Sensation immédiate : la matière colle et diffuse le sucre directement dans le sang. Laurent Perbos, exposé ici, a semé d'embûches son espace, pour conter mythes et poésies dans tout ce qu'ils ont de palpable et de préhensible.
Le détournement des fonctions premières des objets est une obsession chez ce jeune plasticien. Pas très loin des Dragibus qui floutent les frontières entre art et déco, se dressent dans la galerie de la BF15 des parpaings argentés, formant un totem contemporain transpercé de flèches. "C'est l'image de Saint-Sébastien que j'ai voulu évoquer ici", assure Laurent Perbos, le fameux martyr tué de flèches pour sa foi en le Christ ayant fait l'objet de maintes représentations classiques dont, entre mille, un tableau évanescent de Pérugin exposé au Louvre. Saint Sébastien suggéré en simples moellons, en matériaux bruts constructeurs, Laurent Perbos le propose avec une certaine malice. Devant cette pièce sans doute la plus belle de l'exposition, traînent aussi quelques souches d'arbres, construites entre l'animal et le végétal avec des tuyaux d'arrosage agglomérés. Lesquelles mènent à l'œuvre monumentale de L'Arbre qui pleure : il aura lui aussi nécessité des kilomètres de tuyaux achetés dans les Casto du coin, montés en cerisier, et des branches duquel coule en goutte à goutte une eau claire. "J'avais envie de mettre en scène une image poétique, celle d'un arbre qui pleure", explique Laurent Perbos, pour qui, en effet, la poésie peut très bien n'être qu'une affaire de jardinerie et de colle forte.
Forest tears. Jusqu'au 30 mai à la BF15, 11 quai Saint Vincent, Lyon 1er.