Rocío Molina : le flamenco mis à nu

Jeune prodige de la danse flamenca, Rocío Molina débarque à Lyon avec une danse qui ose le corps dévêtu, revendiquant une danse libre et sans interdits.

Âgée de 28 ans et originaire de Malaga, Rocío Molina, qui vient à Lyon pour la première fois, est une des artistes les plus reconnues de son temps. Bardée de récompenses, elle a notamment travaillé avec Manuela Carrasco et son écriture féminine et sans tabous, ainsi qu’avec Israel Galván – le plus grand aujourd’hui – qui manie un flamenco théâtralisé, complexe et souvent borderline. Mais elle affirme n’avoir aucun maître.

La pièce qu’elle présente à la Maison de la danse, Cuando las piedras vuelen (“Quand les pierres voleront”), a été réalisée en collaboration avec Carlos Marquerie, metteur en scène, peintre, éclairagiste et auteur, qui lui permet d’élargir son travail chorégraphique. Si son flamenco puise dans la tradition et la virtuosité, il est celui d’une femme qui revendique une liberté d’être ce qu’elle est, non pas enfermée dans les codes d’un style, et que cela plaise ou pas.

Dans cette pièce, elle danse en shorty et soutien-gorge, mettant à nu la rondeur de son corps mais aussi sa puissance, sa détermination et l’amplitude de ses mouvements. Avec la fougue de sa jeunesse, elle va chercher le sens même du baile flamenco, sa nature changeante et sa transmission, sans cesse, de nouvelles sensations. Forcément, elle emmène le spectateur sur des chemins tumultueux, remplis d’un corps qui ondule en douceur ou émerge furieusement, porté par des zapateados véritablement ancrés dans le sol.

Cuando las piedras vuelen, de Rocío Molina.
Du 8 au 10 novembre, à 20h30, à la Maison de la danse (Lyon 8e).

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À voir aussi cette fin de semaine : le duo lyonnais (très) masculin de Thomas Guerry et Camille Rocailleux qui, après quatre spectacles de compagnie et de nombreuses tournées, décident de s’affronter à deux, histoire de retrouver dans la danse et la musique l’essence de leur travail de création.

Leur dernier spectacle, La Mécanique des anges, nous avait projetés dans une espèce de purgatoire où des individus se défiaient dans une esthétique baroque et foutraque. Thomas Guerry (danseur) et Camille Rocailleux (compositeur) n’y dansaient pas, car ils souhaitaient avoir plus de recul pour la maîtrise de la mise en scène. Mais ces deux-là, qui travaillent ensemble depuis dix ans, ont eu l’envie de se retrouver sur scène, histoire de faire le point et ce à travers le choix radical d’un duo : Solonely.

Impossible à ranger dans une catégorie précise, leur langage fait appel à la musique et à la danse, au corps sonore, au théâtre musical, à l’humour et aussi à des personnages loufoques, alors que tous les interprètes sont sollicités pour expérimenter d’autres disciplines que la leur. “Ce langage, disent-ils, nous voulons l’emmener plus loin, le bousculer, le pousser dans ses retranchements et pourquoi pas le nourrir d’autres univers, d’autres énergies, dans une forme toujours cadencée par une culture de la rupture qui nous est propre, entre rire et larmes, burlesque noir, grinçant et tragique de l’absurde condition humaine.”

La pièce dévoile deux hommes que tout oppose, avec pourtant une souffrance et une solitude communes bien que non avouées. Tout du long, ils vont expérimenter l’aliénation, le renoncement, leur incapacité à dire et à être au monde. Jusqu’à l’extrême, là où l’homme ne peut plus rien pour l’autre ; jusqu’au moment où l’homme pourrait trouver son salut en l’autre. La scénographie est celle d’un lieu mouvant, prison devenue terrain de jeu, où les corps, les sons et les rythmes scandent les douleurs et bâtissent les désirs de deux êtres humains. Un duo placé sous le signe de l’émotion, car Thomas Guerry et Camille Rocailleux sont très proches et tout aussi différents que fusionnels, dans une écriture artistique qui se fait toujours à quatre mains et sans hiérarchie.

Solonely, de Thomas Guerry et Camille Rocailleux. Du 8 au 10 novembre, à 20h30, au Toboggan (Décines).

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