Flics en trois clichés

Ces policiers urbains sont colocataires, représentant chacun une génération, en passant du vieux briscard proche de la retraite et d'un racisme post-colonialiste appuyé, au quadra dépressif, éventuellement homosexuel refoulé, en passant par le jeune cow boy peu formé et trop zélé. Pour faire un résumé grossier. Parce qu'il ne s'agit certainement pas d'un huis clos social lourd où l'on dresserait les portraits croisés de poulets aigris et malmenés par la vie. Dans cette pièce au titre interminable tels que les affectionne Melquiot, Faire l'Amour est une maladie mentale qui gaspille du temps et de l'énergie, on marche avec précaution, avec beaucoup de second degré en même temps qu'une grande gravité sur les cimes périlleuses du stéréotype.
Sur le fil
Forcé de jouer au funambule, Gilles Chavassieux a tenté de manipuler ces équilibres précaires dans une mise en scène plutôt sobre, avec des déplacements d'objets à vue, une photocopieuse surmontée naïvement d'un gyrophare, qui poste régulièrement de nouveaux éléments pour rythmer la pièce. Les artifices, pourtant bien montés, ne servent pas toujours au mieux la finesse psychologique du trio, très homogène et pris dans une toile dramatique tendue qui ne mènera qu'à la fin au propos militant de Melquiot, et assumé par Chavassieux.
Assassin de la police
Le plus jeune des trois policiers, Alban, subit une mise à pied à la suite d'un contrôle de routine nocturne, à l'issue duquel un chorégraphe noir, qui rentrait chez lui avec sa petite fille, finit mort au commissariat. Avant d'arriver à l'évocation de ce drame, le fil narratif a été très lentement tiré. L'errance de Bernard, le plus âgé des flics qui se met à la colle avec une jeune femme noire rencontrée sur Meetic, se cogne contre celle de Thierry, qui compte bien régler son compte à Alban en même temps qu'il se tape la maîtresse black de son collègue, et ne peut supporter que les pièces de théâtre avec des femmes. Melquiot relève le défi de raconter avec une écriture complexe des destins banals, tout en délivrant un discours très engagé, sur la société mais aussi sur le théâtre. Un amour ou, autrement dit, une maladie mentale dont il serait dommage de se passer, aux Ateliers.

Faire l'amour est une maladie mentale qui gaspille du temps et de l'énergie, de Fabrice Melquiot, mise en scène de Gilles Chavassieux.Au théâtre des Ateliers, Lyon 2è. Jusqu'au 6 février.

Photo : Johan Trompat

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