En présentant trois de ses spectacles le 21 et 22 octobre, la Maison de la danse nous fait découvrir Amala Dianor qui nous embarque dans des voyages chorégraphiques sensibles et métissés.
Artiste associé à la Maison de la danse, Amala Dianor est d’origine sénégalaise, danseur hip-hop surdoué et magnifique danseur tout court.
En 2000, au grand dam de ses copains hurlant à la trahison, il fut le premier danseur hip-hop à se former au classique et au contemporain en intégrant le CNDC d’Angers.
Animé par le désir du défi et des rencontres, il élargit sa gamme en travaillant pendant dix ans avec des chorégraphes aux univers très différents comme Roland Petit, Thomas Lebrun, Abou Lagraa et Emanuel Gat.
“Je me suis mis en danger, nous dit-il, mais finalement cela m’a permis d’ouvrir beaucoup de portes. Ce que je ressens dans mon travail actuel, c’est que tout est en mouvement et à l’époque j’étais déjà dans cette dynamique-là, avec cette envie de chercher toujours ailleurs, de refuser le cloisonnement, de sortir de ma zone de confort.”
En 2012, il crée sa compagnie pour expérimenter la place du chorégraphe et invente de petites formes glissant d’une technique à l’autre avec virtuosité. Entre contemporain, classique, hip-hop et danse africaine, il hybride les écritures laissant apparaître un langage d’ouverture qui cherche le lien entre les différences.
Lumineuse et poétique, sa danse pose ses respirations dans une gestuelle à la fois puissante et féline. Amala Dianor séduit le public et les programmateurs.
En 2019, il se confronte à une première grande pièce, The Falling Stardust avec neuf danseurs auxquels il transmet sa gestuelle métissée, entouré pour la première fois d’une équipe artistique importante.
Il expérimente la machine nécessaire au grand spectacle avec lequel il veut prouver qu’il est prêt à entrer dans la cour des grands. Mais il se rend compte que cette création l’a écarté de ce qu’il était, de tout ce qu’il avait construit autour de ses autres projets et qu’il se situe à un autre endroit.
En cette rentrée 2021, il vient de créer Siguifin avec neuf danseurs et trois autres chorégraphes d’Afrique de l’Ouest. En 2022, il sera auprès de Via Katlehong, un groupe de danseurs urbains d’Afrique du Sud tout en travaillant à sa prochaine pièce de groupe…
Trois pièces à découvrir… sous le signe de l’amitié, du partage et de la transmission
Dans les trois pièces proposées, il y a une perle : le duo Extension, créé en 2014 avec son ami Junior Bosila (Bboy Junior), star internationale de breakdance et qui déploie une danse pleine d’émotions.
“Cette rencontre c’était le plaisir simple du hip-hop, danser sans se prendre la tête avec ce qu’on était en essayant de se compléter, de voyager ensemble avec nos forces et nos faiblesses.” Dans ce même programme, Amala Dianor révèle une nouvelle création Point Zéro, un trio avec deux amis, Johanna Faye et Mathias Rassin, issus des danses urbaines.
La première a confronté sa danse à d’autres esthétiques, le second est resté le grand danseur international de hip-hop qu’il est depuis plus de vingt ans. Après avoir parcouru chacun des chemins différents, ils se retrouvent pour éprouver ce qu’il reste en eux du hip-hop. “C’est un trio qui me ressemble beaucoup, j’ai l’impression que Mathias et Johanna sont le double de moi, c’est un voyage où la danse est partagée avec des interprètes de haut vol.”
sur l’écriture pure, cette pièce est aussi le lieu où les danseurs se mesurent à la physicalité du hip-hop et au corps qui vieillit. “La danse hip-hop est très démonstrative, très physique, il y a des blessures, des choses qu’on ne peut plus faire. Alors que je m’étais éloigné de l’univers du hip-hop, je me suis rendu compte qu’on ne pouvait plus investir l’intensité du mouvement comme avant. On a donc gardé l’énergie pour faire en sorte qu’elle transforme le mouvement et c’est tout aussi intéressant.”
La physicalité, il la retrouve à travers le corps de Nangaline Gomis, une jeune danseuse d’origine sénégalaise rencontrée dans le cadre de sa formation au CNSMD de Lyon, à qui il transmet son solo Man Rec qui signifie “moi” en wolof et appelé Wo-Man dans sa nouvelle version.
Créé en 2014, il l’a voulu comme une réflexion sur ce qu’il avait à dire en tant que danseur, sur les raisons pour lesquelles il convoquait le public. Le solo puise dans son intériorité tout en faisant exploser cette danse métissée qui le caractérise.
“Nangaline est jeune, en pleine forme et en plus elle a un parcours fait de contemporain, de hip-hop et de danse africaine. J’ai cherché plus loin avec elle dans cette physicalité tout en lui faisant prendre conscience du mouvement. Elle est très riche malgré sa jeunesse et transposer ce solo dans un corps de femme pour en faire une autre proposition m’a permis une fois de plus d’aller vers un ailleurs.”
À quarante-quatre ans, Amala Dianor pose un regard sur son chemin personnel : “On me renvoie souvent de l’admiration sur mon parcours, la réussite, mais je m’en moque totalement. Ce qui m’intéresse avant tout c’est d’être au plus juste dans ce que je fais et tant que je n’atteins pas cela, je n’ai pas confiance dans ce que je suis et ce que je fais !”
Wo-Man / Extension / Point Zéro – Amala Dianor – Les 21 et 22 octobre à la Maison de la danse – www.maisondeladanse.com