Placée en grande partie sous le signe du roman nordique, grand pourvoyeur du genre noir, la 15e édition de Quais du polar continue d’accueillir à Lyon la crème de la littérature policière et de tout ce qui s’y raccroche. Dont, pour la première fois, le réalisateur américain culte Brian De Palma et le journaliste d’investigation italien Roberto Saviano.
Le problème avec Quais du Polar, c’est que l’annonce de cet événement ô combien incontournable du paysage culturel lyonnais (et du paysage littéraire tout court) peut donner l’impression un peu fastidieuse de l’appel des troupes lycéennes un jour de rentrée de seconde. Autrement dit, on égrène les noms à n’en plus finir. Sauf qu’ici on ne s’en lasse pas, car le casting est toujours premium – c’est d’ailleurs la principale raison du succès sans égal de ce salon du noir. On n’y coupera pas cette année et, politesse oblige, on commencera par les invités en provenance de Scandinavie et de Finlande, cet eldorado du frisson.
Pas moins de 24 auteurs nordiques (sur les 140 du festival) sont à l’honneur pour célébrer le polar venu du froid : Jan Stocklassa, Emelie Schepp, Camilla Grebbe, Viveca Sten, Michael Hjorth, Hans Rosenfeldt (la Suède en force) ; Gunnar Staalesen (Norvège) ; Leif Davidsen (Danemark) ; Arni Thorarinsson (Islande) ; Antti Tuomainen (Finlande)…
Côté incontournables et/ou habitués, on note la présence de Michael Connelly, Tim Willocks, David Grann, Elizabeth George, Ron Rash, Maxime Chattam, Éric Plamondon, Arturo Pérez-Reverte, Ian Manook et Colin Niel.
Aux marges du genre, Jean-Christophe Rufin, Kent et même Philippe Manœuvre, chargé d’une dictée noire qu’il lira sans doute à travers ses iconiques lunettes de même teinte – jeux et enquêtes multiples étant toujours au rendez-vous.
Cela suffirait amplement, en plus de tous ceux qu’on ne peut citer, à façonner un programme de premier ordre, sauf qu’en sus Quais du polar accueille – pour la première fois – James Sallis (l’auteur de Drive, porté à l’écran par Nicolas Winding Refn), Brian De Palma, qui publie un livre avec son épouse, et le très rare, pour les raisons qu’on connaît, Roberto Saviano qui après ses terribles enquêtes sur la camorra (Gomorra) et le trafic de drogue (Extra pure) a publié l’an dernier son premier roman, Piranhas, vertigineuse plongée dans l’univers de la délinquance juvénile napolitaine. Un autre grand sera là, par la pensée : Georges Simenon, auquel hommage sera rendu pour les trente ans de sa disparition, notamment – dans la profusion de films proposés par Quais du polar – via une projection de L’Horloger de Saint-Paul adapté à l’écran par Bertrand Tavernier, qui sera de la partie. Manière de boucler la boucle en rappelant que Quais du polar, sous ses airs d’internationale du genre noir, est aussi un événement irréductiblement lyonnais. Qui, ici, s’en plaindra ?
A côté de ces auteurs parfois surestimés et boostés par la com de leurs riches maisons d'éditions, il y a des récits intéressants comme "L'empreinte du Dragon" de Jean Tuan chez CLC Editions. Un polar qui colle à l'actualité de l'aéroport de Toulouse en révélant les dessous du scandale de son achat par les chinois et en nous faisant spectateurs des luttes impitoyables pour le pouvoir entre dirigeants chinois. Érudit, réjouissant et épicurien. A découvrir !