IL Y A 20 ANS DANS LYON CAPITALE - La ville assiste à la fin de la carrière politique d'Andrée Rives. Prêtresse de la culture du PS, habituée des débats passionnés entretenus par son verbe fin et ses remarques tranchantes, la rocardienne s'était imposée en adjointe de la culture… de l'opposition.
Évincée des listes régionales, Andrée Rives décide de quitter la vie politique en janvier 1998. Sans explication, elle annonce à Gérard Collomb et Raymond Barre qu'elle se retire de son poste de conseillère municipale, et de son poste d'adjointe à la mairie du 9e. Cette femme de culture passionnée n'hésitait pas à lever la voix pour faire valoir ses idées, comme la défense de la Villa Gillet qui lui tenait à cœur. Membre du conseil d'administration de l'Opéra national de Lyon, elle faisait partie des cadres pointés du doigt par la chambre régionale des comptes. Elle aurait en effet couvert les débordements coûteux de l'institution. Véritable épine dans le pied du PS puisque pas très "nouvelle gauche morale", Andrée Rives laisse finalement son siège à Hubert Laferrière, qui quant à lui grimpera les échelons jusqu'à avoir sa place sur les bancs de l'assemblée nationale.
Un article de Lyon Capitale paru en janvier 1998, signé par Philippe Chaslot.
Rives gauche, Rives droite
Andrée Rives, écartée des listes régionales, a choisi de démissionner de tous ses mandats. La prêtresse de la culture du PS tire sa révérence en Laissant Le souvenir d'une action et d'un verbe passionnés. En quittant La scène politique, Andrée Rives enlève aussi un sacré boulon dans la chaussure des socialistes.
C'est avec surprise que Raymond Barre et Gérard Collomb ont reçu, le 5 janvier dernier, une lettre succincte d'Andrée Rives (P5), leur faisant part, sans explication, de sa démission de son poste de conseillère municipale de Lyon et de son poste d'adjointe à la mairie du 9e. La raison de cet abandon de la politique ferait suite à la déception d'Andrée Rives d'avoir été écartée des listes régionales. Une conséquence de cette logique des courants dont le PS est délivré officiellement mais qui existe toujours dans les faits : André Rives, classée rocardienne, se serait vu écarter... par des rocardiens qui ont préféré imposer d'autres personnes dans leur quota. En démissionnant du conseil municipal de Lyon et en quittant son poste d'adjoint à la Culture du 9e, Andrée Rives, conseillère régionale par ailleurs, avait été seconde de liste derrière Gérard Collomb aux dernières municipales. Son départ prive la gauche lyonnaise d'une spécialiste de la culture. Elle savait, par une étonnante force de persuasion et une grande rigueur intellectuelle, se tailler dans les esprits, un poste officieux et très original d'adjoint à la Culture de l'opposition. Passionnée, Andrée Rives n'avait pas son pareil pour monter au créneau et défendre avec un phrasé rapide et autoritaire - et sans que les socialistes n'osent la contredire - ce qui lui semblait bon pour Lyon et la Région. Le magistère qu'elle s'était ainsi taillée et qui lui permettait d'être écoutée quand elle montait au créneau, encore dernièrement pour défendre la Villa Gillet ou telle petite troupe de théâtre, trouvait aussi ses racines dans sa participation active à de grandes institutions. De était trésorière de la Halle Tony Garnier et membre du conseil d'administration de l'Association de l'Opéra national de Lyon. Mais cette implication dans l'Association de l'Opéra manquait sans doute d'esprit critique. Depuis 1996, date à laquelle Andrée Rives emboîte le pas à Raymond Barre pour repousser avec mépris le rapport de la chambre régionale des comptes qui met en cause la direction de l'Opéra, ses prises de position sèment le doute. Certains dans son parti lui reproche crûment de trahir sa mission et la gauche en couvrant les débordements d'une institution prestigieuse mais très coûteuse. Andrée Rives n'en a cure et persiste. Malgré de houleux débats internes, elle bloquera au PS toute prise de position ou toute initiative qui pourrait gêner Louis Erlo ou Jean-Pierre Brossmann chez qui elle ne veut voir que le talent et l'ampleur du travail accompli. Elle imposera jusqu'au bout cette vision très peu "nouvelle gauche morale" même quand les trois directeurs sont mis en examen, en septembre dernier. On arrivera ainsi au paradoxe de voir des adjoints de Raymond Barre, André Soulier (UDF) et Denis Trouxe (RPR), réclamer que la Ville se porte partie civile... tandis que la gauche continue de se taire. Lorsque Raymond Barre se décidera à se porter enfin partie civile, André Rives approuvera... du bout des lèvres. Il serait dommage de résumer la carrière d'Andrée Rives à cet aveuglement un peu buté des derniers temps mais il est clair qu'en démissionnant, elle enlève une épine du pied aux socialistes. Son successeur à la culture à la mairie du 9e, Hubert Laferrière, qui était impressionné par la force de conviction du personnage, reconnaissait il y a peu qu'il devenait difficile sur le terrain d'expliquer la position socialiste concernant l'Opéra. Pour lui, une page est bien tournée. Sera-t-il le "successeur" d'Andrée Rives dans le rôle de spécialiste de la culture du P5 au niveau lyonnais ? "J'ai l'intention de me jeter à fond dans ces dossiers... Mais Ange Téodori (adjoint à la Culture dans le 8e) est au moins aussi habilité que moi pour parler de la culture", répond-il. André Rives ne sera pas facile à remplacer. Même quand elle se trompait, elle avait gain de cause avec panache. La succession devrait être plus collégiale... Au moins dans un premier temps.