Après de nombreuses tournées à revisiter son œuvre sous toutes ses coutures et sept ans de silence discographique, Stephan Eicher livre son deuxième album en moins de six mois. Et s’offre une nouvelle tournée, intime, qui tranchera avec ses précédentes prestations scéniques.
Il ne se passe pas une année, pour ne pas dire six mois, sans que Stephan Eicher vienne se produire dans l’agglomération lyonnaise. Sans pour autant que le Suisse parvienne à lasser qui que ce soit, surtout pas ses fans, tant il multiplie les formules scéniques et joue les transformistes. Ces dernières années, on l’aura ainsi vu se débattre avec des automates ou s’ébrouer avec une fanfare d’inspiration balkanique, le Traktorkestar (clin d’œil à ses origines yéniches), avec lesquels, dans les deux cas, l’homme de Münchenbuchsee révisait – à tout point de vue – son répertoire. Une démarche qui aboutit d’ailleurs dans la première moitié de 2019 à un album avec le susdit Traktorkestar et la beatboxeuse Steff la Cheffe, intitulé Hüh. Soit un genre de best-of – on y retrouve les tubes Pas d’ami (comme toi) et Combien de temps – réarrangé en fanfare festive (la pochette, calquée sur le Fantaisie militaire de Bashung, le voit flotter telle Ophélie sur un lit de confettis), agrémenté quand même de quatre inédits.
Si tu veux que je chante...
D’où vient alors qu’à peine quelques mois après ce disque Eicher se présente sans attendre avec cette fois un album de chansons originales – dont certaines sont connues des fans pour être jouées sur scène depuis plusieurs années – quand il a fallu attendre presque une décennie pour voir naître un successeur à L’Envolée (2012) ? Eh bien, du fait que, depuis sept ans, mis à part sa collaboration avec le romancier suisse Martin Suter pour Song Book, Eicher se trouvait discographiquement paralysé par un litige avec son label, Barclay, qui n’a cessé de retarder la sortie de ces Homeless Songs pourtant en boîte depuis au moins trois ans. Le disque est finalement sorti en septembre, chez Polydor qui a recueilli son auteur, précédé notamment d’un single, Si tu veux (que je chante), aux paroles quasi prophétiques – signées par son acolyte de toujours, Philippe Djian : “Si tu veux que je chante, ne sois pas infidèle.” Un disque attendu comme l’Arlésienne qui occasionne une nouvelle tournée de l’ami helvète, ainsi qu’une nouvelle et énième métamorphose scénique, laquelle prendra une forme moins pétaradante et plus intimiste que ses précédents raouts, semblable cette fois au délicat single précité, tout en guitare acoustique, piano pudique et cordes soyeuses. C’est en effet d’un quatuor à cordes que s’accompagnera le chanteur errant, jamais autant lui-même que lorsqu’il vagabonde en tournée, réfractaire à toute sédentarisation stylistique ou tentation de se reposer trop longtemps sur de confortables lauriers, eussent-ils la forme de confettis.