"Grâce au nano aquarium, décorez votre appartement comme vous le souhaitez avec des poissons colorés". Les animaleries plus ou moins sérieuses ne reculent devant rien pour proposer des bacs toujours plus petits. Selon certains professionnels ils correspondraient à des poissons ne nécessitant pas d’important volumes comme le Betta Splendens, plus connu sous le nom de combattant. Mais quand est-il réellement ?
Week end précédent la Saint Valentin, une jardinerie parmi tant d’autres, à l’entrée du rayon animalerie des dizaines de poisson combattant sont entassés dans des récipients fermés à peine plus grand que la moitié d’un pot de yaourt. Amorphes pour la plupart, certains tentent de tourner sur eux même, en vain faute de place. A côté d’eux, leur futur maison : des bacs carrés de 3 litres, avec gravier et une fausse plante au milieu. Interrogé sur ces conditions de maintenance, les vendeurs assurent que cette espèce vie à l’état naturel dans des marres asséchées d’Asie, pouvant ainsi ce contenter d’un simple verre à Cognac s’il le fallait. D’autres aquariums tout aussi petit mettent en avant le fait qu’ils "conviendront aux combattants et feront leur bonheur". Dans une autre animalerie de la région lyonnaise, une opération spéciale met en avant ces bacs de petites tailles, là encore ventant avant tout leurs intérêts décoratifs. Pourtant, une vendeuse d’une troisième enseigne nous confiera que selon "ses convictions personnelles, ce ne sont pas des bonnes conditions pour ces poissons, 15 litres étant le minimum".
La folie des nano aquariums
Dès lors, les combattants mais aussi crevettes et autres petits poissons victimes sont-ils des victimes de la mode des nano-aquariums ? Cette nouvelle tendance à la miniaturisation présente l’aquariophilie comme une activité facile à la porté de tous. Ici point besoin de filtre à nettoyer, de plante à prendre soin, voir de qualité de l’eau à surveillé. Les mini-aquariums se veulent comme l’équivalent de la dernière lampe à la mode, à l’exception que cette fois la décoration est en partie vivante. Revenons au combattant, qui selon le site de référence Aquabase sont victimes de plusieurs préjugés, entretenu régulièrement par une partie des vendeurs mais aussi par l’extraordinaire robustesse de son espèce.
Ainsi contrairement aux idées reçus, ces poissons majestueux, ne peuvent vivre dans l’eau froide, et ont donc besoin d’un chauffage maintenant l’eau entre 24 et 26 degrés. Par ailleurs, bien que vivant parfois à l’état naturel dans des flaques d’eau, cet état est souvent transitoire, évoluant au grès des moussons et des précipitations. Dès lors, ils colonisent tout autant les vastes étendues des rizieres et autres marigaux. Par conséquent, 15 litres étant un minimum, l’idéal étant entre 20 et 30 litres, voir plus, avec un filtre à faible débit, du sable fin, et une abondante végétation, en partie composée de plantes flottantes. Dès lors, ces conditions vitales sont particulièrement éloignées de la réalité des nano-aquarium.
100 litres pour deux poissons rouges, 25 ans d’espérance de vie
Le cas des combattants n’est pourtant pas une exception. Encore aujourd’hui le célèbre poisson rouge est victime des idées reçues. Bien que le désormais classiques bocal rond a perdu sa place dans les boutiques, étant même interdit dans certains pays européens, les petits bacs de 20 litres continus de les accueillir dans les foyers. Raison principale de cette habitude, l’idée que l’espèce serait en mesure d’adapter sa taille suivant son habitat. Pourtant cette affirmation est incorrect, effectivement, le poisson rouge cesse de grandir, mais est alors considéré comme malade, puisque atteint de nanisme. Ces organes s’atrophient, menant à une mort sur le court terme. En effet, pouvant atteindre jusqu’à 20 centimètre (60 pour certaines espèces), le Carassius Auratu de son vrai nom a une espérance de vie de 25 ans. En outre, ce nageur hors pair nécessite lui aussi un bac planté, entre 100 et 200 litres, et ne pourra vivre sans d’autres congénères, étant de nature grégaire.
Patience et nitrites
Les modes et autres formes d’aquarium vont à la miniaturisation, alors que les espèces, elles, ont toujours eu besoin de plus d’espace que celui qui leur étaient accordé autrefois. Un paradoxe purement commerciale, que l’on retrouve aussi dans la notion qu'il ne faut jamais acheter son bac le même jour que ses poissons. En effet, l’eau de ce dernier va devoir subir naturellement un cycle, sans ajout de produit, qui durera entre 4 et 5 semaines. Durant cette période, les bactéries vont coloniser le filtre et le sable, participant par la suite à la décomposition des substances nocives pour les poissons et crustacés. Ce cycle de l’azote est indispensable sous peine de subir le tragique pic de nitrites (NO2) mortels pour les espèces aquatiques. Des tests en bandes ou gouttelettes permettent de surveiller ces paramètres.
Patience et informations éviterons aux aquariophiles en herbe la perte de sa population au bout de quelques jours. Les bactéries vendues en boutique ne seront pas d’une grande aide, masquant souvent le pic, qui apparaitra un jour. Pour les aquariums plus petits, un changement quotidien de l’eau permet d’y échapper, encore faut-il que la taille corresponde au besoin de ses habitants. Au final, les poissons restent les victimes de leur absence d’anthropomorphisme, qui les condamne à être encore aujourd’hui considéré comme des créatures stupides, bonnes à décorer la table de la salle à manger, à l’image des épisodes d’un diner presque parfait sur M6, où ils n’est pas rare que les convives agrémentes leur décoration de combattants.
Pourtant, même le poisson rouge jugé idiot et n’ayant pas une mémoire de plus de quelques secondes se révèlent être un athlète de haut niveau capable de retenir le chemin d’un labyrinthe. Enfin, bien que plus cher, un grand aquarium reste plus simple à entretenir, les paramètres de l’eau étant plus stable. S’orienter vers un modèle de ce type, au détriment des nano restent le gage d’une tranquillité pour son animal de compagnie aquatique et son propriétaire.
Avant de craquer et d'acheter, un rapide tour sur http://www.aquabase.org pourra être salvateur. Le site regorge de précieux conseils pour chaque espèces, mais aussi chaque plantes.