Les grandes chaînes de librairie ne sont pas au mieux de leur forme. Menacées par la crise du livre, les petites boutiques mettent tout en œuvre pour ne pas baisser le rideau.
C’est un clin d’œil grinçant que la librairie Chapitre fait en ce moment à sa direction. Les employés de l’enseigne située place Bellecour ont installé une vitrine militante. Malgré la fermeture imminente du magasin, ces derniers comptent bien faire entendre leur voix jusqu’au bout. Les 23 salariés ont exposé des livres choisis par leurs soins, en cohérence avec la situation actuelle. Patatras, Les Nouveaux Maîtres du monde, Rideau, Effondrement, Mais pourquoi ?, Mort à crédit, etc. Leurs titres significatifs trônent en bonne place pour rappeler que le mouvement de protestation est toujours d’actualité. Il y a quelques semaines, le magasin Decitre à Bellecour a embrayé l’abaissement des rideaux. À l’instar de ces deux grandes maisons, les petites librairies ne sont-elles pas sur la même pente glissante ?
Les librairies d’occasion s’offrent un nouveau souffle
Pas vraiment. En réalité, face à la crise, toutes ne sont pas logées à la même enseigne. Si les livres neufs font moins recette, les livres à la couverture écornée, qui ont déjà vécu, ont le vent en poupe. La crise profite en effet aux petits libraires d’occasion. “Nous nous en sortons plutôt bien. Je dirais que l’occasion marche parce que c’est évidemment moins cher que le neuf”, confie Jacques Malherbe, associé de la librairie d’occasion Diogène.
Outre les fureteurs de bonnes affaires, ce type d’ouvrages plissés et parfois raturés a sa clientèle, qui ne manque pas à l’appel et grâce à laquelle ces petites librairies subsistent. “Nous nous adressons à des collectionneurs, des amateurs, donc à une clientèle régulière”, précise Serge Boissat, responsable de la librairie d’occasion Boul’dingue.
Les libraires se mettent à la page du Net
Mais toutes les maisons n’ont pas cette chance. “Ma librairie n’est pas épargnée par la crise actuelle du livre. J’ai pu remarquer une baisse des ventes depuis quelques temps. Je pense que la vente sur le Net est un passage obligé pour subsister”, raconte Jean-Hugues Langérôme, responsable de la librairie La Petite Bulle. Même son de cloche du côté d’Expérience BD. “Nous avons actuellement un site-vitrine, mais prochainement nous allons vendre sur Internet. Maintenant, en tant que libraires, nous sommes obligés d’avoir un site béton”, affirme Jonathan Dechelette, responsable de la librairie.
Un avis que ne partage pas Serge Boissat, responsable de la librairie d’occasion Boul’dingue, qui pense qu'“Internet est plus un complément, pas une fin en soi”. Globalement les libraires prennent le virage du numérique un peu comme on attrape une bouée de sauvetage. Et certains laissent complètement la Toile à distance de leurs affaires, préférant miser sur d’autres astuces pour maintenir leur librairie à flots. Ainsi, Jean-Hugues Langérôme, responsable de la librairie La Petite Bulle : “J’ai mis en place depuis quelques années des animations telles que des dédicaces d'auteurs, des expositions et la participation au prestigieux festival Zik’n Bul. Des moyens qui me permettent de passer outre la crise et d’être encore plus proche des lecteurs.”