Le Concert de l’Hostel Dieu nous a, depuis longtemps, habitués aux programmes originaux un brin “crossover”. Avec ce Fugacités #2, la bande à Franck-Emmanuel Comte persiste et signe !
Quand parfois les concerts à double entrée du type “musique traditionnelle irlandaise et baroque anglais” ont tendance à nous laisser de marbre à l’heure où ces concepts ont tendance à devenir la règle, certaines émulsions quant à elles laissent pantois… Et lorsque le Concert de l’Hostel Dieu nous invite à un programme “musique baroque et beatbox”, on se demande bien à quoi va ressembler l’inévitable précipité !
La question trouvera pourtant sa réponse puisque l’ensemble lyonnais, bien résolu à mener à terme son entreprise cavalière, a tout prévu. Tout d’abord, en embarquant dans l’aventure un artiste de la scène urbaine lyonnaise, le beatboxer Tiko.
Petite parenthèse pour les néophytes, le beatbox est une technique (surtout employée dans le hip-hop) consistant à imiter avec ses cordes vocales et sa cavité buccale des sons de percussions et les rythmiques (la plupart du temps urbaines) qui vont avec.
Il est vrai que dit comme ça, l’alchimie ne paraît pas évidente. Mais c’est sans compter sur l’effet “dialectique” ! Et cet effet, ici, a un nom : Moondog.
Musicien new-yorkais ayant passé la moitié de sa vie (et la quasi-totalité de sa carrière) à jouer, composer et dormir dans la rue, Moondog est l’ovni parfait pour faire prendre n’importe quelle sauce en évitant les grumeaux.
Vêtu d’une robe de bure et affublé d’un casque de viking à cornes animales, il arpentait pieds nus les rues de Manhattan, croisant les grands noms du jazz, de la musique contemporaine de son temps, du rock également, et jouant d’un instrument de percussion étrange, confectionné par ses soins. Entre 1953 et 1995, il enregistra une vingtaine d’albums insolites pour des formations souvent très différentes : big-band jazz, orchestre classique, musique de chambre, ensemble de saxophones ou solo de percussions…
Prolixe, ses partitions – faisant la part belle au contrepoint et notamment aux canons – ont également été jouées par des grands noms. C’est cette obsession pour l’écriture “canonique” et la fugue dans l’œuvre de Moondog qui permettent ici, c’est certain, de boucler la boucle et ainsi relier la musique baroque aux expérimentations du va-nu-pieds… Quant aux percussions, omniprésentes chez Moondog comme dans les danses endiablées de Santiago de Murcia au XVIIe, elles seront tout naturellement assurées par le beatboxer donnant la réplique aux musiciens du Concert de l’Hostel Dieu. Dialectique quand tu nous tiens…
Fugacités #2. Mardi 15 et jeudi 17 septembre à 12 h 15. Université catholique de Lyon – Campus Saint-Paul, 10, place des Archives, Lyon 2e. Gratuit.