L’auteur du Gone du Chaâba (best-seller vendu à plus de trois millions d’exemplaires qui racontait son enfance dans un bidonville près de Lyon), Azouz Begag, ancien ministre de Jacques Chirac, publie L’arbre ou la maison, formidable récit inspiré de son dernier voyage en Algérie.
“Il y a quelques années, quand j’étais à la fois dans la politique et dans la littérature, j’aimais dire : ‘Je veux être lu et être élu...’ Maintenant je veux seulement être lu !”
Ainsi s’exprime Azouz Begag, fringant sexagénaire désormais retiré de la politique, même si son avis est encore sollicité par de nombreux politiciens (y compris l’actuel Premier ministre, Jean Castex). Il fut en effet un ministre en vue, délégué à la promotion de l’égalité des chances de 2005 à 2007 dans le gouvernement Dominique de Villepin, sous la présidence de Jacques Chirac.
Azouz begag décrit le voyage qui le ramène à ses origines algériennes avec une ironie irrésistible
Il en a gardé une inimitié féroce envers Nicolas Sarkozy et Brice Hortefeux (qui le menaçait en passant son pouce sur sa gorge en conseil des ministres !) ainsi que le désir de s’éloigner le plus possible de ce milieu qui cultive l’art de planter des couteaux dans le dos. Ce n’est plus son monde. Il préfère jouer avec les mots.
“Avant, explique-t-il, j’écrivais au kilomètre, je transcrivais tout ce qui me passait par la tête. Désormais, avec l’âge, je parviens à écrire plus serré, je garde la substantifique moelle.” Son dernier roman témoigne de cette volonté de dire l’essentiel, ce qui n’exclut ni l’humour ni la fantaisie. Au contraire.
Un “gone” de 64 ans
L’arbre ou la maison nous permet de retrouver le gone du Chaâba, quelque six décennies plus tard. Entretemps, le garnement espiègle qui a grandi dans un bidonville près de Villeurbanne est devenu un auteur à succès.
Même si les romans, essais politiques et livres pour la jeunesse qui ont suivi n’ont jamais aussi bien marché que le premier. Il a été ministre. Mais il n’a pas perdu le regard malicieux, insolent même, de son enfance. C’est avec une ironie irrésistible qu’il décrit le voyage qui le ramène à ses origines algériennes, à Sétif, là où sont enterrés ses parents. Là où, enfant, il passait ses vacances avec son grand frère.
Il a d’ailleurs réussi à entraîner ce dernier dans un nouveau périple. Las, ils s’aperçoivent très vite qu’ils ne sont pas les bienvenus. La maison familiale est menacée par les racines d’un peuplier devenu immense. Cruel dilemme, faut-il couper l’arbre et garder la maison, ou l’inverse ? Les rues sont envahies par une foule menaçante qui se révolte. C’était comme le tableau d’Eugène Delacroix, Marianne guidant le peuple, écrit-il.
Sur une place, il est repéré par un barbu qui ressemble férocement à Ben Laden. Malgré ses Ray-Ban, ou à cause d’elles, il a été reconnu. Il est le Français, le traître… Heureusement, une femme s’interpose, courageusement. C’est Ryme, son amour de jeunesse, celle qu’il est venu chercher, celle qu’il espère secrètement ramener en France…
Entre blagues potaches et dangers successifs, jeux de mots et envolées poétiques, Azouz Begag retrouve le pays de ses origines. Il dit le déchirement d’être un “bi”, à la fois français et algérien, ou ni l’un ni l’autre… Juste un homme, un écrivain à la recherche de son identité profonde, celle de ses racines que rien ne peut sectionner.
L’arbre ou la maison – Azouz Begag, éditions Julliard, 304 p., 19 €.
¨Plus facile et moins contraignant d'être lu que réélu !