Dans son dernier opéra, le compositeur Richard Strauss explore les tensions entre musique et texte : un derby fantaisiste dont l’art triomphera.
Comtesse, ô comtesse, dites-nous qui de la musique ou des mots aura votre faveur ? La mélodie, la poésie ? Laquelle a la prépondérance dans l’opéra ?
1942. Dans son ultime chef-d’œuvre, Richard Strauss questionne les rapports entre musique et littérature, à travers une conversation en musique au cours de laquelle Olivier le poète et Flamand le musicien se disputent les yeux (et les oreilles) de la comtesse Madeleine, arbitre d’un match allégorique et malicieux. Divers protagonistes (la Clairon, La Roche ou Monsieur Taupe...) prennent part à un débat à la fois mondain et houleux dans un château d’Ile-de-France, que Madeleine finira par trancher (quoique...), s’éloignant en fredonnant une mélodie composée par Flamand sur un sonnet d’Olivier – la mélodie, mais pas les paroles !
Une partition sublime
Compositeur et librettiste (en collaboration avec Clemens Krauss) de ce litige abscons, Strauss paraît s’amuser de ce badinage à la fois nébuleux et désuet. La musique, belle à en perdre la raison, parle d’elle-même. Strauss est compositeur (et l’un des plus doués qui soit) : le débat n’est pas réellement, sinon simple fantaisie, intelligence... un pur caprice.
Metteur en scène incoercible (on se souvient de son turbulent Don Giovanni Keine Pause l’été dernier aux Nuits de Fourvière), c’est le Hongrois David Marton qui s’est vu confier la représentation de l’œuvre. Une chaussure parfaitement ajustée à son pied quand on connaît son passé de pianiste, s’initiant à la direction d’orchestre à Berlin avant même de se consacrer à la mise en scène. On est donc loin de l’impartialité, d’autant que le troisième grand maître d’œuvre de cette production est musicien également : c’est au chef Bernhard Kontarsky qu’incombera la tâche de diriger cette partition sublime abordant un retour à une forme de classicisme non pas réactionnaire mais délicatement expérimentale. Un régal.
Capriccio. Du 7 au 17 mai à 20h et dimanche 18 mai à 16h, à l’Opéra de Lyon.
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Autour de Capriccio...
En résonance avec Capriccio, le Goethe-Institut organise une rencontre avec le metteur en scène David Marton. Et l’Opéra nous propose un récital de la soprano Diana Damrau consacré au lied, forme dont Strauss demeure l’un des maîtres les plus éloquents. Strauss, mais aussi Brahms, Fauré, Liszt, Britten ou Bell seront à l’honneur de ce rendez-vous qui verra le harpiste Xavier de Maistre donner la réplique aux mélopées de la cantatrice.
Rencontre avec David Marton. Le 6 mai à 19h, au Goethe-Institut, 18 rue François-Dauphin, Lyon 2e.
Récital de Diana Damrau. Le 26 mai à 16h, à l’Opéra de Lyon.