Le théâtre des Célestins accueille l’une des pièces majeures de Bernard-Marie Koltès, Combat de nègre et de chiens, mise en scène par le bouillonnant collectif Kobal’t.
Pour mémoire, c’est en créant Combat de nègre et de chiens au crépuscule, en 1983, que Patrice Chéreau révéla la puissance dramaturgique de l’écriture de Bernard-Marie Koltès. À l’instar d’autres de ses pièces telles Roberto Zucco (1988), Dans la solitude des champs de coton (1985) ou La Nuit juste avant les forêts (1977), il s’en dégage une sensibilité aigüe et une vision sombre de l’humanité. Ainsi qu’un humour grinçant.
Cependant Combat de nègre et de chiens détient la captivante particularité d’être une pièce construite comme un thriller, une véritable enquête policière. Elle s’articule autour du personnage, le seul à être noir, d’Alboury. C’est la raison pour laquelle le mot “nègre” est au singulier dans le titre, contrairement au mot “chiens”. (Remarque annexe, Bernard-Marie Koltès écrivait à une époque où l’on pouvait employer le mot “nègre” sans être soupçonné de racisme).
Alboury est venu réclamer le corps de son frère qu’il croit mort dans un accident de travail. Il a en face de lui trois personnages qui vont multiplier les mensonges pour lui cacher la terrible vérité : le corps de son frère est irrécupérable, il a été assassiné et jeté dans un égout.
Tout se passe en Afrique de l’Ouest, dans une cité construite pour les employés blancs d’une entreprise française, cernée de palissades et de miradors. Environnement hostile que Koltès a choisi pour sonder la peur de l’autre, le rapport à l’humanité, et à l’inhumanité, des différents protagonistes.
On peut faire confiance à Mathieu Boisliveau, avec le collectif Kobal’t, pour restituer toute la vitalité de la pièce. On l’a vu à l’œuvre au théâtre de la Croix-Rousse, où il avait proposé, en janvier 2022, une version à la fois explosive et déjantée de la tragédie de Shakespeare, Hamlet. Il avoue être particulièrement motivé par l’œuvre de Koltès.
Construite en vingt scènes, dont treize face à face, Combat de nègre et de chiens constitue pour lui une “véritable machine à jouer”. La scène est transformée en ring où se déroulent les séquences de duels imaginées par le dramaturge. Ce qui permet au collectif d’appliquer à la lettre leur devise : “Toujours creuser, toujours fouiller, toujours racler !”
Combat de nègre et de chiens – Du 25 au 29 avril, aux Célestins