Max Gericke ou Pareil au même : viscéral !

Retour sur cette pièce, coup d'essai de 1984 de "Michel Raskine metteur en scène" qui s'est transformé en coup de maître avec ce spectacle fort et trash aux 240 représentations. Âme sensible s'abstenir...

"C'est mon premier spectacle en tant que metteur en scène. A l'époque jamais je n'aurais pensé qu'on le reprendrait ainsi, régulièrement, selon les envies", explique avec une pointe de nostalgie Michel Raskine. Une femme usurpe l'identité de son défunt mari afin de travailler pour survivre dans une Allemagne des années 30 ravagée par la crise. La vieille femme devenue une créature androgyne se souvient. Mi-homme, mi-femme... personnage à la dérive réfugié dans un antre sombre.

1982, Manfred Karge écrit la biographie théâtrale de Max Gericke, personnage déchiré par sa double identité à l'image d'une Allemagne séparée en deux par le Mur de Berlin. "Ce texte est complètement imprégné d'une réalité extérieure, il a une force poétique, une matière et une envergure qui transcendent les époques", constate le metteur en scène qui aujourd'hui encore se dit "ébloui par l'œuvre". "C'est grâce à ce spectacle que j'ai fait une carrière de metteur en scène car il a été complètement conforme à ce dont j'avais rêvé ", évoque-t-il. Il faut dire qu'avec la puissance dramaturgique du texte, un monologue poignant sur la perte d'identité, et une comédienne prodige pour l'interpréter, Marief Guittier, Michel Raskine a su d'emblée trouver la forme du spectacle. Nul ne sort indemne de cette pièce brillante sur le combat des faibles dans une société sans pitié, machine à broyer les petites gens. Le ton est violent et le metteur en scène opte pour une plongée dans les entrailles de Max Gericke au sens littéral du terme. Marief Guittier amène la chair du personnage sur scène. Max qui fut Ella est certes une représentation moderne du mythe de l'androgyne mais c'est aussi la crasse et la viande de l'humanité. Se souvenant de son passé, comme tout humain, mais le racontant en se nourrissant comme un animal dans une cave glauque, le personnage prisonnier de sa misérable condition ayant pour seul compagnon un cadavre de lapin, apparaît en filigrane attachant et bouleversant. Le spectateur est saisi d'effroi devant ce clown triste en porte-jarretelles. "J'espère que j'ai toujours ce culot. J'aime toujours ce spectacle, je n'ai pas honte de le revoir", confie Michel Raskine. Marief Guittier parle, quant à elle, de ce spectacle comme de leur "carte de visite". Frappant très fort avec une signature aussi audacieuse et engagée, ils ne risquaient pas de se faire oublier du monde du théâtre.
Max Gericke ou Pareille au même. Les 23, 24 et 25 juin au théâtre du Point du jour dans le cadre des "Nuits Berlin" des Nuits de Fourvière. Le spectacle sera repris en décembre 2009 dans le cadre de la saison théâtrale du Point du jour, qui accueillera par ailleurs les 28 et 29 juin l'illustre Berliner Ensemble et Manfred Karge pour Cabaret Brecht.

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