Écrit par le dramaturge russe Ivan Viripaev, Ivres explore des situations d’ivresse alcoolique. Un texte cru, d’une grande puissance, porté par une mise en scène spectaculaire d'Ambre Kahan qui a marqué les esprits aux Célestins.
Sur scène, quatorze personnages se croisent dans des circonstances presque banales. Des fins de soirées alcoolisées, un enterrement de vie de garçon, un mariage… Autant de situations où la parole se libère et où les masques tombent, pour ces couples qui se délitent, ces jeunes amoureux qui s’engagent ou ces inconnus qui se désirent.
Tous sont enivrés à l’excès et l’alcool agit comme un puissant révélateur de leurs états d'âme. On y découvre alors les mensonges, les frustrations mais aussi les désirs de chacun.
Une lutte entre pulsion de vie et renoncement
Mis en scène par la jeune et talentueuse Ambre Kahan, le spectacle se déploie dans un dispositif scénique éblouissant, qui vacille et bascule dans une forme continuelle de déséquilibre. Comme les personnages, qui titubent, chantent, se séduisent, s’invectivent ou convoquent Dieu dans une transgression permanente, comme s'ils cherchaient à repousser à l’extrême les limites de leur corps et de leur esprit.
Porté par des comédiens, très justes dans cet état d’ivresse et de mélancolie rédemptrice, le texte percutant et provocateur d’Ivan Viripaiev, pointe nos propres contradictions. Dans ce désordre, il nous décrit la lutte acharnée que chacun mène contre lui-même, entre pulsion de vie et renoncement.
En réalité, à travers cette libération de la parole qui ressemble à une véritable catharsis, chacun mène un combat intérieur pour retrouver sa dignité. Celle que l'on perd à se regarder le nombril, à pleurer sur notre sort ou à convoiter de manière irrépressible, en oubliant l'essentiel : le lien aux autres.
Et les incantations assénées directement par les personnages au public – sous le feu soudain des lumières rallumées de la salle – prennent alors une dimension politique, en pointant l’incapacité de notre société occidentale à aspirer simplement – et sobrement - au bonheur.
Ivres, aux célestins - Théâtre de Lyon. Jusqu'au 27 novembre 2021. www.theatredescelestins.com