire avec un récit introspectif, Un quinze août à Paris. Inspirée par le chef-d’œuvre de William Styron Face aux ténèbres, elle revit la terrible dépression qui fondit sur elle en 2009. Plongeant dans de nombreux ouvrages scientifiques et littéraires, elle s’attache à décrire ce puissant état mélancolique qui la retira de sa vie habituelle durant plusieurs mois.

Analysant aussi bien les réactions de son entourage que ses relations avec les différents psychiatres et spécialistes à qui elle eut affaire, Céline Curiol fait la lumière sur cette maladie qui touche 18 % des Français. Depuis les premiers jours où le mal s’installe en bloquant tous ses mécanismes de défense jusqu’à sa disparition progressive, en passant par la prise en charge médicamenteuse – qui la fait se comparer à une toxicomane –, elle fait la lumière sur cette maladie crainte, et parvient même à éclairer rétrospectivement le suicide d’Andreas Lubitz.

Boston-Accra

La troisième chaise autour de la table ronde “Au cœur des émotions” sera occupée ce samedi soir par Taiye Selasi, découverte l’an dernier avec son premier roman : Le Ravissement des innocents, magistral voyage à plusieurs voix dans l’histoire d’une famille qui éclate à Boston, où les parents se sont installés quand ils étaient étudiants et où sont nés Olu, les jumeaux Taiwo et Kehinde et enfin Sadie. Ils tenteront de se retrouver à Accra, au Ghana, le pays de naissance du père, qui leur est presque aussi inconnu que, l’un pour l’autre, les frères et sœurs devenus adultes.

Au cœur des émotions – Table ronde avec Mohammed Hasan Alwan, Céline Curiol et Taiye Selasi. Samedi 30 mai à 19h30, aux Subsistances. Réservations au 04 78 39 10 02.
Autres rencontres que nous vous conseillons ce samedi 30 mai :
Zeruya Shalev © C. Hélie / Gallimard

© C. Hélie / Gallimard
Zeruya Shalev.

– à 11h, la bibliothèque du 1er (Condition des Soies, 7 rue St-Polycarpe) accueille Taiye Selasi

– à 11h15, au Comœdia, Florence Seyvos et Geneviève Brisac présenteront le film Non, ma fille tu n’iras pas danser de Christophe Honoré (encore une histoire de famille et surtout de rapports fille/mère, avec Chiara Mastroianni, Louis Garrel, Marie-Christine Barrault)
– à 12h, Alan Pauls au musée des Beaux-Arts, lecture d’un texte inspiré d’un dessin de Michaux
– à 17h30, une table ronde à laquelle Taiye Selasi aurait pu aussi participer, Les familles : liaisons et déliaisons, avec l’écrivaine israélienne Zeruya Shalev, l’auteure de Vie amoureuse et Mari et Femme
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