Dernier volet de la trilogie que l'Opéra de Lyon consacre à Pouchkine et Tchaïkovski, La Dame de pique, après Mazeppa et Eugène Oneguine, voit se reformer le couple Kirill Petrenko, pour la direction musicale, et Peter Stein pour la mise en scène. Comme dans un couple bancal, l'un est brillant et envoûtant tandis que l'autre renifle le bigoudi et la charentaise.
La Dame de pique est donc adaptée d'une nouvelle de Pouchkine. L'opéra de Tchaïkovski est musicalement superbe, même si l'argument ne provoque pas la fête des slips, comme toujours dans la littérature slave. L'histoire se déroule à Saint-Petersbourg à la fin du XVIIIe siècle. Hermann est un jeune officier pauvre et ambitieux (Aaaah ! je pue des pieds !). Il s'éprend d'une jeune dinde, Liza (Aaaah ! je suis une blonde écervelée !), dont la grand-mère, la Comtesse, fut en d'autres temps égérie à la cour du roi de France (La bohème ! La bohèmeeeeee !). Elle y reçut le secret d'une combinaison pour faire fortune aux cartes (Touche pas au grisbi, salope !). Liza, promise à un prince, tombe amoureuse d'Hermann (Ooooh ! mon cœur se déchire et mon bas aussi !). Lui obsédé par l'idée d'être riche et comblé (Youpiii ! ça fait bling-bling !) veut obtenir le secret de la vieille. Il s'introduit dans ses appartements et essaie de lui faire avouer, en la menaçant de son pistolet. Elle succombe, terrassée par la pingrerie et un arrêt cardiaque (Aaaah ! je meeeeurs !). Toujours plus amoureuse, Liza veut s'enfuir avec Hermann (Ouuuui ! je suis définitivement une dinde blonde avec des gros seins !) qui pendant ce temps a acquis le secret de la bouche du spectre de la vieille (Aaaah ! ça se complique un max !). Lors de leur ultime rendez-vous, elle sombre dans la passion dévorante (Aaaah ! j'ai les seins qui pointent !) tandis que lui dévoile sa pathologie (Yeaeeh ! je serais président de la République !). Dépitée, elle se jette dans le fleuve (Oups ! c'est froid ! Aaaah ! je meeeeurs !). Laissant la dinde se noyer, Hermann fonce au cercle de jeu. Il joue et gagne puis perd. Le fantôme de la vieille réapparaît pour lui annoncer, Alzheimer galopant, qu'elle s'est trompée dans la combinaison (Hiii ! je ricane !). Hermann se suicide (Aaaah ! je meeeeurs ! Loto : à qui le tour ?).
Peter Stein a ordonné ces tourments slaves, ces tourbillons de passions et d'intrigues mortelles dans une mise en scène aussi rigide qu'une marche militaire, aussi subtile qu'un film muet bavard. Il déroule, avec conviction, le grotesque lorsque les éclairs font clignoter les ampoules ou lorsque paraissent la statue de la tsarine ou le spectre de la vieille dans des effets spéciaux dignes d'une fête à neuneu. Aucune ingéniosité, aucune grâce, la mise en scène a, cependant, l'avantage de ne pas divertir de l'enchantement musical. Kirill Petrenko, le charmeur du couple, provoque la magie et entraîne l'orchestre vers de belles prouesses. Les chœurs sont parfaits et les chanteurs prodigieux, hormis quelques réserves concernant Viktor Lutsiuk (Hermann).
In fine, Stein offre une conception ennuyeuse et convenue de l'opéra. On n'en comprend d'autant moins les raisons qui poussent Serge Dorny, le directeur de la maison, a lui confier la mise en scène de Lulu de Berg, la saison prochaine.
La Dame de pique de Tchaïkovski, mise en scène de Peter Stein, direction musicale de Kirill Petrenko avec l'Orchestre, les chœurs et la Maîtrise de l'Opéra. Jusqu'au 5 février à l'Opéra de Lyon, place de la Comédie, Lyon 1. 0 826 305 325 ou www.opera-lyon.com
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