Il y a 20 ans : Téo, les opposants portent plainte
par Thomas Frénéat
IL Y A 20 ANS DANS LYON CAPITALE - En 1998, le Conseil d'État annule le contrat de concession qui lie la ville de Lyon à Bouygues sur le périphérique nord. Conséquence, elle doit verser de grosses indemnités à l'entreprise, payées en partie par le contribuable. Mais les lyonnais ne l'entendent pas de cette oreille, et portent plainte.
Début 1998, Téo est la patate chaude de la ville de Lyon. Un coup ouvert, un coup fermé, un coup trop cher, un coup gratuit… Le périphérique nord est passé par tous les stades, et sa gestion fait grincer des dents. Alors que Bouygues doit percevoir des indemnités de la ville de Lyon suite à l'annulation de son contrat de concession, les lyonnais craignent de devoir mettre la main au porte-monnaie. En effet, ils s'attendaient à ce que Raymond Barre monte au créneau pour défendre les deniers publics, mais ce dernier ne bronche pas. Lassés d'attendre une réaction de leur maire, les lyonnais prennent les choses en main et portent plainte eux-mêmes. C'est une association de consommateur, soutenue par plusieurs collectifs citoyens, qui interpelle la justice pour corruption passive.
Un article publié dans Lyon Capitale n°161 le mercredi 4 mars 1998, signé par Frédéric Crouzet.
Téo : les opposants portent plainte pour corruption passive
Puisque Raymond Barre ne souhaite pas engager d'action judiciaire dans le dossier Téo, les citoyens prennent la relève. Une association membre du collectif pour la gratuité du périphérique a déposé plainte contre X pour corruption passive. Le doyen des juges d'instruction l'a déclarée recevable.
L'association de consommateurs lndecosa-CGT a déposé, il y a plusieurs semaines, une plainte contre X pour corruption passive avec constitution de partie civile dans l'affaire du tronçon nord du périphérique de Lyon. La plainte a été déclarée recevable par le doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Lyon qui a fait parvenir à l'association le 23 février une ordonnance de consignation. En clair, un juge d'instruction devrait prochainement être nommé pour tirer au clair les tenants et les aboutissants du très opaque contrat de concession de Téo. "Le conseil d'Etat ayant confirmé le caractère contraire à l'intérêt général du contrat, il convient à présent d'établir les responsabilités et de faire toute la lumière sur cette affaire" explique Gérard Claisse, porte-parole du collectif Pour la Gratuité, Contre le racket, dont fait partie l'association lndecosa-CGT. Pour mener cette action pénale, les partisans de la gratuité se sont attaché les services du cabinet d'avocats parisiens De Castelnau, qui avait déjà défendu avec succès les intérêts des anti-péage de Toulouse. Pour Régis de Castelnau, avocat auteur d'un ouvrage Le Fonctionnaire et le juge pénal, cette plainte est un acte indispensable. "Aujourd'hui, le Conseil d'Etat ayant mis un terme à la construction juridique de Téo, il s'agit de trouver des solutions de sortie. La communauté urbaine doit calculer combien elle doit au concessionnaire. Mais il n'est pas possible de faire ce travail sans savoir ce qui s'est réellement passé, sans savoir comment a été préparé ce montage déséquilibré, véritable abandon de la prérogative publique. Pour nous, cet abandon ne peut qu'avoir des origines frauduleuses", explique l'avocat parisien. Le collectif croise les doigts pour que l'affaire soit confiée au magistrat en charge du dossier des "comptes suisses" de Pierre Botton. En effet, les deux affaires pourraient être liées. Pierre Botton avait ouvert des comptes en Suisse sur lesquels ont transité des sommes provenant de Bouygues et d'une filiale de Dumez, sociétés associées pour la construction et l'exploitation du périphérique. Selon Botton, ces comptes auraient servi à assurer l'ascension politique de son beau-père Michel Noir. De cette époque, Raymond Barre, président de la communauté urbaine, ne veut plus en entendre parler. En février, il a encore répété que le passé ne l'intéressait pas et qu'il n'entendait pas engager des actions pénales dans l'affaire du périphérique, dont le contrat de concession avait été signé entre Michel Noir et le consortium Bouygues-Dumez en 1991. Une fois de plus, des citoyens responsables prennent l'initiative de faire la lumière dans une dossier recouvert de zones d'ombres. A Lyon, on commence à avoir l'habitude. En 1996, c'était déjà une association de contribuables qui avait déposé une plainte contre X, suite à la mauvaise gestion de l'Opéra de Lyon, révélée par un rapport de la chambre régionale des comptes.
Le tunnel de Téo devrait rouvrir cette semaine
D'après les dernières informations émanant de la communauté urbaine de Lyon, le tunnel du périphérique nord devrait rouvrir ses barrières de péage au cours de cette semaine, peut-être jeudi. L'ouvrage principal du défunt Téo avait été fermé le 10 février sur décision préfectorale à la suite de l'annulation du contrat de concession par le Conseil d'Etat. Le nouveau prix maximum de passage sous le tunnel a été fixé à 1.0 francs par la communauté urbaine. Les militants pour la gratuité totale du périphérique manifesteront probablement aux barrières de péage le jour de la réouverture. Tout comme le 11 mars, journée nationale d'action pour la gratuité des autoroutes urbaines à péage.