Dans son hôtel du Lido, il est fasciné par la beauté d'un jeune adolescent polonais, Tadzio. Dans une Venise ravagée par le choléra, Aschenbach vit ses dernières heures et meurt en contemplant le jeune Apollon s'éloigner sur les eaux...
Ancien disciple de Peter Brook, le metteur en scène Yoshi Oïda se dit fasciné par l'opéra, l'art le plus proche selon lui de "la tradition du théâtre japonais de son enfance". Il nous livre sa vision originale et crépusculaire du chef d'œuvre de Britten.
Ne parlez pas de fantasme, de sensualité et de désir à Yoshi Oïda au sujet de Mort à Venise, il vous regardera avec ses yeux malicieux et vous rétorquera : "Mais cela, c'est votre interprétation du texte. Moi j'ai cherché à raconter l'histoire d'Aschenbach, un vieil homme comme moi [Yoshi Oïda est né en 1933] car je pense qu'à partir d'un certain âge, il y a vraiment une autre manière de penser et une nouvelle recherche de liberté..." .Il est vrai que lorsque Britten s'empare du récit de Thomas Mann, en 1973, il est lui-même âgé et se sait condamné. En 1971, Luchino Visconti avait fait du roman un chef d'œuvre absolu du cinéma, déchiré entre Eros et Thanatos. De Thomas Mann, Britten conserve surtout Thanatos. "A partir d'un certain âge, la mort est omniprésente. Je pense que pour Britten c'était très important de finir avec cette réflexion sur la mort", explique le metteur en scène. Comment parvenir à restituer cette ode à la beauté et à l'esthétisme sur scène ? Yoshi Oïda a décidé de "suggérer et de faire confiance au public pour imaginer. J'ai cherché à montrer l'intérieur de l'homme plutôt que l'ambiance et la beauté visuelle", précise-t-il. Aschenbach accomplit son destin d'homme à travers sa fascination pour Tadzio, car "sa liberté, c'est son suicide en choisissant de rester à Venise par amour." "Mais en fait Tadzio, c'est seulement un passage vers la liberté qui l'aide à finir sa vie et à accepter sa mort.", conclut le metteur en scène. Soit une vision sage de Mort à Venise axée sur la vieillesse d'un personnage en quête de liberté...
Mort à Venise de Benjamin Britten, direction musicale de Martyn Brabbins, orchestre de l'Opéra de Lyon.
Du 23 mai au 1er juin, à l'opéra de Lyon, Place de la comédie, Lyon 1er. 0826 305 325.