Étoile locale du jazz et activiste de son développement, c’est en temps que pianiste et au sein de son trio que le pourtant touche-à-tout David Bressat s’est fait connaître. Il revient en formation à cinq pour un album live (mais composé d’inédits) baptisé Alive. Quoi de mieux pour en découvrir la ferveur vibrante et l’authenticité que la scène ? En particulier celle du Périscope dont il fut l’un des initiateurs.
Pilier du Périscope et du collectif Polycarpe, professeur de piano jazz dans deux conservatoires de la région (Bourg-en-Bresse et Villefranche-sur-Saône), David Bressat est tout aussi hyperactif du côté de ses projets musicaux en tant que side man (Vincent Perrier 7tet, Ben Guyot 5tet, Poppy Grass) ou tête de gondole (le big band L’Œuf, le projet hommage à Nougaro Chansongs et le trio Isaac’s Mood, baptisé d’après le barman de La croisière s’amuse). Sans compter ses nombreuses collaborations avec ses pairs (Dee Dee Bridgewater, Dave Liebman, Philippe Garcia et bien d’autres). Mais ce ne sont là que des projets parallèles, car David Bressat c’est avant tout – du moins on peut le penser – le David Bressat Trio, complété par Benjamin Guyot (contrebasse) et Charles Clayette (batterie) délivrant un jazz poétique et volontiers aventureux. À l’image de ces albums, French Connection Vol. 1 & 2, dont l’un fut enregistré avec le saxophoniste new-yorkais Marcus Strickland, où il s’agissait de reprendre des classiques de la musique française, de Ravel et Debussy à Daft Punk en passant par Brassens et Claude François.
Jazz vivant
Interprète et surtout compositeur protéiforme, amateur de croisements entre jazz, écriture contrapuntique, hip-hop et funk, David Bressat, c’est un fait, n’affectionne guère les formules musicales toutes faites, et il aime multiplier les expériences, au sens propre. C’est pourquoi son trio s’est transformé en quintette (avec la participation d’Aurélien Joly à la trompette et d’Éric Prost au saxophone) sur son dernier album, publié au début du mois, Alive. Un projet, comme son nom l’indique, mûri en concerts puis fixé sur disque lors d’un enregistrement live au Crescent de Mâcon. Avec ce que cela comporte, dans l’intention, de place laissée à l’improvisation et aux échanges vibratoires entre les musiciens eux-mêmes, certes, mais aussi avec le public (que l’on entend ici réagir en direct au milieu de mesures particulièrement enthousiasmantes et virtuoses, comme sur les morceaux 5 à 6 et Pastel Song). Autrement dit, l’essence même d’un jazz vivant (alive) pour ne pas dire du jazz tout court : partager l’instant présent et une musique en train de se faire, alternant la grande intensité de moments tendus avec la grâce mélancolique (Cocoon et Méditations, les biens nommés) et les envolées joueuses auxquelles Bressat a habitué son public. Ici, il faut dire, en plus de la parfaite cohésion rythmique du trio initial (Shake Everything, secouant), l’apport aussi juste que crucial de cuivres qui pourraient être omniprésents mais qui au final ne tirent pas davantage sur le pianiste que ce dernier ne tire la couverture à lui.