Au centre, Earl Slick, guitariste de Bowie © Steve Rose
Au centre, Earl Slick, guitariste de Bowie © Steve Rose

Concert : le bowisme sans Bowie au Transbordeur

Sous le vocable “A Bowie Celebration”, une poignée d’anciens collaborateurs fidèles de David Bowie font revivre sur scène les tubes de leur mentor, comblant avec une certaine expertise le vide laissé par le maître dans le cœur des fans. Ce mardi au Transbordeur.

La question revient régulièrement dans les journaux goûtant le coupage de cheveux en quatre, et constitue même un éternel sujet de cours à Sciences Po : le gaullisme sans de Gaulle a-t-il encore un sens ? (Vous avez quatre heures…) Certains étant d’avis que le gaullisme sans de Gaulle, c’est comme la bière sans alcool, cela manque un peu de corps, pour ne pas dire d’incarnation. La question se pose pareillement quand il s’agit, par exemple, de faire du Bowie sans Bowie. D’en ressusciter l’esprit le temps d’un concert ou d’une tournée sans aucun recours (c’est à la mode, même si très vulgaire) au moindre hologramme. Or il semblerait que, dans la longue tradition du tribute band, mais avec éminemment de respect, de déférence et de délicatesse, ce genre de projet se multiplie chez un certain nombre de bowistes de la première ou de la dernière heure.

Concernant cette dernière heure, on avait déjà pu applaudir Donny McCaslin (plus connu sous le titre désormais éternel de “dernier saxophoniste de Bowie” puisque c’est sa trompe en cuivre qui participe de l’aura spectrale de l’ultime disque du maître) et son Blackstar Band, du nom du suscité album. Lequel McCaslin entendait, avec ce projet jazz fusion constitué de musiciens tous présents sur le testament musical bowien et l’album Beyond now, perpétuer l’esprit et ranimer le fantôme du dernier acte magistral et prophétique de ce cher disparu.

Alumni

De l’autre côté du spectre du bowisme, celui de la première heure ou quasiment, viennent se placer les alumni, littéralement les “anciens élèves”, de David Bowie. Soit une poignée de ses plus fidèles musiciens s’étant mis en tête de faire revivre sur scène les classiques de celui qu’ils ont accompagné pendant des décennies. Parmi ces bowistes les plus acharnés, et en tête de la troupe, on trouve le pianiste Mike Garson, présent en studio aux côtés de Bowie dès Aladdin Sane en 1973 et crédité par la suite sur plus de vingt albums et un millier de concerts dont, tout un symbole, les premier et dernier donnés aux États-Unis par le Thin White Duke. Autant dire que l’homme connaît quasiment mieux David Bowie que sa propre famille. À ses côtés, Earl Slick, guitariste protée que l’on a pu voir tant aux côtés de John Lennon que de Jacques Dutronc ou The Cure mais qui semble avoir un jour juré fidélité à l’auteur de Heroes – on le trouve ainsi sur deux séries d’albums du milieu des années 1970 et des années 2000.

Une étoile à la place du cœur

À cette troupe de piliers de la discographie et des tournées de Bowie complétée par Mark Plati, qui fut son directeur musical trois ans durant et le coproducteur d’Earthling (1997), Gerry Leonard, autre directeur musical, le bassiste Carmine Rojas (à l’œuvre sur Let’s dance) et une poignée de chanteurs se succédant au micro (le choriste de luxe Bernard Fowler, Corey Glover de Living Colour, Joe Sumner, qui n’est autre que le fils de Sting, et la chanteuse guatémaltèque Gaby Moreno), manquent bien sûr Reeves Gabrels et la bassiste Gail Ann Dorsey, et dans une moindre mesure Sterling Campbell, Robert Fripp, Carlos Alomar et Adrian Belew qui participa à la première du projet, salle Pleyel, en janvier 2018. Il n’en demeure pas moins que, comme l’a écrit The Daily Californian, A Bowie Celebration est le remède idéal pour tous ceux qui depuis la véritable disparition de Ziggy Stardust ont un trou en forme d’étoile à la place du cœur. L’actrice Evan Rachel Wood (The Wrestler, True Blood, Westworld), montée sur scène avec le groupe lors d’un concert, ajoutant à cela qu’il ne s’agit pas là d’un vulgaire “groupe de reprises de Bowie mais de son véritable groupe, aussi proche que vous ne pourrez désormais l’être de Bowie”. Manière de bowisme sans Bowie, donc.

A Bowie Celebration – Mardi 15 janvier à 20h30 au Transbordeur


[Article publié dans Lyon Capitale n°784 – Janvier 2019]

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